Episode 2:

8 mins

Le trajet avait été long et ce fut un soulagement d’entendre la petite voix du train nous dire que nous étions arrivés à destination. Une fois sorti, je respirais enfin. Mais dans la gare et à l’extérieur, je découvris très vite la présence d’un grand nombre de vies. Originaire d’une petite commune des Landes, il s’avérait que c’était la première fois que le monde me paraissait aussi grand. Je devrais m’y habituer. Après tout je m’apprêtais à y passer un long moment.
Je marchais alors jusqu’à mon nouveau domicile. Les rues me paraissaient énormes, et le nombre de voiture et de logements sur cinquante mètres trop nombreux. J’arrivais enfin à l’appartement indiqué. Une fois monté, je fis connaissance avec mon 15m2, un petit tour qui ne dura, en l’occurrence, pas très longtemps. Je passais d’une maison de deux étages à un studio qui devait être à peine plus grand que ma chambre. Rien de gênant, mais je ne m’habituais pas encore à la transition. Mis à part cela, je possédais déjà les couverts et quelques aliments avaient été placés dans le tiroir. N’ayant pas la foi de passer faire mes commissions, je restais ici ce soir, chose que je faisais rarement, en général. Mais là, maintenant, je ne me sentais pas chez moi. Quelque chose me bloquait, je n’étais pas à mon aise. Ce soir la je terminais mon assiette de pâtes et visionna un petit film. Ce fut la fin de ma journée.

Deux jours plus tard, je me retrouvais assis dans une salle à écouter un professeur nous souhaiter la bienvenue puis nous expliquer brièvement la pédagogie de l’école et le programme des cinq prochaines années. Je comprenais pourquoi Sciences Po était aussi réputée. J’allais devoir me mettre sérieusement au travail en évitant un abus de soirée qui pourrait mettre mes études en difficulté.
Les premiers cours furent passionnants. Économie, histoire, politique, un panel de sujets qui remplissaient la journée. Je n’avais pas observé ma montre une seule fois. Même si je n’avais pas longuement réfléchi en ce qui concernait ma poursuite d’étude, je ne regrettais absolument pas mon choix. J’attendais aussi impatiemment l’année à l’étranger.
Finalement, ma nouvelle vie commençait bien. Je rencontrais d’autres étudiants très rapidement. L’ambiance était agréable, d’autant plus que les associations faisaient en sorte de regrouper les élèves par le biais de soirées ou rencontres sportives. La natation faisait partie de la liste, je n’hésitais alors pas à m’inscrire.
La charge de travail était importante, cela ne faisait aucun doute. D’autant plus qu’inviter des gens chez soi n’était pas propice à une meilleure efficacité. Cependant il le fallait puisque de nombreux travaux de groupe nous étaient imposés. Je travaillais avec Pierre et Noémie, avec qui j’avais sympathisé dès le premier jour de cours. La longue distance de leur chez soi nous donnaient un point commun. Étant donné qu’ils vivaient à proximité, nous n’avions aucun mal à nous retrouver. Et comme les conflits au niveau du travail étaient rares, la situation semblait parfaite. Nous nous autorisions quelques bières pendant le temps de travail, un moyen plus décontracté de réviser. Ma crainte d’un nouvel environnement s’était bel et bien atténué. Je n’avais plus qu’à faire en sorte de le maintenir ainsi.

Un soir alors que nous étions tranquillement en train de regarder un petit épisode de série, un bruit de notification se fit entendre. Il s’agissait d’un message du groupe Facebook de la classe, un des étudiants proposait une fête dans sa demeure. Comme ses parents étaient tous deux en voyages d’affaires, il saisissait l’occasion. Rien à emmener, c’est ce qui était écrit, il y avait tout et ça ne m’étonnait guère. Avec ses vêtements de marques, ce type était aisément repérable où qu’il se trouve, surtout dans un amphithéâtre avec une cinquantaine d’étudiants. J’ai également pu l’apercevoir quand il prenait son véhicule et je n’avais plus de doute concernant le salaire de sa famille. Mais notre avantage était que l’on allait pouvoir profiter d’une énorme fête, il fallait y penser.

