le portail des Bermudes chapitre 2 Le premier jour

7 mins

    Cela faisait maintenant un long moment que Lide était réveillée. Elle ne ressentait plus aucune douleur, toutes ses blessures semblaient avoir disparu. Deux hypothèses lui traversèrent l’esprit. La première : le crash remontait à présent à plusieurs jours. La seconde : elle était morte.

    En observant autour d’elle, Lide constata qu’elle se trouvait dans une petite pièce aux murs de pierre grise qui contenait seulement un lit. À peine levée, comme une lionne en cage, elle chercha une sortie. Médusée, elle se rendit vite compte qu’il n’y avait aucune issue. Comment était-elle arrivée là ?

    Son regard parcourut les cloisons, il y avait bien une minuscule fenêtre à barreaux qui laissait entrer de la lumière. Cependant, l’ouverture n’était pas assez grande pour qu’elle soit entrée par là.

    Elle tâta tous les murs pierre par pierre, examina toutes les rainures en espérant y trouver une brèche. Malgré une recherche minutieuse, elle ne trouva pas la moindre issue. Elle déplaça le lit pour pouvoir atteindre l’unique ouverture, mais elle était trop petite pour pouvoir y apercevoir grand-chose. Au loin, elle ne distinguait qu’un paysage montagneux et une ville en contrebas.

    De colère, elle frappa contre les murs, ce qui lui donna l’occasion de comprendre qu’elle pouvait encore ressentir de la douleur et être confrontée à ses blessures. Seules ses phalanges se mirent à saigner, ses autres blessures avaient donc bien disparu. La jeune femme en conclut qu’elle était vivante, mais prisonnière. Elle cria à s’en casser la voix, mais personne ne lui répondit.

    Elle cherchait des réponses aux milliards de questions qui traversaient son esprit telles des étoiles filantes, une interrogation en remplaçant une autre à la vitesse de la lumière. Elle s’inquiétait également pour ses camarades de classe. Qu’étaient-ils devenus ?

    Après un long moment, elle comprit enfin ce qui lui arrivait quand elle aperçut des hommes passer non loin de sa fenêtre, assis sur des tapis volants. Elle était maintenant certaine que, durant l’accident, sa tête avait heurté quelque chose. Elle devait être enfermée dans son propre esprit et avoir des hallucinations. Elle était devenue folle.

    Elle déplaça le lit pour atteindre la fenêtre, glissant son visage entre les barreaux. Elle distingua de nouveau les tapis volants. Sur l’un d’entre eux, d’après ce qu’elle avait pu voir avant qu’ils ne disparaissent au loin, il y avait quatre personnes : une femme, un homme et deux enfants. Lide découvrit également un individu sur une étrange moto volante sans roues, et un autre sur un hippogriffe cette créature mi-cheval, migriffon. Décidément, son esprit était très imaginatif !

    Elle enfonça sa tête le plus profondément possible entre les barreaux. Ce monde fantastique crée par son esprit lui semblait magnifique. Le village en contrebas était sublime. De longues et belles rues avec des habitations de toutes sortes. Des maisons en pierre, et certaines en bois, étaient perchées dans des arbres. Elle était trop loin pour en distinguer tous les détails, mais cela lui semblait être un endroit très agréable.

    Au loin, elle crut apercevoir un dragon. Le temps qu’elle fixe son regard dans sa direction, la créature s’était éloignée, et elle ne voyait maintenant plus qu’un point noir disparaissant dans le ciel ensoleillé.

    Lide entendit soudain du bruit dans la pièce. Elle sursauta et retira sa tête des barreaux, s’éraflant la joue dans la précipitation.

    Elle se précipita dans un coin de la cellule en se recroquevillant pour se protéger. Une femme se tenait devant elle.

« Décidément, il faut souvent vous soigner. »

    Lide fixa du regard la main de la nouvelle venue. Celle-ci s’en aperçut.

« Ceci est un passe-muraille, dit-elle en faisant un mouvement du poignet pour lui montrer un objet métallique de forme circulaire. Je me présente : je m’appelle Brianna. Je suis membre du Conseil. »

    Lide se releva en tâchant de faire bonne figure.

« ”Le Conseil” ? Comment êtes-vous entrée ici ?

