Chapitre 2
RDC
Arrivés devant l’usine, ça ne fut pas très difficile de trouver une entrée. La plupart des fenêtres étaient partiellement brisées. Mais ce n’est pas par là qu’on est passé. Pas question de s’écorcher sur un morceau de verre et d’écourter la mission pour aller aux urgences. On est donc entrés par les toits. Ils étaient en escalier, et donc les plus bas étaient facilement accessibles. Ils étaient troués d’un peu partout, c’était de la vieille tôle friable d’une centaine d’année. Le genre de truc bourré d’amiante. En y repensant, c’était encore plus dangereux que les fenêtres. J’ai oublié de le préciser, mais vous l’aurez surement compris : on était particulièrement cons.
Courte échelle, Yann me fait monter. Axel et mon frère suivent. Je tends la main à Yann pour le hisser, après qu’il ait sauté et prit appui sur le mur vertical. Sur les toits fallait faire gaffe où l’on mettait les pieds. Jauger la solidité du plancher avant d’y prendre pleinement appuis, sous peine de le traverser et de finir 4 mètres plus bas avec une jambe cassée, voire pire. Une aération à taille humaine, semblable à une immense fenêtre, nous donna l’ouverture tant attendu pour enfin pénétrer les lieux. Elle donnait sur une espèce d’échafaudage, ou je ne sais quoi qui y ressemblait. Une fois sur celui-ci, il nous suffit d’en descendre pour arriver en plein milieux de ce vaste entrepôt, où l’obscurité était si dense, que l’on avait l’impression qu’un mur se trouvait à 10 centimètres de nous, là où les lampes torches n’éclairaient pas. D’ailleurs, elles n’éclairaient que de façon précise. Impossible d’avoir une vue d’ensemble. Mais, à l’écho que produisaient nos pas, et vu la gueule du bâtiment de l’extérieur, on sentait que cet endroit était gigantesque. Une des premières choses qui nous frappa sur l’instant, c’était cette persistante odeur de pisse. Acre et écœurante. Peut-être que le fait de ne presque rien y voir développait notre odorat. Qui sait…
Jerem sort un feu de bengale. Dans un craquement assourdissant dans ce silence de mort, une lumière vive apparait. S’en suit un crépitement continu, signe que le feu brulait. On y voit enfin plus clair. Des tags. Un peu partout sur les murs. Puis, un sol jonché de merdes. Des canettes, des matelas, du tissu (surement des fringues complètement niqués), des cadavres de bouteilles de pinard, de whisky, de rhum et de vodka… Bref, de la tise en tous genres. Des mégots et des paquets de clopes vides tout écrasés. Y’a même quelques seringues et des capotes. Je préfère même pas imaginer les soirées qui s’étaient déroulées ici. J’aurais bien trop les glandes de ne pas y avoir participé. Quoiqu’il en soit, ce lieu était tout bonnement dégueulasse. On n’en voyait pas sur l’instant mais, c’était sûr que l’endroit grouillait de rats et de cafards.
On avance. Lentement. Guettant attentivement notre environnement. On regarde à droite, à gauche, devant, derrière. C’était anarchique, mais on restait proche les uns des autres. Tel un bloc. Arrive, face à nous, un escalier droit. Il menait, logiquement, à un étage inférieur. On se regarde. Se demandant si on veut s’enfoncer davantage dans cet étrange complexe, aux allures vraiment très glauque. On ne s’écrase pas. On fait les forts. On acquiesce et on continu.