Asura – Dieux et diviotis – Chapitre 14

7 mins

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Kaleb Corasis

    Quittant la petite échoppe de son tuteur pour prendre de l’air, le jeune triton flâna joyeusement dans les rues de Mhala en sifflotant un des seuls airs qu’il connaissait. Chantée aux nourrissons pour qu’ils arrêtent de pleurer, sa sonorité agréable donnait des sourires à quiconque l’entendait. Tout en continuant de fredonner légèrement, Kaleb se rappela qu’il devait se rendre au bureau de poste pour y rédiger une lettre. Il tourna plusieurs coins tout en traversant quelques rues avant de se retrouver devant le bâtiment aux briques bleues. En pénétrant à l’intérieur, il fut surpris de voir la très grande quantité de pigeon qui volait librement dans l’endroit. Majoritairement gris, il y en avait aussi des noirs et des blancs. Une dame, au comptoir près de la porte, lui souhaita la bienvenue avant de lui poser d’autres questions.

— Bonjour jeune homme, êtes-vous ici pour écrire une lettre, en poster une ou bien les deux ? demanda-t-elle en souriant.

— Les deux je vous prie, lui répondit le triton en lui retournant le sourire.

— Très bien, suivez-moi.

    La dame l’emmena dans un petit cubicule silencieux où il pourra rédiger sa lettre sans être dérangé. Avec de le laisser écrire, la dame lui donna une dernière directive.

— Lorsque vous aurez terminé, veuillez apporter votre lettre au comptoir de voyage. Un employé attachera votre missive à la patte d’un pigeon, puis votre destinataire la recevra d’ici quelques jours dépendamment de la destination. Bonne écriture.

    Elle le laissa seul, puis il se mit à rédiger son message avec hâte. Il n’en avait pas écrit depuis son arrivée dans la ville, près d’une semaine auparavant. Puisqu’il avait plusieurs choses à dire, mais ne voulait pas que ça soit surchargé, il tenta d’écrire quelque chose de relativement court.

Votre majesté, reine Hadrielle Teberis,

    Comme vous l’aviez prédit, ses ailes sont apparues récemment. Après la cérémonie d’adoubement pour être plus précis. Votre supposition concernant son sceau était vraie. Pas que j’ai douté de vous votre majesté, bien au contraire, mais nous n’avions aucun moyen de l’affirmer. Une prédiction d’augure est parfois trompeuse. Avec cette craquelure, il est possible qu’elle soit en mesure d’utiliser sa magie comme elle le souhaite, mais sans les diviotis, la tâche ne peut qu’être difficile. Malgré son immense pouvoir, elle n’est qu’une enfant de dix-sept ans et je doute fortement qu’elle soit en mesure d’accomplir la prophétie. Je sais que vous avez placé vos espoirs en elle, votre majesté, mais peut-être n’est-elle pas la bonne Asura ?

    Vos espions ne vous ont peut-être pas encore rapporté ceci, mais un draconien a été aperçut avec elle. Hier en après-midi. Il s’était déguisé en elfe paysan pour traverser les portes de la citée sans se faire remarquer. Il l’a emporté ailleurs pour quelques heures, puis ils sont réapparut au même endroit. Étant des ennemis des races divines, je donnerai quelques pièces d’or à des mercenaires pour qu’ils s’occupent de son cas. Il pourrait s’avérer être un puissant ennemis et je sais que votre majesté ne voudrait pas avoir à faire face à ce sorcier draconien. Je ferai tout en mon pouvoir pour l’empêcher de rallier Aeris à sa cause. La prophétie sera accomplie.

Sincères et respectueuses salutations, Kaleb Corasis, fidèle servant de sa reine.

    Le triton cacheta sa lettre d’un tampon en bois et de cire couleur bleu ciel, puis se leva de sa chaise. La lettre en mains, scellée du sceau des anges, une rose avec une paire d’ailes, Kaleb contourna les cubicules pour se diriger vers le comptoir de voyages. Il dû attendre quelques minutes en ligne avant que son tour ne vienne. Il aurait pensé se faire servir par un adulte, mais un petit centaure à la robe grise, un enfant de près de 7 ans, debout sur une caisse en bois, lui tendit la main pour prendre l’enveloppe.

— Tu es bien jeune pour travailler parmi les grands, lui dit Kaleb en posant la lettre cachetée dans sa petite paume douce.

