Dans une librairie, un florilège d’amabilité entre deux philosophes.
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Qu’est-ce-qui lui prend à la libraire de nous placer côte-à-côte, n’est-il pas suffisant d’être voisins de tombes et qu’à cause de ce malotru je ne puisse pas reposer en paix ? Chaque soir, les partouzes résonnent dans tout le Panthéon ! Éloignez ce Brutus dont il n’est pas l’auteur mais qu’il osa plagier à Catherine Bernard, pour laquelle sans aucun doute, il enragea de ne l’avoir point renversée sur un fauteuil de la Comédie-Française. C’est un ribaud qui fit fortune à la loterie en trichant ! Ce jean-foutre est une fiente, une lumière éteinte, un mondain sans vergogne, une tête de pipe en trop à la table de notre mouvement, lui qui n’a connu que celui de trousser des gourgandines ! Candide jeune fille qui vous approchez du rayon, ne vous salissez pas en feuilletant La Pucelle d’Orléans, ce gougnafier ne sait pas de quoi il parle, il n’y en avait plus depuis longtemps dans son cercle libertin !
Malgré tout, je lui accorde le plaisir qu’il me fit en quittant ce monde avant moi et d’avoir vécu le dernier mois de ma vie sans cet olibrius. De lui, j’ai eu le temps d’écrire : « Je le haïrais davantage si je le méprisais moins ».
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Je me demande ce qu’un torchon aussi immonde, peut avoir d’intérêt dans cette grande librairie et de surcroît sur la même étagère que mon œuvre ! Il ne fait plus mystères que cet escogriffe était mon meilleur ennemi…Les Confessions d’un pisse-froid pratiquant régulièrement l’onanisme qui n’a jamais parcouru autre ouvrage que les livres « qu’on ne tient que d’une main » ! Ce fut autant d’enfant qu’il n’abandonna pas…Dans la sphère littéraire, le bruit court qu’il en rejeta cinq ! Ce bâtard osa écrire un traité sur l’éducation ! Faites ce que je dis, pas ce que je fais…Ce Mimile colle mal à l’auteur ! N’a-t-il pas écrit : « Nous souffrons de maux guérissables et la nature elle-même nous aide, qui sommes nés pour faire le bien si nous voulons nous soigner ». Je ne jetterai pas la première pierre à ce pignouf, lui qui a tant fabriqué de cailloux dans sa vessie qu’il aurait pu construire des latrines publiques !
Pour nous renvoyer dos à dos, le jeune Gavroche a chanté juste avant de mourir :
Je suis tombé par-terre
C’est la faute à Voltaire
Le nez dans le ruisseau
C’est la faute à Rousseau
Condamnés à être proches pour l’éternité…