C’était ce qu’il me manquait, partie 1.
TORI
— J’espère que vous aviez apprécié votre voyage à Québec, votre directrice a travaillé dur pour vous organiser cette sortie.
La classe d’histoire générale acquiesça bruyamment, oui, le voyage a été fantastique. Notre professeure d’Histoire, Enora Peters, n’avait pas pu nous accompagner, à grands regrets. C’est pourquoi ses yeux brillaient d’enthousiasme pendant qu’elle nous posait plein de questions sur nos activités et sur ce que l’on avait appris là-bas. Enora était une Sorcière passionnée par tout ce qui l’entourait, personne ne la détestait. De plus, ces cours étaient très enrichissants et très bien gérés. Elle proposait pour la plupart du temps, des activités ludiques pour apprendre et qui garantissait des bonnes notes sans trop d’effort. C’est évident qu’avec une telle pédagogie, la plupart des élèves comprenaient le chapitre et ces enjeux. Ainsi, sa classe était celle qui se débrouillait le plus en histoire. Sa matière était vaste, elle englobait une histoire très générale, des différentes espèces à différentes périodes, ainsi que celle des Humains. Tandis que l’histoire spécialisée était dispensée par notre référent d’espèce, donc pour ma part : Sibylle et Jack.
Je devais le revoir, d’ailleurs. Je m’étais entraîné à contrôler ma glace et j’avais réussi son exercice stupide : geler un cure-dent. Ce n’était pas du gâteau.
Après avoir passé deux heures avec Enora, je me dirigeais dans la classe de Sibylle. Mes camarades et moi devions nous entraîner à la télékinésie. Cela s’annonçait intéressant. Lorsque j’entrais, je vis Basil et Adélaïde. Ils étaient souvents présent lors de nos cours de pratique, à croire que Sibylle ne voulait pas trop se fatiguer.
— Bonjour à tous, aujourd’hui, programme chargé. C’est pour ça que je suis accompagné de mes deux compères, commença-t-elle en frappant dans ses mains.
Basil leva les yeux aux ciels, les bras croisés, il n’avait pas eu le choix apparemment.
— Connaissez-vous la psychokinésie les enfants ?
Une étudiante leva immédiatement la main.
— Il s’agit de l’ensemble des facultés qui permet d’agir sur la matière grâce à la force de l’esprit.
― Bravo, tu as bien appris ta leçon. Les Psychics sont des experts en la matière. Ils sont capables de télékinésie, sur tout type d’objet, mais ils sont aussi capables de jouer avec les esprits d’autrui. Le cerveau est l’outil principal des Psychics, et cela s’avère pratique car le cerveau est surtout la tour de contrôle du corps. Si vous êtes capables de le manipuler, vous avez toutes les cartes en main. Mais pour l’instant, nous nous attarderons sur le mouvement d’objet neutre, je veux qu’en fin de séance, vous soyez capable de faire léviter Basil.
— Quoi ? S’offusqua le concerné alors que je pouffais. Tu ne m’as pas prévenu ! Et pourquoi pas Adélaïde ?
― C’est toujours elle qui fait le sale boulot. Maintenant, je veux te voir mettre la main à la pâte. Arrête de te plaindre.
— Putain, pesta-t-il en regardant ses pieds.
Nous étions quatre élèves, donc deux groupes de deux. Je m’orientais vers Basil sans réfléchir, l’élève qui avait répondu à la question de Sibylle me suivit. Je la trouvais très belle, elle avait de longs cheveux noirs et des yeux de la même couleur, elle me dépassait de quelques centimètres. Elle me souriait souvent lorsque nos regards se croisaient. Dans ces moments là, j’avais l’impression que ces yeux pétillaient d’une lueur qu’elle n’avait pas toujours. Je la voyais toujours seule et je savais que certains la critiquaient parce qu’elle était très intelligente, elle se mettait malheureusement, souvent de côté.
« Ne bave pas trop. » Ris une voix moqueuse au fin fond de mon esprit, c’était celle de Basil.
Je lui fis mon plus beau doigt alors que Sibylle s’occupait d’autre chose, il se mit à rire en secouant la tête. Nous nous asseyons face à face, tandis que ma camarade se mettait à ma droite.
