Ma barbie au bord de la route.

Quand j’étais petite avec ma sœur, nous avions des rituels. Les jours ou nous n’avions pas école et où le soleil, laissait sa place à la pluie, on se regardait et en cœur, on se disait : «  Ça, c’est un temps à jouer aux barbies ! » .

31 décembre 2002, 23H59.
Nos parents dorment, Camille et moi, on attend avec impatience le décompte de la nouvelle année devant la télé.
10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1, 0
BONNE ANNÉE ! 

Ma sœur me regarde et me dit :

– C’est bizarre ça me rend triste de quitter l’année 2002.
– Pourquoi tu dis ça ? 

Je cherchais son regard, et avec circonlocution elle me dit enfin ce qui lui trottait dans la tête.

– On dirait que rien ne sera plus comme avant. 

Aujourd’hui, quand je repense à tout ça, je me dis que du haut de ses 8 ans, elle n’avait pas tord. 

Mercredi 17 septembre 2003. 

12H fin des cours pour la journée j’ai fini sur une note d’art plastique. 

Aujourd’hui je dois rentrer seule du collège, ma sœur est chez mon grand-père et ma grand-mère, ils habitent l’appartement juste en dessous du notre. Je fais un bout de chemin avec ma meilleure amie.
Ma mère a repris une formation. Elle arrivera sûrement en même temps que moi.
Mon père lui travail toute la journée, nous ne le verrons que ce soir.
Il fait tellement chaud, l’été est toujours là et sa chaleur est toujours aussi lourde. Je porte une robe aujourd’hui. La première robe que j’ai absolument tenue a payé avec mon argent de poche. Elle est en jean bleu dégradé violet. Dessus, il y a des papillons, je suis fasciné par eux. Leurs manières de virevolter autour de nos têtes. Leurs couleurs si différentes les uns des autres. C’est le moment de se séparer avec ma meilleure amie, on se dit au revoir et à demain, mais on a encore énormément envie de parler ensemble, on parlait de ce garçon, hâbleur, toujours à se moquer de nous. On décide de continuer un bout de chemin ensemble. 

12H25 

Il y a peu de monde autour de nous pour traverser. Le passage se fait en deux parties. On se retrouve au milieu de la route, entre ces 4 voies. Le deuxième feu passe au rouge, je vois une moto s’arrêter le plus à droite possible. Mon bonhomme devient vert. Je m’élance.
Tout va trop vite pour tout comprendre. J’entends mon prénom et vois qu’une foule de gens s’est amassé autour de moi. 

On me demande mon âge, mon prénom, si je vais bien. Une dame me prend dans ses bras. Un monsieur me touche toute la colonne vertébrale. Une autre fouille dans mes affaires pour trouver le numéro de téléphone de mes parents. 

Je cherche mes lunettes, quelqu’un me les tend. «  Est ce que je vais être paralysée ? » 

C’est la seule question que je me suis posée. 

Mes parents sont arrivés très vite, d’abord, ma mère avec mon grand-père suivit de mon père. 

Je fonds en larmes. On m’interroge. Et là, je vois un homme sorti de nul part.
Ils ont retrouvé la voiture dans une résidence un peu plus loin. Mais personne n’était dedans. Au moment où tout le monde, s’est focalisé sur autre chose, cet homme s’est approché de moi.

« Je suis désolé ». 

Maintenant, j’ai 29 ans, cet accident, c’est mon eccéité, c’est lui qui m’a forgée. 

Mardi 2 juin 2020, je voudrais qu’il pleuve, appeler ma petite sœur et lui dire de venir jouer à la barbie avec moi.