Conte 5: Belinda Laddhyn et la Torche Magique – 9ème partie

6 mins

Quelques heures plus tard, elle s’éveilla. Elle était toujours dans ses bras. Lui, il dormait. Elle le regarda et sourit. Délicatement, elle s’enleva à ses bras et descendit du lit.

Ne portant rien d’autre que ce pendentif qu’il lui avait offert, elle se dirigea vers la cuisine pour s’y servir un verre d’eau au robinet. Elle allait le rejoindre lorsqu’elle s’arrêta devant la fenêtre. Ses yeux se figèrent dans les lumières de la nuit. Elle devait lui dire. Elle ne pouvait pas continuer comme ça, à lui cacher qu’un jour elle serait obligée de le quitter. Qu’un jour, elle serait mariée à un homme qu’elle ne connaissait pas qui était là, quelque part. Elle ne pouvait pas le lui cacher, ce ne serait pas honnête. Ça ne l’était pas. Elle savait qu’il tenait à elle et qu’ils s’attacheraient tous les deux à elle plus le temps passerait. Et quoi qu’elle se dise elle aussi, elle tenait à eux. Il y avait peu de temps qu’ils étaient ensemble. Mais déjà les sentiments étaient là et chaque jour ils grandissaient et se renforçaient. Qu’elle veuille se l’avouer ou non. Et ce ne serait pas honnête. Mais comment lui dire tout ça. Ça lui foutait une trouille incroyable. Comment tout lui avouer, tout ce qu’elle avait fait, tout ce qu’elle devrait faire se demandait-elle regardant son reflet dans la vitre de cette fenêtre étreignant ce pendentif.

Doucement, derrière son propre reflet vint alors se dessiner le sien. Elle sentit alors ses bras s’enroulaient autour d’elle, sa chaleur. Elle sourit et tourna la tête vers lui. Il l’embrassa, la serra contre lui.

– « J’ai cru que tu étais partie »

– « Non, j’avais juste soif…j’aime regarder les lumières la nuit, c’est apaisant »

– « Il doit y avoir une part de ténèbres en toi »

– « Comme en toi ». Il sourit et acquiesça. Elle se tourna alors vers lui se serra dans ses bras.

– « C’est sans doute qu’on est fait l’un pour l’autre »

– « Dis pas ça…pas maintenant… » lui dit-elle, son regard le suppliant. Il posa alors délicatement ses lèvres sur les siennes pour lui donner un fin baiser.

– « Ok je te le dis pas…mais…tu le sais…c’est toi et ce sera toujours toi »

– « Tu peux pas savoir »

– « Tu sais… » soupira-t-il « je ne suis pas un chevalier blanc, ni un prince charmant ni même un intrépide et vaillant palefrenier. Je suis le monstre tapis dans le noir, le méchant dragon de l’histoire, le vilain petit canard tout noir. Je ne sais pas vraiment ce que je suis mais…il suffit que tu me regardes pour que je sache quel homme je veux être, pour toi, comme…j’ai su quel père je voulais être pour Amanda alors…si je sais, c’est toi et ce sera toujours toi. Toujours ».

Elle l’embrassa alors encore et encore. Puis elle se mit à sourire quand elle sentit cette chose pointer contre son bas ventre.

– « Monsieur est de retour on dirait » sourit-elle plus encore en se serrant contre lui.

– « Ben…avoir une fille comme toi dans les bras, à poil dans la cuisine, je sais même pas comment monsieur il a pas déjà tout fini tout seul ! ».

Elle éclata de rire avant qu’ils ne retournèrent dans la chambre…et profitèrent encore de ce moment.

Les jours s’enchainèrent tellement vite. Toute sa vie avait été chamboulée. Rien n’était plus pareil, rien ne le serait jamais plus. Ses croyances avaient été malmenées, ses peurs balayées et ses espoirs ressuscités.

Chaque fois qu’elle pensait à ce qui devrait, peut-être, lui arriver, chaque fois que ses sombres pensées l’envahissaient, chaque fois qu’elle étreignait ce pendentif alors que son cœur se serrait, il arrivait. Il la prenait dans ses bras. Il l’embrassait et tout s’effaçait comme par magie. Il n’y avait plus qu’elle, lui, eux. Leur vie. Leur famille.

Tout s’enchaina alors très vite, quelques mois après leur première nuit, elle vint s’installer chez eux, chez elle. En quelques mois, ils se battirent une vie, une vie de couple, une vie de famille. Très vite, Amanda devint bien plus que simplement la fille de Damian. Elle devint une petite fille attachante, très attachante qui s’accrochait à elle de plus en plus chaque jour, qui avait de plus en plus besoin d’elle chaque jour. Belinda ne s’était jamais imaginée en mère, elle n’avait jamais osé l’imaginer. Mais à chaque fois que la petite fille se blottissait contre elle, chaque fois qu’elle lui faisait un câlin, chaque fois, qu’elle lui prenait la main, chaque fois qu’elle faisait ses devoirs avec elle, chaque fois qu’elle était malade et qu’elle la réclamait, chaque fois que Belinda passait ses nuits avec elle, qu’elle la consolait ou qu’elle allait à la danse avec elle, elle le devenait un peu plus. Et cela la terrifiait. Mais pour rien au monde elle n’aurait changé de place. Chaque jour, ses sentiments pour Damian, pour Amanda, son amitié pour les garçons, avec Katy et même Nadya se renforçaient. Chaque jour elle devenait une femme qu’elle n’aurait jamais cru pouvoir être. Leur amitié, leur amour l’avait libérée. Son amour pour eux la rendait plus forte, plus confiante, plus combative. Elle devenait celle qu’elle était réellement. Celle qu’elle avait toujours été.