— Oui, il est composé d’un membre de chaque communauté, et, pour ta deuxième question, grâce au passe-muraille. »

Elle ne rêvait pas et n’était pas folle, bien qu’elle n’y comprenne rien. Elle prit quelques secondes pour tenter de faire le point.

« Suis-je prisonnière ?

— Pour le moment. »

    La jeune femme marqua un silence. Elle appréciait sa sincérité, l’elfe n’avait pas essayé de lui mentir.

    Brianna observa Lide, qui en profita pour faire de même. C’était une très belle femme. Son corps élancé, recouvert d’un fin tissu, laissait entrevoir de très jolies formes. Elle paraissait très jeune, certainement la vingtaine. Les seules choses qui interpellaient Lide étaient ses oreilles longues et pointues. L’elfe le remarqua et repoussa ses très beaux cheveux bleu ciel pour les dégager.

 « Oui, je suis une elfine. En avez-vous dans votre monde ?

— Non, enfin, seulement dans les romans. Mais pourquoi “notre monde” ?

— Je comprends… »

Brianna, songeuse, observa Lide.

« Je peux vous soigner.

— Non merci, ça devrait aller.

— Je ne te ferai aucun mal, sois sans crainte. »

     Lide se décida à approuver d’un petit signe de la tête. Brianna dirigea ses mains en direction de son visage et de ses phalanges. Lide ressentit une légère chaleur et quelques picotements. Elle regarda ses mains guéries et toucha son visage, qui n’avait plus aucune blessure.

« Merci.

— De rien, ce n’étaient que de petites plaies.

— Comment avez-vous fait ça ?

— Quelques modestes tours de magie, lui dit-elle en souriant.

— Mes camarades, que sont-ils devenus ?

— Ils vont bien, vous les retrouverez bientôt. »

     Lide se mit à hurler et se jeta derrière Brianna : trois corps étaient en train de traverser le mur de pierre de sa cellule.

« Tout va bien, jeune femme, lui dit l’elfe en posant la main sur son épaule.

— Brianna, que faites-vous là ? Les membres du Conseil n’ont pas l’autorisation de rencontrer les prisonniers. »

    La personne qui avait parlé était vêtue d’une longue robe rouge et vert. Lide se retint de nouveau de crier quand elle aperçut sa tête difforme d’orque, avec sa peau verdâtre et ses dents allongées et pointues.

« J’ai entendu un bruit sourd, elle était blessée, je l’ai seulement soignée.

— Vous auriez dû appeler un garde. Toute la procédure est mise en péril par votre faute, je vais devoir faire un rapport, dit l’orque.

— Faites ce que bon vous semble ! Mais n’oubliez pas qui je suis, Balur.

— Comment oublier qui vous êtes ? Déclencher une guerre ne vous a donc pas suffi ? N’y a-t-il pas encore assez de morts sur votre conscience ?

— Ne refaites pas l’histoire, Balur ! »

    Sentant la situation s’envenimer, les deux autres hommes, qui étaient certainement des gardes vu leurs tenues, se postèrent entre l’elfe et l’orque. Le plus grand des deux prit la parole.

« Stop, les querelles, nous avons une mission plus importante. Le temps presse, nous devons vite régler les problèmes actuels !

— Oui, tu as raison, déclara l’orque, nous réglerons cela plus tard. Un jour, chacun devra payer.

— Je vous laisse », dit Brianna à Lide en tournant les talons. Au passage, elle donna un coup d’épaule à Balur et traversa le mur. Elle la laissa seule à la merci des trois hommes, ce qui ne rassura guère la jeune fille.

« Lève-toi donc ! » lui ordonna Balur en lui donnant un coup de pied dans le ventre. Nous sommes pressés. »

    Lide se leva difficilement après le coup qu’elle venait de recevoir. Les deux hommes lui attachèrent les chevilles et les poignets avec de lourdes menottes reliées par des chaînes.

« Allez, avance ! » L’orque la poussa contre le mur. Lide mit ses mains liées en avant pour éviter un choc brutal entre sa tête et l’obstacle en pierre. Au lieu de cela, elle le traversa comme un écran de fumée. La prisonnière trébucha et sa tête percuta le sol en marbre. Des rires retentirent autour d’elle. « Décidément, toujours à se traîner par terre, les étrangers ! »

    Une main la saisit par le col et la remit sur ses pieds. « Tâche de rester debout, maintenant. » Lide tenta de trouver son équilibre et tourna son regard vers le mur. Comment avait-elle pu le traverser ? Commencerait-elle à avoir des pouvoirs magiques ?

