Déjà ils sortaient peu avant le confinement, une question de moyens quand on compte l’argent.
Elle faisait des ménages, et lui dans la peinture, tout ça non déclaré, les temps devenaient durs.
Avec les prestations ils pouvaient se permettre, quelques rares sorties surtout chez les amis, un peu de cigarettes, des fois un peu d’alcool, une barrette par ci, quelques feuilles par là, les jours de privations ne pouvaient pas durer.
Elle avait des diplômes mais aucunes expériences, difficile de trouver quand on sort de l’école, des boulots en attente elle était sur les listes, mais elle était confiante, elle allait rebondir.
Il n’était qu’ouvrier, mais était apprécié, le rôle de chef d’équipe lui reviendrait un jour, l’entreprise a fermé plus rien ne s’arrangeait, mais il était confiant, tout allait repartir.
Quand ils se sont connus, tout allait pour le mieux, un tout petit studio suffisait largement, chacun de leurs cotés, la famille a aidé, ils avaient démarré une vie amoureuse, les pieds dans l’avenir, ils avaient des projets, tout était provisoire, il restait des années.
On était fin décembre si je me souviens bien, on parlait vaguement d’une grippe chinoise, pas encore d’un virus, la chine c’est très loin.
Janvier est arrivé, des factures à payer, et il y en aurait d’autres, les prestations sociales en un demi loyer, ils pouvaient encore faire quelques petits extras, on leur avait promis, on nous a tous promis, comme on traverse la rue pour trouver un boulot, il suffirait d’attendre c’est très peu contagieux, les frontières sont ouvertes, si ce n’est pas une preuve.
Février commençait, plus de restaus du cœur, l’argent se tarissait, les boulots s’envolaient, tout devenait frileux.
On en était fin Mars, et dans vingt mètres carrés on se marche sur les pieds, elle a ouvert la bouche, il a levé la main, mais on est confiné, il faut se supporter, supporter jusqu’à quand, supporter jusque ou ?
J’ai quatre pièces à vivre et un chat un peu con, si jamais il me miaule, vais je lever la main ou lancer quelque chose ?
L’histoire est un peu con, mais j’assume elle est vraie, je n’ai plus de nouvelles, je n’ose plus appeler, posez-vous la question chacun devant l’écran, vous avez des moyens un peu plus conséquents, mais les laissés pour compte, ceux qui sont un peu justes, comment font-ils pour vivre à rester enfermé dans un vingt mètres carrés, quelquefois beaucoup moins.
On nous avait promis, ce serait provisoire, et la révolution, après le confinement ou alors on absous ?