Du néant au frisson. Chapitre 33.

3 mins

Eliya 

Antoine m’a raccompagné jusqu’à l’entrée de mon immeuble. 

— Tu montes ? 

— Je ne pense pas que ça soit une bonne idée… 

— Pourquoi ? 

— Si Axel arrive, ça va encore faire des histoires. 

— Il n’arrivera pas. Et puis j’ai à te parler. 

Il ne protesta pas plus longtemps. 

Quand on est entré, je suis allé directement dans la cuisine. J’ai ouvert le frigo et rien. Je n’avais pas encore fait mes courses de la semaine, j’avais tellement faim. 

— On se commande une pizza ? 

Antoine me regarda, longuement avant de me répondre. 

— OK. 

Son comportement était bizarre, mais c’était Antoine. Il était déjà comme ça au tout début. J’avais l’impression qu’il me regardait comme si j’étais une proie, trop facile à avoir. Enfin, je me faisais sûrement des idées. Puis il avait sûrement compris, le jour où j’ai refusé son baiser. Même si maintenant… 

— Tu veux quoi ? me dit-il. 

Je sortis automatiquement de mes pensées. Il appela la pizzéria. J’en ai profité pour aller me changer dans la salle de bain. Quand je suis revenu dans le salon, il était assis sur le canapé, les yeux dans le vide. 

— Ça va ? 

Il leva la tête.

— Oui, les pizzas seront là dans quarante-cinq minutes. 

— J’ai l’impression que quelque chose ne va pas, je me trompe ? 

Il mit du temps à me répondre. Il se leva et alla sur la terrasse. Il alluma une cigarette. Je le suivis et fis la même chose. 

Je mis une main sur son épaule. 

— Antoine, parle-moi. 

— J’ai peur, Eliya. 

— Peur de quoi ? 

— Qu’il n’aille pas en prison. 

— C’est impossible, Antoine. 

— Ils l’ont bien fait sortir, en attendant. 

— Oui, mais pour qu’il règle ses problèmes. Qu’il s’occupe de sa famille. 

— En attendant, qui s’occupe de nous ? Qui se soucie de savoir, si ça nous fait du mal ou non ? 

Eliya, ce n’est pas lui la victime. C’est nous. Et c’est à lui que l’on fait des faveurs. 

Je comprenais ce qu’Antoine ressentait. Maintenant qu’il mettait des mots dessus, j’avoue que je pensais la même chose. 

— Malheureusement, on ne peut rien y faire. 

— On pourrait faire quelque chose. 

Il planta ses yeux bleus dans les miens. 

— Que veux-tu dire par là ? 

Il me fit rentrer à l’intérieur, ferma la baie vitrée, de peur que sûrement quelqu’un nous entende. 

— On pourrait régler ça nous même. 

J’étais abasourdi par ce qu’il venait de dire. J’espérais me tromper sur ce qu’il insinuait. 

— Je… qu’est-ce que tu veux dire par là ? 

— Tu ne comprends donc pas ? 

— J’ai bien peur que si, mais j’espère me tromper.

Il s’éloigna de moi. Ses yeux me scrutaient. J’avais l’impression qu’il cherchait de l’approbation dans mon regard. Il se rassit, et comme si de rien n’était il changea de sujet. 

— Tu voulais me parler de quoi Eliya ? 

Stupéfaite de ce changement radical, je me mis à genou face à lui. 

— Tu ne peux pas changer de sujet, comme ça. Antoine… Tu…

— Je quoi Eliya ? 

— Tu ne peux pas !

— Rien ne me retient. 

— Pense à nous, à Maria, Johane, Julien… Moi. 

— Tu vas me dire que ça ne te ferait pas du bien de le voir mort ? 

— Je n’ai pas dit ça… Seulement, j’aimerais qu’il soit jugé. Et qu’on s’en sorte, tous !

Il ne dit rien, ses yeux parlaient pour lui. Je le voyais, il était perdu, désespéré, à bout. Et nous l’étions tous. Mais Antoine ne supportait plus cette situation. 

— Et puis, si tu le tues maintenant, qu’est-ce que je vais devenir ? 

— Tu te débrouilles très bien toute seule. Tu es plus forte que les autres. Et tu ne seras pas seule. 

— Mais tu ne seras plus là. 

— Qu’est-ce que ça changerait de toute manière ? 

— Tout. 

— Ne raconte pas n’importe quoi. 

Et c’est à cet instant, à ce moment-là précis, entre le désespoir qui m’emplissait, la tristesse que je lisais sur son visage, que je perdis le contrôle. C’était inévitable. Je l’ai su, au moment où je lui ai dit de monter avec moi. Je ne pensais pas que ça se passerait ainsi. Mais rien ne se passe comme je l’imagine. Je me voyais lui dire que j’avais besoin de lui. Que son soutien comptait pour moi ! Et que j’avais peur, que tout nous sépare une fois le procès fini. 

Égoïste n’est-ce pas ? Lui laisser entrevoir que peut être, il pourrait se passer quelque chose. Mais même moi je n’en savais rien. Car rien n’était officiel.

Alors j’ai collé mes lèvres à celle d’Antoine. Je l’ai fait pour lui donner une raison. Une raison d’abandonner son idée. Une raison, d’allée jusqu’au procès. Une raison pour ne pas le perdre, dans ce néant que sont nos vies. 

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4 Commentaires
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bbbbbbb ccccccccccccc
bbbbbbb ccccccccccccc
2 années il y a

Aïe aïe, que dire de plus?
Je m’y attendais un peu.
Par ailleurs, faire justice soi-même…

B. Serena
2 années il y a

les problèmes punaise…

bbbbbbb ccccccccccccc
bbbbbbb ccccccccccccc
2 années il y a

A qui le dites vous!

DeJavel O.
2 années il y a

Le néant comme base dans la vie est une garantie de problèmes. « Aider » comble ce vide temporairement. On pourrait aussi penser que la détresse aux yeux d’Eliya est érogène. Un sentiment de valoir quelque chose, une valeur suffisante pour pouvoir s’offrir à l’autre. Je spécule, mais voilà ! C’est l’effet que nous font les meilleurs récits !

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