*PSA : J’ai changé la couverture*
Cette tragédie, mentionnée par le sorcier, paraissait oubliée de tout le monde, mais pourquoi ? J’avais lu tous les livres dans l’enceinte de l’orphelinat et jamais un tel évènement n’avait été évoqué, écrit dans ces ouvrages. Il est vrai que c’était les professeur et responsables de l’endroit qui décidaient des livres que nous pouvions lire, mais si une guerre avait ravagé une ville entière, n’aurait-il pas des bouquins traitant sur le sujet ? De plus, traitant presque exclusivement sur les races divines, ils n’auraient pas pu m’en apprendre davantage sur Nohmira. Étais-ce l’œuvre de magie qui serait à l’origine de cet oubli ? Ou tout simplement le temps ? Un millénaire c’était long, mais je ne me résolu pas à accepter qu’il en soit la cause. Malgré la ruine de la cité et la végétation l’ayant avalée, ce n’en étais pas moins étrange. Le draconien huma les arômes de sa boisson, puis but goulûment. Une bouchée de croissant plus tard et il s’apprêta à continuer, mais se stoppa en me regardant attentivement. Sentant la faim me tirailler les entrailles, je me risquai à tendre le bras la tarte aux pommes qui me faisait de l’œil depuis que les plats avaient magiquement apparut. L’homme afficha un sourire victorieux lorsqu’une part se posa dans mon assiette.
— Si elle avait été empoisonnée, je ne te l’aurais pas dit. Tu ne risques rien comme je te l’ai dit tout à l’heure.
Encore hésitante, j’approchai ma fourchette, surmontée d’une magnifique bouchée de pommes bien cuites saupoudrées de cannelle, puis l’engloutis à l’instant où elle toucha ma langue. C’était délicieux ! Pendant un bref instant, j’oubliais la présence d’Aydan et m’empiffrai de toutes les pâtisseries tombant sous mes mains. Me rappelant que je n’étais plus seule, son rire mélodieux résonna à mes oreilles comme un carillon de verre. Je levai mon regard vers le sien, mais le détourna rapidement en sentant le rouge me monter aux joues. Moi qui s’étais dit de ne pas perdre mon sang-froid devant lui, ces douceurs avaient été à bout de moi bien rapidement. Je devrais plus avoir peur de ces confiseries que du sorcier, me dis-je en mastiquant toujours de la nourriture.
— Mange autant que tu le souhaites : ces gâteaux et tartes ne disparaitront que lorsque je le voudrai. Ne te retiens surtout pas. À voir la maigreur de ton corps, il est évident que tu n’as jamais mangé à ta faim. Je sais ce que c’est de ne pas manger assez. J’ai passé par là moi aussi alors il serait bien dommage que tu t’effondres au milieu de la rue, n’est-ce pas ? me dit-il, un rictus moqueur sur les lèvres.
Honteuse, je baissai mon regard vers mon assiette. Il avait raison même si je ne voulais pas l’admettre. En y repensant, j’ai toujours eu l’air d’un squelette ambulant. Avoir l’air d’un cure-dent ne donnais aucun avantages surtout si l’on prévoit de s’enrôler en tant que chevalier. Maintenant que j’étais sortie de l’orphelinat, plutôt le camp dans la forêt, j’étais presque certaine de pouvoir manger à ma faim malgré le peu de nourriture que possédait Daserion. Je connaissais son attitude méchante et froide, mais je doutais qu’il irait jusqu’à m’en priver. Affichant un air désolé, le draconien cessa de manger pour me regarder dans les yeux. Son air jouer et fier semblaient s’être envolés en un instant.
— Je veux que tu saches ceci avant de retourner à Mhala : malgré l’apparence, ce n’est pas parce que je suis du côté des races maléfiques que je suis pour cette guerre stupide. Je jouerai mon rôle, mais je ne suis qu’un pantin exécutant les ordres de son roi.
