Confidences pour confidences. (Chapitre 5.2)

3 mins

Erwann tourne la cuillère dans son bol en la regardant intensément. Déroutée par son invitation directe, elle réfléchit quelque instant, avant de se lancer :

– Que pourrais-je te dire d’intéressant ?

– Tout ce que tu veux.

– Tu connais déjà certaines choses de moi, que tu as peut-être découvert par le biais de ma page Facebook ou de mon Instagram.

– Ce que tu veux bien partager sur les réseaux, oui. J’ai vu que tu aimes lire, écrire et les citations philosophiques.

– Eh bien voilà un parfait résumé ! s’esclaffe-t-elle en riant.

– Un peu succinct quand même, dit-il avec une moue dubitative. C’est tout sauf la vraie vie. J’en sais quelque chose, je ne partage moi aussi que ce que je veux montrer…

– Comme le fait que tu aimes le billard, les tatouages et les paysages de la côte sauvage bretonne ?

– Voilà un autre bon résumé, sourit-il à son tour.

– Tu sais que j’ai une fille. Que je suis divorcée. Que j’ai 39 ans.

– Effectivement, c’est aussi ce que je pourrais lire dans ton livret de famille… la taquine-t-il en mangeant. Tu as l’art de ne dire de toi que les choses formelles.

– Question d’habitude, tu as raison.

– Pour te protéger ? demande-t-il alors qu’il a l’impression qu’elle essaie encore de se dérober.

– Bien évidemment, Erwann. Je peux choisir de m’exposer en montrant mon corps et mes écrits mais il y a beaucoup de choses que personne ne sait.

Erwann remplit son verre d’eau et lui demande si elle a assez chaud désormais. Gwendoline répond par l’affirmative. Il rebondit sur ce qu’elle vient de dire quelques instants plus tôt.

– Ce que tu ne veux pas dire ou montrer, c’est ton jardin secret ?

– Exactement.

Elle réfléchit tout en avalant un peu de sa soupe et reprend :

– Tu veux du spirituel ?

– Pourquoi pas, répond-il en prenant un air concentré.

– Avant de commencer à manger, j’ai récité dans ma tête le bénédicité. Je ne voulais pas le faire devant toi car j’avais peur que tu me penses complètement barrée.

– Tu es croyante ? l’interroge-t-il alors qu’elle a piqué sa curiosité.

– Oui et non. Je crois en dieu mais je ne suis adepte d’aucune religion.

– Intéressant.

– Comme les gens ne comprennent pas grand-chose à mes croyances, je ne me fatigue même plus à les expliquer. Je risque toujours d’être regardée de travers.

– Essaie avec moi, dit-il en penchant la tête pour la prendre au mot. Je te regarde déjà de travers, tu ne risques plus rien désormais.

Elle éclate de rire et prend le temps de manger une cuillerée de soupe avant de continuer :

– Mon Dieu n’a pas de barbe blanche, ni de trident et ne vit pas assis sur un grand fauteuil céleste. Mon Dieu n’est pas jugeant, attendant la fin des mondes pour émettre sa sentence irrévocable d’un enfer ou d’un paradis. Mon Dieu n’est assimilé à aucune dogme, ne réclame aucun sacrifice et ne menace d’aucuns châtiments en cas de mauvaise conduite.

– J’aime bien ton Dieu dans ces cas-là.

– Je dis Dieu, mais je peux aussi parler de l’Univers, de la Vie, de Dame Nature, peu importe le nom que tu veux lui donner. Ce n’est pas une personne, c’est une énergie, une entité. C’est tous les préceptes de la religion quelle qu’elle soit, tant que cela est joyeux et bienveillant : La générosité, la solidarité, le bonheur, la bienveillance ou encore le pardon.

– Pas de diable ou de Satan alors ?

Gwendoline lève les yeux au ciel en entendant cette horrible idée.

– Oh Seigneur, non ! rit-elle. Pas plus qu’il n’y a de menace d’enfer ou de damnation. J’aime la douceur et la gentillesse, les bénédictions et les bienfaits. J’aime le bonheur et la joie. Nous sommes humains et donc faillibles, j’invite donc quiconque à faire preuve de bonté. Que serait la vie sans tolérance ni ouverture d’esprit ?

– Effectivement, vu sous cet angle, Dieu a l’air franchement plus sympathique.

– Il l’est, crois-moi.

– Tu es donc une optimiste ?

– Je sais que cela n’est pas très bien côté mais oui. Définitivement.

On rit de sa positivité, à une époque où le cynisme est roi et où la télévision rappelle sans arrêt à ses ouailles combien tout est tellement, tellement difficile. Pourquoi faire preuve de douceur quand la méchanceté est gratuite ? Elle sait qu’on se moque d’elle et de son angélisme mais elle n’a jamais été aussi bien de sa vie que depuis qu’elle regarde la vie du bon côté. En se dévoilant ainsi avec franchise, elle prend un risque. Exposer sa vision de la vie au photographe lui semble soudain plus difficile que lorsqu’elle exposait sa nudité plus tôt dans la soirée…

– Et toi, Erwann ? Que peux-tu me dire de toi ?

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