C’était la première fois que je venais ici, on aurait dit un parc orné de boites aux lettres, d’énormes boites aux lettres qui n’attendaient plus rien, et tout autour des arbres, j’étais loin de la ville, une seule construction en forme de blockhaus à la fin de l’allée, j’ai garé la voiture et je cherche l’entrée.
Des gens par petits groupes, j’en connaissais certains je n’osais m’approcher, le dernier qu’on invite je ne savais pas pourquoi, une table était dressée pour fêter quelque chose, il manquait un convive quelqu’un me faisait signe, j’ai serré quelques mains embrassé quelques filles qui me reconnaissaient, on allait commencer, j’ai pensé à la guerre et ses fours crématoires, j’ai eu peur de penser j’ai fait semblant de sourire.
On s’était donné rendez- vous sur le pont, le plus grand de la ville qui enjambe La Garonne, je reconnaitrais facilement un manteau aubergine, j’ai vérifié la couleur je n’étais pas vraiment sûr, les goûts et les couleurs, parlez moi d’Arc en ciel.
— Bonjour, tu es Valérie ? Michel pour le covoiturage.
On discutait depuis quelques semaines sur un site de rencontre, ça n’a jamais été très loin, je cherchais juste une compagnie virtuelle, quelqu’un que je ne verrais jamais, une photo de très loin mais elle me répondait, ça me suffisait largement.
— C’est gentil de venir me chercher, ma voiture est au garage, je voulais absolument faire un tour à ce vide grenier en pleine campagne, il y a toujours des petits trucs à chiner.
J’ai failli ne pas m’arrêter sur le pont, la couleur aubergine j’ai potassé la chose, mais une cape à ce point aurait pu rendre jaloux tous les poteaux de signalisation, j’ai promis d’être là, je tiens toujours mes promesses.
On arpentait les stands, je ne disais pas grand chose, je crois que je n’ai pas su à quoi elle ressemblait, je préférais regarder les objets des étals, je la laissais avancer un ou deux pas devant moi, et si je la perdais je chercherais une cape aubergine avec du rouge dedans.
— C’est bon, on peut rentrer, il commence à faire tard, j’ai trouvé des babioles, regarde comme c’est joli.
J’ai regardé ses babioles, les goûts et les couleurs, je n’ai pas voulu commenter, c’est peut-être moi qui n’ai aucun sens des couleurs et des formes.
— On peut-être sur le pont dans un quart d’heure, une bonne après-midi de remplie.
Je ne savais toujours pas à quoi elle ressemblait, je ne regardais que ses yeux quand il fallait parler, tout ce qu’il y a de plus commun, comme les miens je l’avoue.
— Si ça ne dérange pas, j’habite juste à coté de là ou tu m’as prise, et je tiens vraiment à te remercier de ta gentillesse.
Une porte quelconque à l’étage d’un immeuble, mais dès que je suis entré, ce qu’elle m’invite à faire, un grand appartement rempli d’un tas de trucs, avec ce qu’elle ramène ça ne va pas jurer, et au bout du salon une terrasse immense, mon trois pièces-cuisine multiplié par deux, je crois que j’ai apprécié sa surface de vie, et des bouquins partout, des titres en Espagnols quelques autres en Français, je me suis retourné pour lui en faire compliment, elle est en train de défaire sa cape.
— Oui je sais c’est bordélique, j’enseigne l’Espagnol depuis que je suis en France, mais j’ai vécu en Espagne, j’enseignais le Français, je garde tous les bouquins. Je te sers quelque chose, café ou jus de fruit, il ne me reste pas grand chose, je n’ai même pas d’alcool, je n’ai pas fait les courses et je reçois rarement.
Je bois l’apéro comme tout le monde, sans exagération quand c’est le bon moment, mais tant pis ce sera un jus de fruit, ça ne me manquera pas. C’est à partir de là dépouillée de sa cape que je l’ai regardé, un petit quelque chose qui la faisait sortir du lot, personne ne se serait retourné avec ou sans sa carapace, mais une fille charmante.
Je suis resté deux ans, je n’étais pas amoureux, mais elle me plaisait bien, j’ai appris Cervantès, écouté les poèmes de Garcia Lorca, j’ai visité l’Espagne toutes les villes importantes et quelques petites villes, j’ai vu dans Barcelone Sagrada Familia, et tout ce qu’il fallait voir, je me suis fait expliquer, j’en ai croisé certains, des indépendantistes et les fils d’émigrés, ceux qui fuyaient la guerre, j’ai appris beaucoup de choses, mais je ne savais pas tout, un jour elle est tombé et s’est cognée la tête.
Sur le lit d’hôpital, juste avant son opération, le médecin était en train de m’expliquer, je ne comprenais rien.
— La pose du pacemaker est une nécessité, son cœur s’emballe trop vite, un traitement pour les poumons et un respirateur pour la nuit, elle n’a pas vraiment le choix, ses poumons sont noyés de ses abus d’alcool, son addiction est mortelle si elle ne se soigne pas.
Je ne l’ai jamais vu boire, tout au moins à ce point, deux ans on est resté, je n’avais rien remarqué, mes bouteilles descendaient, mais je n’y prenais pas garde, je recevais souvent, chez elle très peu d’alcool, elle recevait très peu il n’y avait que moi.
A force de cliniques et de centre de repos, on est resté ensemble encore un an de plus, quelques week-end de permission avec l’obligation de souffler dans le ballon au retour, j’avais caché tous mes alcools, j’ai évité de boire quand on était ensemble, il n’y avait plus que moi.
Un jour, c’est arrivé, un coup de téléphone, c’était en pleine semaine, son fils qui m’appelait pour me donner l’adresse, on se retrouve dans deux jours, c’est au crématorium.
Je me suis remis à boire, non pas parce que je la regrettais, je l’aimais bien quand même, mais parce que je m’en voulais d’avoir été aveugle, d’avoir une cécité qui a duré deux ans.
C’est l’heure de l’apéro !
Un peu jeté à la va-vite ^^ mais bon, l’esprit général de ma vie trépidante est là ^^
Ce que tu appelles "esprit" dans ton commentaire, moi j’appelle ça "âme". Le mot est différent mais… l’esprit est le même. Nous sommes donc d’accord et je persiste et signe : tu as un/une très beau/belle esprit/âme sieur Michel.
Re-na ! lol
^^ toujours content de te lire ^^ mais pas qu’ici ^^ l’esprit est ce qui reste, comme de jolis mots comme une persistance ^^ 21 grammes au moment de la mort ^^ les poumons ont perdu ce qui leur reste d’air ^^ on ne sera jamais d’accord ^^ St Thomas est mon frère ^^ pour définir l’humain ^^ un esprit supérieur, un esprit inférieur, il n’y a pas d’âme là dedans ^^ na !
Ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon-ronchon mdr
^^ pas tant que ça quand m^me ^^ des fois je me repose ^^
Eeeeeeeh oui Ca s’appelle la vieillesse ça ! mdr
ah non ^^ je procrastine souvent