Sven
Je fus sorti de ma léthargie en entendant la voix de Tara :
– Il est là, Maître, dit-elle en quittant la pièce.
Je regardais autour de moi nerveusement, une grande salle sombre, aménagée en salle de trône. Après ce qui semblait être une éternité, Kohl a finalement parlé.
– Viens ici et assieds-toi, Sven.
Avec des mouvements lents, Kohl me montrait deux fauteuils et me dit doucement et, à mon avis, trop satisfait :
– As-tu déjà entendu parler des Mages ?
Je hochais la tête avec prudence. Les Mages étaient dotés de capacités spéciales. Une sensation inconfortable s’est emparée de moi et j’ai dû me ressaisir pour ne pas demander plus précisément. Je ne lui donnerais pas satisfaction. Kohl hochait la tête de satisfaction, puis levait une main et une porte à côté de la cheminée s’ouvrit.
Un homme, au visage balafré, entrait dans la pièce et s’assit sur un autre fauteuil. Kohl me présentait :
– Voici Bélial, c’est un druide aux compétences très spéciales. Il peut lire dans les esprits et parfois voir l’avenir.
Bélial acquiesçait et une expression satisfaite passait sur ses traits. Il avait l’air assez fier. Connard. Soudain, il plissait la bouche et me regardait avec colère.
– Ne m’appelez plus jamais de connard.
Je souriais méchamment.
– Que le jeu commence, me disais-je à moi-même, sachant que Bélial m’entendait.
Connard ! Connard ! Connard !
L’éclat de colère n’était pas moindre, au contraire. Kohl venait de nous regarder, son expression complètement sans émotion. À un moment donné, quand je pensais à des termes bien pires dans la direction de Bélial et qu’il était sur le point de se jeter sur moi, Kohl intervenait :
– C’est assez Bélial ! Tu sais quoi chercher.
Un sourire méchant se répandait sur les lèvres de Bélial. Quelque chose de grave n’allait pas se produire en ce moment. Soudain, une douleur semblable à une migraine me traversait la tête, ce qui me faisait siffler.
J’avais l’impression que quelqu’un fouillait dans ma tête. La douleur ne s’arrêtait brusquement qu’après ce qui ressemblait à une éternité. Je compris que c’était Bélial, il était entré dans ma tête, dans mes souvenirs.
Il était assis droit dans son fauteuil, ses yeux étaient vides, presque blancs. Kohl se tenait à côté de lui, sa posture tendue.
– Que voies-tu, Bélial ?
Bélial tournait la tête vers le démon avec un mouvement mécanique, puis dit à voix basse :
– Vous allez avoir des moments difficiles, Ancien. Vous serez trahi par lui, dit-il, en me désignant avec son doigt. Vous ne pourrez compter que sur la confiance qui vous semble la plus dangereuse. Mais je vois aussi, une ombre, un danger qui voudra se débarrasser de vous deux.
Après ses révélations, Kohl demandait à Bélial de sortir. Je me retrouvais seul devant un démon en colère. Après quelques secondes, Kohl faisait apparaitre un livre à la couverture usée, sûrement magique, il l’ouvrit à une page et soudain un sourire, qui ne me disait rien de bon, apparaissait sur son visage :
– Nemo plus magicae. Recede potestatis ejus. Salva me ex periculo. Ut faciam tibi…*
*- Fini la magie. Retirer ses pouvoirs. Protégez-moi du danger. Je vous l’ordonne…