La distance fut un peu longue mais la récompense en valait la peine. Le lieu de soirée était un manoir et une fois à l’intérieur, nous vîmes que notre camarade n’avait pas chômée. La musique résonnait comme dans un night club et à l’étage, un DJ s’en chargeait. A sa manière de gérer sa table de mixage, je compris immédiatement qu’il ne s’agissait pas d’un débutant. Un professionnel, à n’en pas douter. C’est ce que nous confirma par la suite François, l’hôte en question. Il nous désigna l’alcool disposé sur la table. Le nombre de bouteilles pouvait amplement mettre au tapis tout un régiment. Heureusement, le nombre de personnes devait atteindre la quarantaine, ce qui lui serait rentable.
– Salut ! Nous dit une de nos camarades avec qui nous nous entendions bien. Je saluais d’autres personnes que je connaissais de vue mais faire le tour me paraissait trop long. Dans le grand jardin en descendant, des personnes avaient sortis un ballon et les fumeurs discutaient entre eux. Je n’avais pas non plus fait attention à la piscine juste à côté, et ce n’en était pas une avec des dimensions similaire à celle de Seb. D’ailleurs, je me demandais ce qu’il penserait de cet endroit. A l’évidence, il aurait adoré… Le fait de penser à lui me noua l’estomac mais je remontais retrouver l’ambiance à l’étage pour me changer les idées.
L’alcool sur la table connut une descente phénoménale et je faisais partie des consommateurs. Notre hôte nous a prévenu qu’il était envisageable de dormir ici, donc boire en certaine quantité et se reposer sur place semblait une bonne idée. Cependant j’appréciais le confort de mon lit et je savais que mes deux autres compagnons aussi. Je modérais alors ma dose, sachant pertinemment que Pierre et Noémie seraient moins raisonnable. Il en fallait bien un pour veiller au grain.
Je quittais alors le bruit sourd de la techno pour prendre l’air sur le balcon. La vue était surprenante, même de nuit quand tout était obscur. Nous pouvions apercevoir le Rhône et le centre ville avec ses lumière lointaines. Je m’accoudais au muret pour souffler un peu. Cela faisait un bien fou après être resté cloîtré des heures à l’intérieur.
« Tu en veux une ? Me proposa alors une voix que je ne connaissais pas.
Je me retourna et vit une jolie brune qui me regardait en souriant. Quel hasard !
– Non merci répondis-je. Je ne fume pas.
– T’as bien raison dit-elle. Dis-moi, qu’est ce qui te manques dans ta vie ?»
Pour ainsi dire, je ne m’attendais pas à une telle question. Avec plusieurs verres d’alcool, je pourrais me la poser sans en comprendre parfaitement le sens. Mais l’inconnue à côté de moi me semblait tout à fait sérieuse. Mais que répondre ? Je me sentais déjà bien. J’avais mon indépendance, des bons études, de bons amis. Comme tous célibataire, je dirais une petite amie. Et encore je ne ressentais pas un besoin urgent d’en avoir une.
« Rien répondis-je. Je suis bien à l’heure qu’il est. Et toi ?
– Je dirais un peu d’aventure, de l’action. Quelque chose qui change de ce que l’on vit tous les jours !»
Je voyais où elle voulait en venir. Même moi qui ne m’était jamais ennuyé un seul instant dans ma vie, je sentais que tout ce que j’avais réalisé s’était produit dans un cadre réconfortant, dans mon univers. Le fait de venir vivre ici, c’était ma première grande aventure. Et pour l’instant j’appréciais.
« Et si tes jours étaient comptés ? Me demanda-t’elle. S’il ne te restait plus que quelques jours à vivre à cause d’une apocalypse par exemple, tu ferais bien quelque chose ?
Décidément cette fille voulait une réponse plus développée de ma part. Je pouvais lui donner satisfaction.
– Je passerais le plus de temps possible avec ma famille et mes amis. Je leur ferais comprendre que je tiens à eux jusqu’à mon dernier souffle.
– Pour être honnête je ferais la même chose que toi dit-elle en souriant. Elle semblait plus satisfaite de ma réponse. «Mais ce n’est qu’en théorie. Je ne sais pas comment nous agirions avec la peur, la panique. Pourrais-on rester lucide en vivant des instants pareils ?
– Je n’en sais rien répondis-je le plus honnêtement possible. Un blanc s’installa alors entre nous.