Avant que je ne puisse placer un mot, Aydan se leva et fit disparaitre les tables ainsi que les chaises, emportant la nourriture avec elles. Une brume noire commença à se former sous nos pieds, puis un courant froid traversa ma nuque. Je fermai les yeux en n’espérant pas me retrouver ailleurs qu’à la capitale. Lorsque je les rouvris, j’étais de retour dans la ruelle, seule. Le draconien s’était volatilisé. Nous étions partis depuis quelques heures déjà, car le soleil s’appétait à décliner lentement dans le ciel pâle parsemés de nuages aux formes cotonneuses. En me dirigeant vers la demeure du général, je ne pus m’empêcher de repasser les dernières phrases du sorcier dans ma tête. J’étais mitigée : était-il un allié ou un ennemi ? Je n’avais pas les réponses que je cherchais. Si je n’étais pas une Asura, peut-être aurais-je été en mesure de choisir mon camp ? Je ne pouvais pas me défaire de la prophétie alors je devais me mettre du côté des races divines même si je n’en avais aucunement envie.
J’arrivais à ma nouvelle demeure lorsque le soleil avait presque disparut, laissant place à peu de clarté et un ciel rouge orangé tournant sur le rose. Si l’instant avait été figé dans le temps, jamais je ne me serais lassé de voir ces magnifiques crépuscules colorés. J’insérai la petite clé en or dans la serrure, puis pénétrai à l’intérieur en faisant attention d’être silencieuse. En ouvrant la porte de chêne sombre, une bouffée d’odeurs attaqua mes narines qui s’étaient habitués à la poussière de Nohmira. Je sentis les exquises fragrances des langues de flammes brûlant dans la cheminée et d’un repas se faisant préparer. Seules le feu éclairait la demeure d’un étrange éclairage. Je me débarrassai précautionneusement de mon manteau avant de me diriger vers la cuisine. Telrym Daserion était en train de couper une belle pièce de viande sur une planche en bois tandis que des légumes grillaient dans une poêle non loin de l’elfe. Lorsqu’il me vit, il cessa ce qu’il faisait pendant un bref moment.
— Tu as l’air fatiguée, me dit-il simplement en recommençant à couper la viande.
Ignorant ce qu’il venait de me dire, je bifurquai vers la droite pour monter à l’étage. Je n’avais pas envie de lui parler après qu’il m’est humilié de la sorte il y a quelques jours. Si je le pouvais, je déballerais tout à mes amis, mais à présent que nous avions tous des mentors et des horaires différents, il était difficile de se voir. Pourtant, j’avais grand besoin de me confier à quelqu’un, car tout cela me pesait sur la conscience comme un fardeau. Le fait d’être une Asura, mon esprit scellé, la prophétie, mes ailes, ma nature, le général, Aydan, bref, si je pouvais me confier, je le ferais sans hésiter. En arrivant dans ma chambre, je me laissai tomber sur mon lit avant de laisser mes penser divaguer. Qu’allais-je faire pendant la prochaine année avant mon dix-neuvième anniversaire ? Je n’avais que dix-sept ans, mais ma fête était très bientôt. Je m’entrainerai comme une acharnée à tous les jours en subissant les méchancetés de Telrym ? Non, je refusais. En imaginant ma vie future, seul le néant était mon ami. Pour une raison que j’ignorais, j’étais totalement incapable de me situer au-delà d’un an, après m’être enrôlée pour les fronts de guerre. Je n’en avais pas spécialement envie, mais je ne voulais pas non plus subir la punition si je ne le faisais pas avant mes vingt-et-un ans. Plus vite ce sera fait, mieux ce sera, pensais-je en doutant de la viridité de cette pensée.
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Aydan Valendyl
Après sa discussion avec la nouvelle Asura, Aeris, le sorcier draconien se dirigea vers Thiar, le pays des démons, pour faire son rapport à son roi, Oberos Sygrekil. En pénétrant dans la salle du trône du palais fait de briques sombres, le roi était avachit sur son trône et somnolait presque. Il avait l’air las et indifférent. Est-ce parce que le sceau des Asura s’est effacé qu’il est ainsi ? se demanda l’homme en s’agenouillant devant le démon.
— Maitre Oberos. Votre message a été délivré à la fille.
— Parfait, mais comment se fait-il que tu sois partit aussi longtemps ? On t’a retenu ?
— Pardonnez-moi majesté, mais j’ai eu plus de difficultés à la trouver, puis à l’approcher. Sa présence oppressante ne m’a pas aidée.
