Comment cela est-il possible ? Donc je ne ne fais plus partie de l’autre côté ? Ma famille? Ma petite maman ? Papa ? Mon mari et mes deux bambins ? Mes amis? Mes collègues? Et les gens de mon église ? Mon père spirituel? Toutes ces personnes auxquelles je tiens ? Toutes ces personnes qui font partie essentielle de ma vie et de mon quotidien? Alors tout est fini? Mes projets ? Mes chantiers ? Et mon compte bancaire ? Ma garde robe?
Ils me regardaient tous attristés , d’aucuns voulaient me relever et d’autres me chuchotaient : <<les premiers jours sont toujours comme ça; tu finiras par t’y habituer>>.
– Habituée ?
– C’est ta nouvelle vie ici, c’est ta nouvelle demeure.
– Ma nouvelle vie
Des jours étaient passées je les observaient de là où je me trouvais. Et l’on pouvait percevoir leur désespoir. Le chagrin sur les yeux de mes enfants me faisaient encore plus mal qu’un couteau qu’on retourne dans une plaie. Je voulais tellement les prendre dans mes bras et les consoler mais rien à faire. Leur sort était scellé. Ils étaient condamnés à continuer la marche sans moi. Mes parents quant à eux étaient effondrés. J’étais leur aînée. A leur vieillesse , ils savaient que j’étais le soutien des autres. J’étais devenue la mère de mes petits à leur retraite. Et je le faisais si bien que parfois maman disait que j’étais sa réincarnation. Qui les fera rire à gorge déployée? Qui les amènera au culte tous les dimanches ? Et qui leurs fera des farces dépourvues de sens ? J’étais troublée mais plus les jours passaient plus je me résignais à accepter ma condition. Je savais d’office que retourner avec eux était une mission impossible. J’avais ainsi décidé de ne plus me débattre mais j’ai été complètement brisée ce vendredi.
Ils avaient creusé une grande fosse. Ces villageois étaient tellement enthousiastes que cela m’a même fait rire à un moment donné. Des heures après , Je voyais mon corps inerte sans vie dans ce coffre fermé qui me donnait l’impression d’étouffer. Mais que pouvais-je faire ?
Leurs larmes étaient épuisées c’était à peine que mon mari pourrait crier. Tout le monde était comme paralysé. Plus personne n’osait parler. Je me suis dite que chacun essayait de calmer sa douleur pour ne pas faire encore plus de mal aux autres. Ils étaient soudés et s’entraidaient pour amortir le choc.
Les habitants du village ont envahi la petite maisonnette qu’avait fait mon grand père paternel. C’est à peine s’ils avait de l’espace pour s’assoir. On aurait dit que j’étais une star de cinéma qu’on venait célébrer. C’était plutôt la fin de mon passage sur terre. Le dernier moment visible avec les miens. La dernière fois que mon mari posera des douces mains sur ma peau froide.
Il devait être 10h quand mon père introduisait le pasteur et ses fidèles pour le culte. Tous avaient perdu leurs langues. On aurait dit un cimetière.
C’est en ces mots qu’il prit la parole :
<< Et si l’on savait quand on partira. Et si l’homme connaissait le jour de sa fin>>
(………)
Original, mais triste.
On en viendrait à souhaiter le néant.
C’est le but visé Christophe. Présenter ce qu’on a l’habitude de réfuter. Ce qu’on fait toujours l’effort de mettre de côte. Comme si ça n’arriverait jamais.