– Excuse-moi j’arrête de t’embêter avec mes questions dit-elle en rigolant. Nous sommes là pour s’amuser par pour philosopher. Va rejoindre tes potes, je te souhaite une bonne soirée ! »
Je la saluais puis retourna à l’intérieur. En fixant ma montre, je vis qu’il était déjà trois heures du matin. Personnellement, je n’allais pas tarder à plier bagages. Encore fallait-il que je retrouve les deux inséparables. Je repris un autre verre d’alcool puis dansa quelques instants sur du David Guetta. Une fois terminé, je passais dans le grand couloir pour les retrouver, et je les vis un peu à l’écart derrière une porte entrouverte, s’enlacer en s’embrassant. Je détournais le regard et revint sur mes pas. S’ils s’apprêtaient à faire ce que j’imaginais, j’en avais encore pour un moment. Peut-être pourrais-je faire le tour complet de la demeure et y trouver cachées quelques Ferraris, ou bien un Yacht.
Mais je les vis arriver plus vite que je ne l’aurais espéré. Ils étaient prêt à partir. Par politesse, je saluais notre hôte puis nous prîmes le chemin du retour. Nous trouvions beaucoup d’autres personnes dans notre état et les plus sociables vinrent vers nous pour nous parler de tout et de rien. Devant moi, le couple marchait à peine droit. Je m’étonnais qu’ils n’aient pas encore régurgités. Pour ne pas avoir de mauvaise surprise, je m’attendais au pire. Je fus effrayé un instant quand une voiture arriva droit sur Pierre, qui avait quitté le trottoir. Je le remontais de justesse en criant sur le véhicule, qui ne m’entendait sûrement pas. Une fois arrivé devant l’appartement de Noémie, qui était le plus proche sur ma route, je conseillais à cette dernière de laisser Pierre y dormir. Malgré son état, elle parvint à me comprendre puisqu’elle hocha la tête et attrapa Pierre par la taille. Elle me souhaita une bonne nuit et je fis de même.
Bien que je jouais au grand frère, j’avais moi aussi la tête qui tournait. En partant dans la direction de mon domicile, je me dis alors que je pouvais rester encore un peu dans la ville, être un peu seul, respirer. Des gens passaient encore certes, mais je trouverai bien des coins tranquilles. Je partais alors dans une direction inconnue, après tout je pouvais prendre mon temps, rien ne pressait. Je poursuivais un chemin d’une petite heure qui m’emmena jusqu’à un parc dont je ne connaissais pas le nom. Deux inconnus discutaient sur un banc, se passant une bouteille qui ne devait pas contenir du jus d’orange.
Le silence qui m’entourait me faisait du bien. Je m’asseyais dans l’herbe et contempla le ciel étoilé. C’était grand et beau. Cependant je commençais à avoir un peu froid et je me disais qu’il était temps de rebrousser chemin. Mon lit bien chaud m’attendait, et je souhaitais y plonger. En me relevant, j’entendis des pas derrière moi. Je n’eus pas le temps de savoir qui s’approchait car, à peine retourné, je ressentis un violent coup sur la tête, puis plus rien.

Je me réveillais avec un terrible mal de crâne. Je tentais de me lever mais me rendit compte que mon corps était allongé et cloué. Mes mains et pieds étaient immobilisés, et j’eus beau réessayer, mes tentatives ne valaient rien. La panique s’empara alors de moi. Je voulus crier pour appeler à l’aide mais je ne pouvais m’exprimer. Je ne voyais que du noir. Etais-je dans une pièce sombre ? Non je sentais quelque chose me cacher la vue. J’étais donc immobile, aveugle et muet. Mais que m’arrivait-il et où pouvais-je bien m’être retrouvé ?
Je me calmais un instant puis réfléchi. La dernière fois que j’étais conscient, je me situais dans un parc. Et puis je sentais quelque chose de puissant mais rapide, me cogner. Cela devait être un kidnapping, je ne vois pas dans quelle autre circonstance quelqu’un voudrait me faire une chose pareille. Pas parmi les personnes que je connaissais c’était certain. J’avais eu la malchance de tomber sur des personnes mal intentionnées.
– Nous ne vous ferons aucun mal dit alors une voix inconnue. Elle était emprunte de sympathie comme si la personne n’avait jamais eu envie de m’enlever. J’espérais qu’elle me détacherait mais elle ne fit rien. Au lieu de cela je sentis une douleur rapide au niveau de mon avant bras, une seringue à n’en pas douter. Ces types souhaitaient m’injecter de la drogue, j’en étais certain. Ils ramasseraient mon téléphone et mon argent, et quand je serai dans un état second je ne me poserai même pas la question. Bon sang, je voulais crier, j’étais mort de peur. Tous ce que je désirais maintenant, c’était de rentrer chez moi, m’endormir et oublier ce cauchemar.
– C’est fait demanda une voix plus lointaine.
– Tout à fait répondit l’autre. On peut bientôt le libérer.
Entendre cette réponse me fit sentir déjà un peu mieux, même si je ne savais guère comment je sortirai d’ici. Je restais tranquille. Je ne voulais pas prendre le risque d’attirer l’attention si cela risquait de me faire rester là. Je serai docile et je n’aurais pas d’ennui. Si vraiment ils voulaient mes affaires, pas de problème, je pourrais toujours en racheter.
– Tu va connaître une nouvelle vie mon ami me dit le deuxième type.
De quoi parlait-il ? Je ne pouvais pas lui poser la question mais cela ne semblait pas être quelque chose pour me tuer, au moins j’en étais certain. J’allais partir en trip dans quelques instants et cela ne me disait rien qui vaille. Mais la peur altérait ma réflexion. S’ils voulaient prendre mes affaires pourquoi ne les avaient-ils pas pris pendant mon inconscience ? Et pourquoi perdraient-ils leur temps à me droguer ça n’avait pas de sens ! Avant que je ne me pose d’autres questions, je reçus un deuxième coup sur la tête.

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