Et les jours passèrent, passèrent et passèrent. Pour chaque jour qui mourrait, elle savait, désormais, que celui qui naissait, inéluctablement, ne pourrait être que meilleur encore. Et même si une quelconque merde leur tombait dessus, ce jour-là, elle savait que rien ne pourrait changer le fait qu’elle se serrerait dans ses bras, qu’il l’embrasserait, qu’Amanda lui ferait un câlin. Ensemble, ils se démerderaient comme ils le pourraient avec ce qu’ils avaient pour faire en sorte que cette merde ne reste que de la merde. Et rien d’autre.

Bientôt cette date du 1er juillet 2017 ne lui fit plus peur. Elle n’avait plus peur de ces jours qui passaient. Elle n’avait plus peur de ce qui allait arriver. Elle ne pensa plus jamais à cette date tellement fatidique pour elle quelques mois plus tôt.

Et les jours, les semaines, les mois, les années passèrent.

Samedi 1er juillet 2017.

Inéluctablement alors que l’été était arrivé, son portable se mit à sonner. En le prenant elle présuma que c’était Damian. Peut-être même Amanda qui avait pris l’habitude de lui téléphoner ou de lui envoyer des SMS à tout bout de champ depuis qu’elle lui avait offert ce portable sans le dire à Damian. C’était un petit secret entre elles, entre filles. Elle n’en regarda pas l’écran. Et son sourire qui s’était aussitôt dessiné de plus belle, ce sourire qui lui éclairait le visage comme toujours, d’un coup, s’effaça. Son regard s’assombrit lorsqu’elle entendit cette voix lui parler en arabe.

D’un coup, toutes les peurs, toutes les angoisses qu’elle avait oubliées, qu’elle s’était cachées, lui revinrent en pleine figure. Elles se jetèrent sur elle comme des monstres voraces et affamées. Elles dévorèrent en une minuscule fraction de seconde, tous ses espoirs, tous ses rêves, tous leurs projets.

Pourtant, jamais elle n’en parla à Damian ni à personne d’autre. Elle voulait régler ça toute seule. Elle voulait que lorsqu’elle lui raconterait tout, elle puisse lui, leur dire qu’elle serait à jamais à lui, avec eux. Elle voulait qu’il soit fier d’elle. Elle voulait lui montrer, se prouver à elle-même qu’elle n’était plus cette petite fille trouillarde qui ne faisait que jouer avec son cul, qu’elle n’était plus cette foutue lâche. Elle voulait lui dire qu’il avait toujours eu raison. « Dire qu’on n’a pas le choix c’est de la lâcheté ». Et elle ne serait plus jamais cette foutue lâche. Elle affronterait ce père qui l’avait vendue. Elle se battrait pour elle, pour lui, pour sa famille.

Ce samedi-là, il y avait déjà plus de trois ans et demi qu’il était entré dans le bureau de Belinda pour la première fois. Lorsqu’il poussa la porte de son appartement après avoir été faire des courses avec Amanda, tout de suite, Damian sentit que quelque chose clochait. Les fenêtres étaient toutes fermées, malgré la chaleur. La télé ne marchait pas et l’appartement n’avait cette odeur si particulière.

Portant les sacs de courses, il entra suivi d’Amanda qui en portait quelques autres. Il fit quelques pas et son sang se glaça. Il sut aussitôt. Ses yeux ne pouvaient quitter cette enveloppe mise en évidence sur la table de salon. Il sut. Il posa les courses sur le sol et se dirigea vers cette enveloppe imité par sa fille.

Ces quelques pas furent tellement dur, tellement…il avait l’impression, d’un coup, de ne plus être qu’un zombie qui marchait sur un sol complètement instable. Il se laissa tomber dans le canapé. Il regarda Amanda qui, dans son regard, avait toute l’innocence et la peur d’un gosse qui se rendait compte que quelque chose n’allait pas.

– « Papa ?! ».

Il prit alors l’enveloppe, l’ouvrit. Le pendentif en forme de trèfle qu’il lui avait offert, tomba sur le sol. Amanda le ramassa aussitôt et le tint dans ses mains.

– « Elle est où Nineda ? Hein ?! Papa ! ».

Il ne lui répondit pas. Il la fit s’asseoir sur ses genoux, commença à lire, à haute voix, cette lettre que Belinda leur avait écrite avant de partir et qui lui faisait trembler les mains.

No account yet? Register

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Lire

Plonge dans un océan de mots, explore des mondes imaginaires et découvre des histoires captivantes qui éveilleront ton esprit. Laisse la magie des pages t’emporter vers des horizons infinis de connaissances et d’émotions.

Écrire

Libère ta créativité, exprime tes pensées les plus profondes et donne vie à tes idées. Avec WikiPen, ta plume devient une baguette magique, te permettant de créer des univers uniques et de partager ta voix avec le monde.

Intéragir

Connecte-toi avec une communauté de passionnés, échange des idées, reçois des commentaires constructifs et partage tes impressions.

0
Exprimez-vous dans les commentairesx