Sur les rives de Chypre, la naissance de Vénus était attendue et Botticelli se devait d’être présent.Sa peinture à tempéra est prête, il a finement lié les pigments broyés avec l’œuf et le lait de figue.
Zéphir se met à souffler alors que sous une pluie de myrtes, Vénus sort de l’eau. Ses pieds reposent sur une gigantesque coquille. Elle apparaît sous les traits de Simonetta Vespucci, connue dans les hautes sphères de Florence, appelée « la sans pareille » en raison de sa grande beauté ! Sa pudeur est à peine dissimulée par sa longue chevelure blonde recouvrant partiellement ses courbes féminines. Son visage est teinté d’une douce mélancolie. Vénus éternellement belle et Simonetta, à la vie si brève…Botticelli a tant de croquis du vivant de son modèle, qu’il peut lui donner une vie de déesse. Une postérité d’éternelle jeunesse.
Alors âgé d’une douzaine d’années, le jeune Léonard de Vinci entre en apprentissage dans une école florentine réunissant maîtres et élèves. Affecté aux plus humbles tâches, il côtoie Botticelli et on peut facilement imaginer l’apprenti Léonard, nettoyer les pinceaux et broyer les pigments en surveillant la cuisson des vernis et des colles, sous l’œil attentif du maître. Avant de devenir à son tour, le brillant maître-peintre florentin de La Joconde Les mystères entretenus autour du portrait de Mona Lisa, font de cette œuvre emblématique une fascination nourrie de tous les fantasmes depuis des siècles. Copiée tant de fois et jamais égalée ! Le jeu des ombres et de la lumière obtenu par la technique savante du « sfumato », ne dévoile pas le secret du maître, du sourire énigmatique et du regard magnétique qui fascinent le monde.
Plusieurs fois attaquée et disparue, la Joconde trop fragile, ne quitte plus le musée du Louvre. Guillaume Apollinaire fut injustement accusé de complicité de vol du célèbre tableau et incarcéré quelques jours, avant d’être innocenté quelques mois plus tard. Malraux a dit de la Joconde : « La mortelle au regard divin, triomphe des déesses sans regard ».
Mona Lisa n’a pas finie de faire parler d’elle…
Vermeer a-t-il existé ? La question peut surprendre tant on dirait que l’histoire est passée sur lui comme les lueurs d’un phare tournant dans la nuit, par éclairs. Tantôt dans la lumière, tantôt dans l’obscurité. Il est surnommé « Le Sphinx de Delft ». En ce siècle d’or, le nombre des peintres au Pays-Bas est important, donc une vive concurrence. N’ayant que rarement quitté sa ville, ses tableaux ne proposent pas d’autre horizon que celui des pièces de sa maison. On trouve dans ses peintures, l’écho d’une existence paisible contrastant avec une maisonnée de onze enfants et une solitude picturale. Vermeer, peintre de la lumière et du silence.
Beaucoup de toiles nées du pinceau de Vermeer représentent des femmes aux multiples visages : dentellière, joueuse de luth, peseuse de perles, laitière, procureuse, flûtiste, guitariste…
Le tableau le plus populaire, tenu pour un des chefs-d’œuvre de nos jours, a le surnom de « Joconde du Nord ». Tout d’abord appelé « La jeune fille au turban », le tableau fut nommé par la suite « La jeune fille à la perle » que nous connaissons maintenant.
En clair-obscur, cette peinture est captivante, elle recèle tant de mystères ! Qui était-elle, fille ou servante ? Nul ne le sait précisément. Regardant par dessus son épaule gauche, elle semble vouloir nous parler et on serait tenté de s’approcher pour l’entendre nous livrer quelques secrets. De son regard, il y a ce quelque chose d’indéfinissable qui trouble et nous échappe…
L’effet exotique du turban bleu et jaune éclaire sa fraîcheur juvénile, et la perle est le joyau qui étincelle le musée Mauritshuis à la Haye.