— Ma maman et mon papa sont les chefs du bureau de poste ! Ils me laissent travailler ici quand je ne peux pas aller à l’école !

    Un grand sourire joyeux et fier fendit son visage, puis il tourna le dos au triton pour attacher soigneusement le morceau de papier à la patte gauche d’un des pigeons perchés derrière le comptoir en bois.

— Où est-ce qu’elle va votre lettre ? Demanda-t-il en sortant un bac contenant des centaines d’étiquettes annotées de sous le bureau.

— Au palais royal de Lahariel, en Chyline. J’ai une lettre urgente pour la reine Hadrielle.

    Soudainement, l’expression du petit centaure changea pour afficher de la surprise et de l’incertitude.

— Nous n’avons pas le droit d’envoyer de lettre aux rois et reines, désolé monsieur, s’excusa le garçon, ses oreilles se rabaissant vers l’arrière,

— Allez petit, tu peux bien faire une exception ? Je suis un de ses servants et je dois envoyer ce parchemin dans les plus brefs délais. Il n’y a aucun autre bureau de poste dans les environs, lui dit-il d’un air se voulant insistant.

    Contrit, l’enfant accepta à contre cœur, mais demanda à Kaleb de ne rien révéler à ses parents. Le triton lui promis, puis le centaure accrocha une étiquette où était noté, d’une écriture fine, le mot Lahariel.

— Allez va ! S’écria l’enfant en persuadant le pigeon de s’envoler par des signes de mains.

    L’oiseau s’éleva dans les airs, puis s’échappa du bâtiment par une grande trappe prévue à cet effet, dans le toit de l’endroit. Kaleb mit son index sur sa bouche pour imiter le silence, puis avec un sourire, s’éloigna du comptoir pour s’avancer vers la sortie. La dame à l’accueil le salua avant qu’il ne passe le pas de porte Les doux rayons du soleil frappant son visage lorsqu’il fut à l’extérieur, il pensa : c’est la température idéale pour une baignade dans l’océan, mais je dois encore aller recruter ces mercenaires. Les soucis de la reine ne s’envoleront pas comme ça, dans un claquement de doigts. Faisant disparaitre son sourire, il se dirigea vers l’endroit le moins recommandé de tout Mhala : le quartier noir. Avant fréquenté, les mercenaires et voleurs y avaient fait leur coins à eux il y avait de ça plusieurs années. Le triton dû traverser des ruelles étroites et sombres avant de se rendre à la place centrale.

    Cachant son visage grâce à sa capuche, il déambula un petit moment entre les gens peu fréquentables présents. Il leva son regard vers un des panneaux en bois orné de métal bordant les magasins dans la rue. Devant lui, une pancarte presque aussi grosse que lui où était inscrit Le serpent d’or en lettres rouges. Un homme crasseux lui fit les yeux noirs lorsqu’il posa sa main sur la poignée de la porte de la taverne. En entrant, une forte odeur d’urine, de vomi et d’alcool le frappa de plein fouet. Pour éviter de rendre son repas sur le sol collant de l’endroit, il utilisa un pan de sa cape pour bloquer son nez. Il se trouvait au bon emplacement. Rien de mieux qu’une taverne sale et puante pour trouver des mercenaires, pensa-t-il sarcastiquement. Ce n’était pas illégal d’en être un, mais si un garde ou un civil venait à savoir que tel personne l’était, elle serait gravement dans le pétrin. Il n’y avait rien de défendu sauf les crimes comme les meurtres, les attaques dans les villes, le vol ou encore les intrusions dans les bâtiments. Être payé pour faire près de n’importe quoi comme tuer une personne n’était pas spécialement légal ni illégal. C’était justement pour cette raison qu’ils n’étaient pas bannis des villes. Ils servent aussi de soldats lors d’attaques puisqu’ils sont entrainés presque de la même manière que ces derniers. Quelques années à manier l’épée et voila ! Ce n’était pas compliqué.