« Lide ! » Une voix familière la tira de ses réflexions. C’était Julie qui venait de l’appeler. Elle aussi était enchaînée. Lide sauta dans les bras de son amie. Arno, Alexandre et la plupart des autres survivants étaient là. Brianna ne lui avait pas menti, ils étaient bien vivants.

« Où sommes-nous ? » lui demanda Julie. Arno, qui avait entendu la question, répondit à la place de Lide. « Dans un couloir, avec les mains et les pieds attachés. » Julie lui donna un coup de coude. Lide pouffa de rire.

« Stop, vous n’est pas ici pour parler ! » Le groupe se retourna, quand l’un des gardes présents mit un coup dans la nuque d’Arno. « On se tait. »

    Arno continua à sourire. Comment faisait-il pour continuer à garder une attitude positive dans une telle situation ?

     Ils se trouvaient dans un long couloir éclairé par des torches, entourés de geôliers au moins deux fois plus nombreux qu’eux. Sur le mur, de grandes arches cerclées d’une ligne bleue marquaient probablement l’entrée des cellules. Progressivement, comme Lide, les passagers semblèrent sortir de nulle part. Ils furent bientôt tous réunis dans le couloir. Les gardes, eux, s’amusaient ici et là à donner des coups aux détenus.

« Arrêtez de maltraiter les prisonniers ! » Chacun releva la tête en direction de cette voix grave. Un groupe d’une dizaine de personnes était maintenant posté face à eux. À sa tête se trouvait un homme, le visage marqué de cicatrices.

« Bonjour à vous. Je me présente : Arcale, adjoint de Gripte, membre du Conseil. Chacun de mes compagnons est également l’adjoint d’un membre du Conseil, dit l’homme en montrant les personnes qui l’entouraient. Au nom de notre communauté, je vous souhaite la bienvenue.

— Nous attacher est une drôle de façon de nous souhaiter la bienvenue ! »

    Tristan avait exprimé la pensée de tous ses compagnons. Les gardes s’approchèrent de lui. Arcale leur fit signe de s’éloigner. Gêné, il reprit :

« Désolé, nous devions procéder à quelques vérifications. Mais tout cela sera bientôt de l’histoire ancienne.

— Où sommes-nous ? l’interrogea Marion.

— Vous êtes sur le territoire libre de Gristour.

— Sur quel continent sommes-nous ?

— Nous sommes sur le continent de Ramterra. » Tous les survivants se regardèrent sans comprendre.

« Et Ramterra est censé se trouver où ? Au milieu de l’Atlantique ? demanda Tristan d’un ton sarcastique.

— Nous ne nous trouvons pas dans votre monde. Nous vous expliquerons tout en temps voulu. Je ne peux pas me permettre de vous en révéler trop pour le moment. »

Arcale fit signe aux gardes autour de lui, qui attrapèrent les chaînes des prisonniers. Les membres adjoints se retournèrent et commencèrent à marcher dans le couloir.

« Veuillez nous suivre, le Conseil vous attend. »

////

        Dans une forêt, non loin de l’endroit où les prisonniers étaient retenus, le quatuor composé d’une femme, d’un elfe, d’un nain et d’un centaure arriva dans un petit cabanon. Une femme encapuchonnée les attendait.

La femme du petit groupe s’adressa à elle :

« Madame, la première partie de la prophétie s’est réalisée.

— Très bien, Brianna est-elle prête pour la seconde partie ?

— Oui, elle a déjà établi un premier contact avec les prisonniers.

— Parfait, passons à la suite du plan. »

 Le nain hocha la tête en signe de désapprobation et prit la parole :

 « Excusez-moi, Madialie, ne prenons-nous pas de trop grands risques ?

— Dwalin, je connais votre avis et celui des autres nains, j’y accorde une grande importance, mais nous n’aurons pas beaucoup d’occasions de réduire le royaume souterrain à néant. Je vous demande de me faire confiance.

— Je connais vos arguments. Mais si le contraire devait se passer… »

Madialie fixa le nain avec un regard profond. « Alors nous aurons échoué, mais nous aurons tout tenté pour mettre fin au massacre. »

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