Hell of a travel shop

              “Faites fi de vos soucis”

C’était le slogan de la nouvelle enseigne “bienveillante” du moment. Le nom n’a que peu d’importance puisque tout était factice, du nom au voyage, jusqu’aux chenapans en dessin 3D de l’affiche.

Fatigué avant même d’avoir commencé ma journée, j’entrais un lundi dans le magasin et passais un coup de bigot à mon patron pour le prevenir de mon absence.

La vendeuse ravissante me souriait poliment:

“Bien sûr, monsieur, vous n’avez jamais rien vu de pareil !”

Le dépliant de “One hell of a travel shop” n’indiquait aucun prix. Le client ne payait qu’à satisfaction complète. De quoi profiter un max en affichant pas même un sourire durant le voyage et en poussant une gueulante pour le moindre truc afin de repartir heureux et dépossédé de rien.

La condition: signer un document présenté en une sorte de contrat entre le propriétaire de l’agence et l’intéressé.

Les contrats, j’en fais signer tous les jours pour mon taf. Je fais craquer les proprios avec des clauses de cadastre vicieuses qui me rapportent gros et ne leur laisse rien. Je suis le vilain leprechaun de la préfecture hehe. 

C’est pourquoi, je lus, ce jour-là, attentivement le document, persuadé d’y trouver un piège quelconque. Rien.

Je signais immédiatement à la vue des belles femmes seins parfaits, tenues suggestives promis dans la brochure, mais à peine avais-je signé le contrat que je me sentis basculer en arrière.

En face de moi, la vendeuse charmante avait disparu et au moment où je m’attendais à heurter le sol, je le traversais. Ce fut une chute longue, à travers plancher, pierre et terre. Je heurtais à chaque palier la matière en un choc violent qui me laissait plus mal en point de seconde en seconde. Quand ma dégringolade prit fin, je m’interrogeais instinctivement sur laquelle des strates que j’avais traversées, avait retenu ma savate gauche car elle avait belle et bien disparu. Et pendant que je cherchais en vain l’infortunée manquante, une silhouette démesurée se plaça au dessus de moi. 

Lentement, je levais la tête pour me trouver nez à nez avec un monstre de film d’horreur, muni de cornes et d’ailes crochues. 

“Louis Menuisier, en voilà un qui promet d’être intéressant !”

“Qui… qui êtes-vous ?”

Il ne répondit pas mais pencha la tête affichant une expression qui voulait probablement dire “à ton avis”. Car il n’y avait aucun doute possible, j’avais devant moi l’ange des enfers, Samaël en personne.

” Bon, t es vraiment une sacrée raclure, mon gars. T’es pas là pour rien. Si tu savais le nombre de gens qui sont ici parce que tu leur as tout pris et que mon père tolère pas le suicide. Tu dois savoir que ça fait un moment que j’attends ta venue, mon salaud. Elle avait pariée qu’elle arriverait à te faire signer le contrat et j’ai parié l’inverse. Ces percepteurs démons sont vraiment bons. Si j’avais su…”

Exactement ce que j’étais en train de me dire.