Ce n’était ni totalement vrai ni totalement faux. Il ne pouvait juste pas révéler au roi qu’il avait eu un repas avec l’ennemi. Il serait exécuté par son roi s’il l’apprenait. Tout le monde était au courant qu’Oberos était un tyran capable de tout et n’importe quoi.
— Je savais qu’elle était puissante, mais pas à ce point, lui dit le roi, ne se doutant pas de son mensonge. Il va falloir redoubler d’effort pour l’empêcher de réaliser la prophétie. Dommage que cette maudite elfe a caché le grimoire de diviotis, sinon nous aurions eu un gros avantage sur la fille, cracha-t-il. Tu peux disposer Aydan.
Respectueusement, il effectua une petite révérence en se relevant, puis tourna le dos au roi. En sortant du château, il huma l’air ambiant de Thiar : ça sentait les effluves de pluie et de fer à la fois. Il émit une grimace, puis se volatilisa dans un nuage de magie noire. Il réapparut de nouveau à Nohmira. Il avait décidé d’en faire son sanctuaire personnel et, en apportant Aeris dans cet endroit, il avait violé une loi invisible. L’odeur de l’ange flottait encore dans l’air – la cannelle entremêlée des effluves du feu – ainsi que les arômes du soir. C’était plutôt humide malgré les légers flocons qui descendaient doucement du ciel. En pensant à elle, il eut un petit pincement au cœur. Il se sentait mal pour elle. Elle n’avait aucune idée de ce que signifiait être une Asura et lui le savait, car il l’avait vu de ses yeux rubis il y a fort longtemps. C’était loin d’être rose et joyeux comme tout le monde le prétendait. La sombre définition de ce titre, personne ne la connaissait vraiment. Le peu de temps passé avec Aeris, lui avait fait réaliser à quel point elle était tourmentée par ça. Elle ne possédait aucun savoir sur les diviotis et ses pouvoirs étaient toujours scellés dans son esprit. Malgré cela, une énorme puissance émanait d’elle.
En marchant sous le ciel de jais, ses pas le menèrent vers les ruines de ce qui était le majestueux palais de Nohmira. Fait de pierres blanches, il reflétait la lueur de la lune. Il traversa plusieurs couloirs et intersections avant d’être devant la porte secrète. L’endroit pour lequel il y avait eu une guerre dans cette ville : la salle aux milles miroirs. Ayant été créée par un des plus puissants sorciers de tout l’histoire d’Extyria, chacune des glaces pouvait révéler des fragments du futur de la personne entrant dans la pièce seulement si ses intentions étaient pures. Le mage posa la paume de sa main sur le centre de la porte, puis récita une incantation. Sa paume s’illumina et le sort empêchant quiconque de pouvoir pénétrer à l’intérieur se leva. Il poussa la porte à l’aide de ses deux mains, puis entra dans la salle. C’était une salle relativement petite dont chaque recoin était couvert de miroirs. Seul un chemin menant à un piédestal en marbre situé son centre n’était pas recouvert. Lentement, le sorcier s’avança sur le socle en faisant face à la plus grande psyché flottante ornée d’un contour en métal forgé. Des fleurs colorées qui ne vont jamais se faner y étaient imbriquées. L’homme attendit plusieurs minutes avant que quelque chose se produise.
C’était la deuxième fois qu’il venait dans cet endroit alors il n’était pas encore habitué. La première, c’était il y longtemps, après la guerre de trois-cents ans. Il avait voulu savoir ce qui arriverait à son peuple et à sa ville natale. Malheureusement, la réponse qu’il eut, ne fut pas celle espérée et, depuis, il n’avait plus mit les pieds dans la salle aux milles miroirs. La surface de la psyché ondula légèrement et une image floue y apparut. Un léger scintillement se reflétait dessus et, ondulations par ondulations, une image presque claire finit par se former. Aydan reconnut les ailes blanches aux pointes noires de l’Asura, mais le reste était difficile à voir. Il y avait du rouge autour d’elle, puis un éclair lumineux apparut. Soudainement, l’image disparut, laissant le sorcier en plan avec un questionnement. Étais-ce un champ de bataille ? D’où vient ce flash lumineux ? Sachant très bien que ses questions resterais sans réponses pour le moment, il quitta la pièce en replaçant la barrière sur la porte de la pièce.