Un choix déjà réfléchi, partie 1.
TORI
« — Ce serait une erreur de laisser passer cette chance.
— Pour qui tu te prends, à juger mes choix. Je sais ce qui est bon pour moi !
— Ne me parle pas sur ce ton ! J’en sais tout autant que toi et je sais également que tu t’épanouiras dans cette Université, Jessica ! »
Je dévorais un paquet de chips devant une série idiote, la suivant que d’une seule oreille. J’avais toujours été victime d’insomnies récalcitrantes, et lorsque je tombais enfin dans le sommeil, seul les cauchemars me transportaient. Mes songes étaient peuplés de chose que je ne pouvais comprendre alors j’oubliais la plupart du temps. M’habituant à dormir le moins possible. Un jour, ma mère m’avait donné de quoi dormir sans rêver et encore là, je me noyais dans les ténèbres chaque nuit. Donc, à cette heure tardive, alors que la maison profitait d’un sommeil réparateur, je vaquais à mes occupations, attendant que la fatigue me rattrape enfin. Deux jours étaient passés depuis le rendez-vous avec Greg et je m’étais surprise à y penser de moins en moins, comme si, au fond de moi, ma décision avait déjà été prise. Je me doutais que Greg connaissait ma réponse. C’était prévisible et cette école me tentait beaucoup, j’étais trop curieuse pour laisser passer cette occasion. Et mon Majeura l’avait vite compris, jouant avec ce caractère.
Après un épisode très médiocre, je décidai d’éteindre mon ordinateur pour m’installer dans mon lit et espérer le sommeil en regardant le plafond. Tandis que je m’emmitouflais dans mes couvertures chaudes, je me rendis compte que j’avais oublié d’éteindre la lumière. J’étais obligée de me lever, mais soudainement, une idée me vint. Je me concentrais alors quelques secondes sur l’interrupteur, comme pour l’actionner à distance. Rien ne se produisit. Je ne pus cacher ma déception. Parfois, je pensais vraiment que Greg s’était trompé sur la personne.
— Demesse, mes fesses, ouais, marmonnais-je finalement en éteignant la lumière en utilisant mes deux jambes comme tout le monde.
Alors que j’étais plongée dans le livre de Madalena Turner – car oui, Greg l’avais acheté sur ma demande parce que jamais au grand jamais je ne retournerai dans cette librairie de malheur -, j’attendais avec impatience Camille. Elle était censée me ramener les livres de sa mère et ainsi, m’aider à y voir plus claire sur ma… Condition ? Bien que Greg me fut d’une grande aide à la pêche à l’information, il continuait de me faire des cachotteries et de me répéter inlassablement la même chose : « Tu en sauras plus à Ecclésia. » Il savait comment me faire languir en agitant la nourriture devant mes yeux sans me la donner. Une métaphore pour dire poliment qu’il se fichait de moi.
La rentrée était dans moins d’un mois et je continuais à m’imaginer tout et n’importe quoi. Mon esprit tournait à cent à l’heure et je ne savais pas si c’était bon ou mauvais.
Lorsque mon amie se montra enfin, une énorme pile de gros bouquins similaires à ceux chez Pierre lui arrivait jusqu’au menton. Nous avions de quoi faire.
Les heures qui suivirent furent alors consacrées à la lecture d’une dizaine de livres qui, après observation, ne parlait que de politique. La mère de Camille était Conseillère après tout. Conseillère en Cheffe des Elfes précisément, le Conseil étant l’instance gouvernementale du continent surnaturel. Camille avait fait des recherches lors de sa mort et avait trouvé qu’elle était en réalité une grande femme pour son peuple et elle accusait même le Conseil de l’avoir éliminé en ayant peur de sa puissance et de son programme qui accepterait des « Sang-mêlés ».
On s’éloignait doucement d’une démocratie.
— Elle faisait ça pour nous, souffla Camille en parlants des Sang-mêlés. J’en suis une.
Ses yeux bleus presque translucides se mirent à briller et je ne su quoi faire devant ses larmes naissantes.
— Cam, ne pleure pas, je… je me tortillais sur mon lit, mal à l’aise. Tu sais, elle était incroyablement courageuse de se lever face à une telle puissance, tu dois être fière d’être sa fille. Et puis, elle doit être fière de voir comment sa fille est devenue : aussi ambitieuse que sa maman.
Camille eu la gentillesse de sourire face à mes tentatives de réconfort bancales. C’était le genre de sourire triste qui déforma son beau visage, d’habitude si souriant, et lui fit couler encore plus de larmes. Je me rendis alors compte que je voyais mon amie sous un tout autre angle et ma gorge se serra sous cette peine qui lui semblait infinie. On ne se remettait jamais de la perte de nos parents et cette pensée me coupa le souffle.
— Elle me manque tellement, Tori.
Je n’attendais pas plus d’une seconde avant de la prendre dans mes bras et c’est comme si elle relâchait les vannes sous l’assaut de mon corps et un horrible sanglot déchira sa poitrine. Je cachais mon visage dans son cou pour ne pas lui montrer mes larmes qui lui répondait. Je n’aurais jamais cru que Camille me toucherait autant. Croyant naïvement que je n’avais d’attache pour personne à part mes parents. Pourtant, je me fourrais le doigt dans l’œil depuis pas mal d’années.
Personne n’avait un cœur de pierre, et personne ne pouvait le faire croire éternellement. C’était une vérité.