    Kaleb regarda autour de lui, malgré la faible luminosité de la taverne, tentant de trouver ces mercenaires. Au bout de quelques secondes, il les trouva finalement. Ils étaient assis à une table, jouant à un jeu de carte. Il était facile de les reconnaitre grâce à leurs armures, leurs armes ainsi que leurs bourses en cuir contenant une bonne quantité de pièces d’or retentissantes. Le triton s’approcha d’eux d’un pas déterminé. Un homme à la grande barbe rousse et touffue posa ses cartes sur la table lorsqu’il aperçut l’adolescent. Il se leva de sa chaise pour se placer devant lui, tentant de l’intimider.

— Alors gamin, on s’est trop éloigné des jupes de sa mère ? Lui demanda-t-il en éclatant d’un rire gras. Retourne acheter tes légumes dans le quartier marchand.

— Si je suis ici, c’est pour une très bonne raison, lui répondit le triton d’un air sérieux, se voulant presque malfaisant. Est-ce assez ?

    Kaleb décrocha la bourse en tissu, prévue à cet effet, de sa ceinture de cuir, puis la tint devant le visage du grand bonhomme. Son expression changea pour de l’admiration, mais redevint sérieux l’instant d’après. Il soupesa le sac, puis afficha un mince rictus mauvais sur le coin de ses lèvres gercées.

— Tu sembles savoir ce que tu fais gamin. Marché conclut. Moi et mes gars sont à toi. Que veux-tu qu’on fasse ?

    Les quatre autres hommes assis à la table se tournèrent dans notre direction pour mieux écouter notre conversation.

— Hier, un sorcier draconien a été aperçut dans une ruelle du quartier marchand et pour empêcher qu’il rallie des gens à la cause des démons, il est impératif de l’éliminer. De plus, la reine Hadrielle Teberis ne voudrait pas à avoir à affronter cet ennemi dans le futur.

— Un draconien ? Je croyais qu’ils étaient éteints depuis des lustres ? Comment souhaites-tu qu’on dispose de ce sorcier ? Demanda un des hommes à la table, son paquet de cartes en mains.

— De la manière que vous voulez tant et aussi longtemps que vous êtes discret. Allez voir cette personne, elle saura vous guider.

    Kaleb glissa un morceau de papier dans la bourse, puis la tendit au barbu.

— Je souhaite garder mon identité secrète, alors on peut passer par-dessus les introductions. Lorsque votre travail sera exécuté, je viendrais vous rencontrer ici.

    Les cinq mercenaires hochèrent leurs têtes, puis Kaleb tourna les talons pour se dirigea vers le bar pour prendre une petite boisson avant de partir. Il demanda un verre d’hydromel épicé avant de sortir de la taverne. Son mentor ne devait pas s’être aperçut de son absence, mais peut-être que Nyra aura remarqué. Si c’était le cas, il inventerait une excuse pathétique pour que la fée le croit. Il poussa un soupir de découragement avant de s’engager dans une ruelle en diagonale.

    Après presque trois-quarts d’heure de marche, il fut finalement devant la maison de son mentor. Il pénétra rapidement à l’intérieur, puis alla dans sa chambre. Puisque le salon et la cuisine étaient des pièces séparées de l’entrée, il ne fut pas en mesure de savoir si la fée se trouvait dans une de ces dernières. Il n’y avait pas d’autres chambres dans la maison, mais malgré le fait que son mentor avait accepté de la laisser séjourner ici pour une courte période de temps, elle passait ses journées dans le salon puisqu’elle dormait sur le canapé. Ce n’était pas le plus confortable, mais c’était déjà mieux que le sol. Le jeune triton revêtit une tunique noire confortable avant de sortir de la pièce. Nyra l’attendait devant la porte.

— Nyra ! Pardon, je ne savais pas que tu étais là. Je ne fais que passer.

— Où te trouvais-tu ? Nadir te cherchais tout à l’heure, l’informa la fée avec un air de reproche.

— Je flânais dans le parc et les rues de la cité. Je ne me sentais pas très bien alors j’ai décidé d’aller prendre l’air, lui répondit-il en se voulant convainquant.

    Elle est si naïve qu’elle ne se doutera jamais de ce que je faisais réellement.

— Vraiment ? J’espère que tu vas mieux, dit-elle avec un sourire éclatant. Ton mentor t’attend au terrain d’entrainement. Il souhaite te former à l’arc aujourd’hui.

— J’y vais de ce pas !

    Kaleb sortit de la maison, puis se dirigea vers le terrain d’un pas léger. Rapidement, toute menace sera écartée votre majesté.

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