Lorsque le dernier client est sorti, elle fait le tour des tables et finit les verres. Les mélanges ne la dérangent pas. Elle a de l’estomac. Sans distinction, elle s’abreuve dans les coupes des têtes couronnées ou des gars du quartier ! Aristocrates et voyous à casquette se côtoient dans une joyeuse complicité ! Les habitués étaient là ce soir, elle les a tous vus. Lui, ne manque jamais une seule représentation, il se tient toujours à la même place, une table à sa taille. Il veut capturer chaque instant et croque des yeux et sur le vif, cette reine du chahut dans son incandescence, sa gouaille et sa danse flamboyante. Lui, que sa maladie condamne à rester petit, est un très grand parmi les grands de son art. Van Gogh est un de ses condisciples.
Sa lithographie en quatre couleurs commandée par Zidier, directeur du Moulin-Rouge est fin prête pour la publicité du célèbre cabaret. Au premier plan dans l’ombre, un homme attend d’être décoiffé de son haut-de-forme par la jambe droite de la danseuse qui dévoile sa culotte claire aux spectateurs enthousiasmés.
Edmond Heuze, ancien danseur au Moulin-Rouge a dit d’elle : « Elle était éblouissante cette fille, elle n’était pas une danseuse, elle était la danse. On ne pouvait pas la suivre, on aurait dit un papillon ! ».
Entre la Goulue et Toulouse-Lautrec, c’est une grande histoire. Celle de deux destins hors norme d’une petite blanchisseuse devenue la pétillante reine du cancan et d’un petit homme dandy qui a su s’élever dans les hauts rangs prestigieux de la peinture. Comme un pied-de-nez envoyé à cette nature qui l’a si cruellement éprouvé.
En contemplant le ciel de Paris, on peut y voir dans les nuages la Goulue chahutant avec les anges, alors que Lautrec se noyant dans l’absinthe crayonne ses jupons blancs.
Dans l’ombre d’un grand peintre, se cache toujours une femme inspirante.
Un beau tableau de la peinture et de ses illustres peintres.
Quel joli texte ! Et quelle connaissance (ou travail de recherche, dans les 2 cas bravo !) Tu les as rendus tellement vivants ces grands génies de la peinture, et leurs non moins géniales et inspirantes muses, qu’on sort de ton texte avec le sentiment d’avoir passé un beau moment à leurs côtés… Merci Cora Line !
Merci de ce joli commentaire. En amont de ce texte, je me suis documentée sur quelques peintres mais surtout les muses à travers les siècles. Mon travail de recherche a abouti à ceux-là, mais il y avait encore pléthore de choses à dire sur eux et elles, et surtout en écrivant, j’ai pensé à beaucoup d’autres génies qu’il me fallait oublier car je ne pouvais pas les citer tous…il faudrait des volumes pour chacun et chacune tant leur vie est hors du commun ! A bientôt pour un voyage avec Gisèle !
J’imagine facilement la quantité de matière qui peut exister sur ce beau et vaste sujet ! Du coup, n’hésite pas à décliner ton texte, je pense qu’il y a aussi pléthore de lecteurs intéressés ;-)!
À bientôt, ouiiii, Cora Line :-))) !
Les femmes sont mises à l’honneur et les peintres également, quelle bonne idée ! On apprend et on lit avec plaisir quel régal !
Merci Noelle de ton commentaire qui me touche. Je suis ravie que ce texte t’ait plu.
Bonjour Cora Line
Merci de m’avoir invité à tourner mon regard vers ces REGARDS. Il en est un autre qui bien que muet est chargé de sens, d’émotion, celui de “ Un bar aux folies bergères” d’Édouard MANET
Bonjour Cora Line,
Tout d’abord, je vous remercie d’avoir lu ma petite nouvelle « le baiser de la Mort » et de l’avoir appréciée.
Je viens de lire à mon tour « Des peintres et des muses » et j’ai un gros reproche à vous faire : pourquoi avoir fait si court ? Votre texte est intelligent, compétent (étant peintre moi-même, je sais de quoi je parle) et présenté de façon agréable à lire.
Ce serait criminel pour les amateurs de peinture de ne pas le développer et, pourquoi pas, l’éditer…
Félicitations en attendant de lire d’autres de vos créations. A.S.
Je vous remercie de votre message. Ce sujet est très vaste et je souhaitais seulement faire un petit texte simple sans pour autant entrer dans une démarche compliquée qui me mènerait trop loin et que mes connaissances limitées ne me permettent pas, mais sait-on jamais…