― Bon, on va commencer par un exercice tout con, pour que je puisse voir où vous en êtes. Il suffit juste de faire léviter ce stylo, jusqu’au niveau de mon visage.
Basil posa le stylo à plat sur la table, croisa ses bras puis nous fit une démonstration. Le stylo s’éleva instantanément, de manière très fluide, il se fixa au niveau de son regard, à l’horizontale. Il s’amusa même à le faire tourner, doucement.
— Voyez ? Simple. Votre tour, dit-il, le stylo tomba alors sur la table.
Ma camarade, qui s’appelait Maddy, commença. Elle pu aisément jouer ce petit tour, bien que le mouvement semblait moins rapide que celui de Basil, elle réussit du premier coup. C’était compréhensible lorsque l’on devinait que sa famille avait dû lui apprendre. Ce qui était loin d’être mon cas.
― Tori, m’introduit Basil en replaçant le stylo.
Je respirais un bon coup, puis me concentrais sur l’objet. Je l’imaginais se lever, mes sourcils se fronçaient tellement qu’une migraine pointait le bout de son nez.
— Aide-toi de tes mains. Fais le mouvement, dans les airs, comme si tu allais le prendre, me conseilla Basil, patient.
Je sortis mes mains qui étaient cachées sous la table. Alors que je mimais le geste pour prendre le stylo, celui-ci se mit à vibrer doucement. Je me mis à sourire, c’était une petite victoire.
« Ne pense pas à faire léviter le stylo. Pense à toi, qui le porte. »
« Plus facile à dire qu’à faire. » répliquais-je, impatientée.
Je me servais de mon index et de mon majeur pour montrer au stylo la trajectoire qu’il devait prendre. Il la suivit timidement, je fermais les yeux et me mis à imaginer ce que Basil me conseillait.
Lorsque je rouvris les yeux, Basil semblait s’être figé, je plissais les yeux et remarquai un léger trait noir sur son nez. Sa pomme d’Adam se mit à rouler, il déglutissait difficilement.
— Ou est passé le stylo ? demandai-je en baissant les yeux sur la table vide.
Maddy me tapota l’épaule et désigna le plafond avec son index. Le stylo y était planté.
― T’as failli me crever un œil, Tori.
— Oh, merde.
Je me confondais en excuse, je ne savais pas comment ça avait pu arriver, je m’étais à peine concentré.
— Bon, je pense que tu as compris mais il faut que tu apprennes à doser, marmonna Basil en essuyant le bout de son nez.
― Je suis désolée…
Je me répétais, mais j’étais sacrement mal à l’aise.
Nous continuons l’exercice durant plusieurs minutes, étape par étape. Maddy se contentait de me regarder échouer. J’espérais ne pas trop l’embêter mais lorsque je me retournais vers elle avec une moue désolée, elle ne se séparait pas de son sourire pétillant. C’est au bout d’une trentaine de minutes que Basil lui recommanda de suivre les exercices du groupe d’Adélaïde, qui était bien plus avancé.
Je réussis tout de même à faire léviter ce foutu de stylo durant quelques secondes, après presqu’une heure d’entraînement. Basil souffla de soulagement.
Alors que la fin de la séance allait sonner, je vis le teint de Basil pâlir. Pour son plus grand plaisir, personne ne sut le faire léviter. Sibylle observait avec le sourire aux lèvres, prête à éclater de rire. Elle se mit à pincer les joues du Psychic qui tapait du pied.
— Bon, quel dommage, une prochaine fois, j’espère. Allez vous reposez les enfants. Tori, entraîne-toi, je veux voir ce stylo en l’air pendant une heure s’il le faut.
Je soufflais mais accusais le coup, il allait bien falloir que je m’améliore.
Les élèves ricanèrent avant de quitter la salle. Alors que je faisais de même, Basil me fit un clin d’œil et je reçus un message télépathique distinctement.
« Rejoins-moi chez Clara, après le dîner. Je dois te parler. »
Marrant ce petit cours.
J’aime la remarque sur le carcan des notes qui ruine les efforts des enseignants qui font tout pour susciter l’intérêt.
Il y a un temps pour l’apprentissage ludique et la sanction de l’évaluation.
Oui on veut savoir !