Journal d’un loup ( Suite, page 17 ) "Les secrets de la momie"

4 mins

1987

« LES SECRETS DE LA MOMIE »

Le brigadier de gendarmerie Mactyre tira son siège de sous son bureau et déposa son arme de service dans le tiroir de droite. Il s’assit, regarda l’heure et pris toutes ses aises avant d’ouvrir la première page d’un cahier d’écolier. Sur la couverture, désormais sèche mais encore ondulée par l’humidité, on pouvait lire “1987”

C’était un de ces cahiers où alternent une page à grosses lignes et une page de papier dessin.

Sur les pages à dessin se succédaient recto-verso, des maisons colorées dont la cheminée fume, des bonhommes qui se tiennent la main, des animaux plus ou moins identifiables. Dessins d’enfant ! Et entre chaque pages coloriées, du texte remplissait, d’une écriture nerveuse et irrégulière, les lignes imprimées. 

« Je traîne ce cahier depuis plusieurs jours sans savoir trop pourquoi. Au départ je l’avais récupéré dans une poubelle de parking et mis au sec pour allumer un feu bien que n‘ayant pas d‘allumettes. Aujourd’hui c’est un stylo usagé mais qui fonctionne encore que je trouve sur ce même parking. C’est cette découverte qui me donne l’envie d’utiliser les deux pour écrire ces quelques phrases.

Est ce un besoin de communiquer avec moi-même puisque les autres me font peur ? Ou celui de laisser une trace ? Je ne saurais le dire précisément.

Je pourrais commencer par “Il était une fois ” mais je n’ai pas de souvenirs, tout est confus dans ma tête. Ou bien !” Cher journal ” ? Mais en attendant, je préfère y noter ce que je dois faire et quelques réflexions et questions qui m’interrogent. Mais en attendant quoi ? A cause de cette perte de mémoire, je noterais tout ce qui me paraîtra important.

Je commencerais donc par :

– Trouver de l’eau propre.

– Ne pas traîner sur le parking la journée.

– Trouver à manger.

– Explorer les alentours

De vagues souvenirs surgissent au hasard des événements, qu’a t’il pu arriver de si terrible pour que je perde la mémoire d’une partie de ma vie.

Aujourd’hui le ——-? au matin. Par manque d’activité ou par apathie, je me prend au jeu de l’écriture.

Je suis près d’un parking dans la forêt, accompagné de deux chiens qui ne me quittent pas et qui semblent me connaître. 

Je n’ai pas de souvenirs précis mais un instinct viscéral m’interdit de me montrer quand passe ou s’arrête une voiture. Sale, puant, je suis tout taché de sang séché mais je n’ai pas de blessures.

Qu’est-ce que j’ai fait?

Il me faudrait me laver et laver ce linge souillé.

J’attends le soir pour faire les poubelles à la recherche de nourriture. Je palpe les sacs dans la pénombre afin de sentir à travers le plastique les éventuels aliments rejetés, sandwichs entamés, banane blette, bouteille d’eau à moitié vide. Quelques fois, pas besoin de faire les poubelles, les restes sont sur la table en bois de l’aire de pique-nique. J’ai juste à m’attabler et je partage avec mes deux compères les mets les moins délicats. Ce soir, carcasse de poulet et vieilles frites froides et molles. Restant de coca et d’eau minérale.

Je dors, plus haut dans la forêt, à plusieurs centaines de mètres du parking. Je dors très mal. La nuit, il ne fait pas très chaud surtout que les chiens en profitent pour aller traîner et leur chaleur me manque. Le matin je me réveille avec mal partout, surtout dans le dos.

_ Qu’est-ce que j’ai pu faire qui m’interdise tout contact ?

_ D’où vient cette méfiance ? Rien ! Je ne me souviens de rien !

  Ce matin un morceau de viande m’attendait, sanguinolent, je pense reconnaître du lapin ! Etait-il vraiment pour moi ou était-ce simplement le surplus de leur chasse, Je ne sais pas trop, mais cru c’est spécial!

– Il faut que je me lave.

Il y a six jours environ que je suis là, seul sur ce parking et si j’en croit le quotidien qui traîne sur un banc ce matin nous sommes le 12/05/1987.

Je me prends au jeu, créant petit à petit une sorte de journal au jour le jour qui me permettra de savoir à peu près le jour où nous sommes. Et malgré l’idée de destruction qui plane autour de moi, l’envie surgit de laisser une trace pour expliquer. Expliquer quoi ? A qui ? Pourquoi?

  Mon calendrier débutera donc ce jour quoique peut-être avec un décalage avec la réalité car ce journal pourrait être de la veille ou plus vieux encore.

Bizarrement, si ce n’est la date, les informations qui s’y trouvent ne m’intéressent nullement. Les mots écrits en gros titres « Grèves, Bombes, guerre, Tchernobyl, » repoussent mon attention et les photos d’hommes armés aux rictus colériques et agressifs me font détourner les yeux. Je le garde précieusement, il me servira pour m’essuyer le matin et peut être pour allumer un feu si je trouve de quoi créer une flamme. 

Le 13/05/1987

Je me suis souvenu du nom des chiens. Ce ne sont pas des compagnons d’infortune rencontrés par hasard, ils sont à moi. La mémoire me revient ?

Pax, mon fidèle compagnon est un bâtard de berger belge et de berger allemand il vient d’avoir 9 ans mais je l’ai eu à quelques mois. La mère refusant de le nourrir, c’était le plus moche de la portée. Très gentil et très docile, un geste ou un signe de tête suffisent pour qu’il comprenne ce que je désire. Malgré tout il fut dressé à l’attaque et me défendrai jusqu’à la mort si le besoin s’en faisait sentir. Un poil court gris et noir, teinté de feu sur ses quatre pattes et une voie rauque et sourde.

SAHO, Berger belge groenendael, robe sombre, crinière et dos noir brillant, une superbe étoile blanche sur le poitrail et seulement le bout des pattes s’éclaircissant jusqu’au roux. Cadeau, je crois, d’un voisin qui déménageait, moins bien dressé et beaucoup plus jeune. Cabochard mais tellement gentil.

 Ils n’ont pas de collier et me font confiance. Cela suppose un bon dressage, et je comprends mieux leur attachement à ma personne et leur prévenance à mon égard.

Je ne sais pas comment, mais ce sont eux qui m’ont nourri plus ou moins pendant ces jours dont je ne me souvient plus. Ceci explique sûrement tout ce sang et cette odeur. Cette fois, il faut vraiment que je trouve suffisamment d’eau pour boire et me laver. C’est décidé demain expédition « trouver de l’eau ». PAX et SAHO n’ont pas l’air de souffrir de la soif donc il doit y avoir de l’eau pas très loin.

 14/05/87

Tout reste confus et je ne peux pas noter toutes les questions qui m’assaillent. Mais il en est une qui me ronge: Qu’est ce que je fout là ? Avec ces deux animaux ? 

Et pourquoi je m’interdis tout contact avec les gens ? Qu’ai-je fait de si terrible ? Ou que m’ont-ils fait de si terrible ?

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