Après notre crise de larmes improvisée, Camille et moi continuâmes de passer au radar chaque ligne que nous lisions, mais mise à part des lois et des noms de Conseillers connus, il n’y avait rien à se mettre sous la dent et des tonnes de paperasse inutile. Je finis alors par souffler, en me massant la nuque endolorie à force de baisser la tête.
— Tu peux m’en dire plus sur les Elfes ? Demandais-je alors à Camille qui était concentrée sur un livre où l’on répertoriait les différentes formes de pouvoir politique démocratique ou monarchique pour la communauté surnaturelle.
Étrangement, les pays étaient délimités différemment et leur frontière n’était pas les mêmes que celles des Humains. Par exemple, le Conseil contrôlait tout les pays d’Amérique du Nord et du Centre, c’est-à-dire : le Canada, les États-Unis et le Mexique ainsi que les îles. Et chaque pays possédait un Rohan choisi par le Conseil qui gouvernait le pays, et qui était lui-même partager par d’autres individus. Ça avait été une sacré énigme à déchiffrer pour comprendre le fonctionnement du continent, mais nous avions réussis à remettre les Rohans en place. J’avais même réussi à les mémoriser. Le Rohan des États-Unis était un Sorcier : Amadéon Silva, il régnait depuis 1821. Devant mon incompréhension, Camille m’avait rappelé que les Surnaturels avaient une plus longue espérance de vie, pouvant vivre pendants des siècles. Sa mère elle-même avait été âgée d’un siècle. Ensuite, le Rohan du Mexique était Alba Vargas, la seule femme d’Amérique du Nord à être Rohan d’un pays, et vieille de plus de trois siècles ! Elle était une Louve-Garou issue d’une grande lignée maya qui gouvernait le pays Surnaturel depuis le Commencement. Évidemment, nous avions eu des étoiles dans les yeux face à cette nouvelle incroyable et nous avions donc vérifié sur internet quelques détail qui nous avait laissé pantoise. En effet, les Loups-garous étaient un peuple qui avait migré au Mexique, il y a des millénaires de cela, et la construction du temple de Kukulcan était en partis grâce à eux, ayant travaillé main dans la main avec les Mayas pour construire Chichén Itzá. Et enfin, le Rohan du Canada était un certain Enki Bailey. Il était jeune par rapport aux autres Rohans et ça avait apparemment l’air de jaser, comme si la jeunesse pouvait être une barrière pour gouverner. Il est vrai que la vieillesse rimait avec sagesse cependant, un air nouveau pouvait tout aussi bien faire du bien à un territoire. Néanmoins, Enki Bailey allait bientôt sur son premier siècle. Gouverneur d’un vaste et puissant pays, il semblait en prendre soin avec une main de maître, surtout qu’Ecclésia était au Canada. Encore une bonne raison de chanter ses louanges.
— Ma mère me racontait parfois l’histoire du Dieu des Elfes, finit par dire Camille, plongée dans ses souvenirs. C’est un nom compliqué, Elve… Elvequin, non. Elvedin ! Elvedin, le Dieu qui créa les Elfes. Ma mère était très croyante envers son Dieu et elle me racontait qu’Il les avait mis au monde afin qu’ils puissent prendre soin de la nature que les Hommes détruisaient. Elle m’emmenait parfois dans la forêt pour m’apprendre quelques tours. Je suis Humaine, mais j’ai du sang d’Elfe qui coule dans mes veines alors il y avait certaines choses que j’étais capable de faire, se remémora, Camille avec le sourire.
J’étais hypnotisée par sa voix, j’avais tellement soif de connaissance sur ce monde que je pourrais écouter n’importe qui, me racontant des histoires. Même le vieux fou de la librairie.
— Tu peux me montrer ?
Le sourire de Camille se ternit.
— Je n’y arrive plus. C’était lorsque j’étais enfant, et puis j’ai besoin d’être entourée de la faune et la flore pour ne faire qu’un tour inutile, souffla-t-elle.
Je fis la moue, dommage.
— Qu’est-ce que c’est ? Demanda mon amie en mon montrant le livre de Madalena Turner.
Je le pris et l’ouvris pour lui montrer l’écriture impossible à déchiffrer. En effet, le livre avait été écrit à la main et je pouvais affirmer que Madalena était probablement un génie, mais écrivait en patte de mouches. Elle me le vola des mains et lu la couverture.
— Les Sceaux protecteurs de la Grande Sorcière Madalena Turner.
— La modestie, elle ne connaît pas, me moquais-je doucement ce qui fit pouffer mon amie. Qu’est-ce que c’est : un sceau ?
— « Les Sorciers les utilisent, c’est une promesse, sous forme de tatouage qui bloque et canalise une énergie particulière. »
Mes yeux s’ouvrirent en grand, étonnée.
— Comment tu sais ça, toi ?
— Je viens de le lire, Tori, se mit-elle à rire.
— Tu y arrives ?
— Un peu, marmonna-t-elle.
Nous passâmes alors la soirée à tenter de déchiffrer un ce vieux bouquin poussiéreux.
Hâte de connaitre le contenu de ce livre, bien vu Serena!
Le monde parallèle se dévoile.
aah je suis heureuse de te voir curieux, elle a encore bcp a apprendre elle aussi
J’adore cette première partie. J’ai hâte aussi de découvrir la suite de l’histoire. Je veux savoir ce qu’il y a dans ce livre.
Je pense qu’elles vont vite déchanter lorsqu’elles vont y découvrir des incantations incompréhensibles et compliqués