Il fallut sept jours…

7 mins

Lundi – “Je perds la boule, je ne sais plus où donner de la tête ! Des millions d’années que je tourne sur moi-même, que je donne et prends la vie, que je nourris, que je porte… Et il aura fallu l’équivalent de ce qui correspond à quelques secondes de mon existence pour que ces misérables humains aient raison de moi. Ils me creusent, ils m’exploitent, ils m’assèchent, ils m’empoisonnent et rien, non rien ne les arrête ! Seul leur règne et leurs dividendes comptent, ils sont incapables d’imaginer partager leur espace de vie avec d’autres espèces et même l’extinction de masse qui est en train de se passer sous leurs yeux, dont ils sont largement responsables, ne les fait pas réagir.”

“Mais quelle idée j’ai eu de vouloir créer une race supérieure !
Supérieure en connerie, oui ! Ces cons sont en train de scier la branche
sur laquelle ils sont assis et ils regardent tranquillement d’un air
benêt, en croyant que je vais leur dire ” c’est bien mes petits,
continuez de me faire souffrir, attendez, je me tourne pour que vous puissiez vous attaquer à l’autre côté aussi !”

“Alors que puis-je faire ? Les laisser prier leurs dieux afin qu’ils continuent d’attendre leur salut pour un éventuel aller simple dans un hypothétique paradis… Alors qu’ils ne sont pas foutus de prendre soin de LEUR paradis ! Attendre qu’ils suppriment un à un leurs moyens de survie, qu’ils exterminent petit à petit les centaines d’espèces qui les nourrissent ? Qu’ils s’empoisonnent tous avec leurs satanés produits chimiques, qui me font mourir à petit feu ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Ou si, plutôt, je sais, mais je ne veux pas le reconnaître, je suis fière et c’est là un aveu d’échec… Mettre fin à leur vie, donner leur chance aux autres espèces qui me peuplent, qui ont su rester les quatre pieds sur Terre, elles ! Allez, sois fière ma grande, tu en verras d’autres, tourne la page et reprends toi en main (façon de parler, parce que des mains, ce sont eux qui en ont mais faut voir ce qu’ils font avec !)”

“C’est décidé, je m’y mets aujourd’hui et c’est bouclé samedi prochain, comme ça je pourrais me reposer un peu dimanche !”

Mardi – Dans la campagne sarthoise, en cette belle saison automnale, le chasseur, accompagné de son fidèle chien, piste la biche et son petit depuis une heure. Tout content de mettre  la main sur une double prise, il ne ménage pas sa peine. Même si sa carte de chasse a été bradée par son fidèle président, il faut quand même la rentabiliser et il tient là une formidable occasion de remplir son congélateur. Il s’approche tout doucement du bosquet traversé par un cours d’eau, où les animaux s’arrêtent souvent pour boire. Son chien, queue et museau dressés, est à l’arrêt. Le chasseur rampe vers un fourré et découvre la biche en train de se désaltérer. Son faon, éloigné de quelques mètres, sautille après un papillon, inconscient du danger qui les guette. Le sol devant la biche est constellé d’étranges champignons jaunes de forme sphérique, à l’aspect repoussant et gluant. La bête ne semble pas y prêter attention.

Le chasseur ajuste son fusil, visa la biche et tire. BANG ! La balle part et la bête, touchée en plein flanc, est emportée par la décharge et s’effondre sur les champignons. Son petit, apeuré, s’enfuit au grand désespoir du chasseur, qui n’a pas le temps de le mettre en joue. Lorsque le corps de la mère touche le sol, les champignons éclatent et de minuscules spores argentées se répandent dans l’air. Emportées par la brise du matin, elles se répandent dans les environs. Dès que le chasseur les respire, il s’écroule net, terrassé par ce mal venu des entrailles de la Terre. Son chien, ne semblant pas affecté par ce redoutable poison, s’approche de lui en gémissant, ne comprenant pas ce que fait celui qui était jusqu’alors son maître. Il entame alors un chant funèbre, hurlant à la mort à qui peut l’entendre. Le Mal est là, il a commencé sa funèbre opération… Celui qui a tué avec son fusil fut le premier être humain à mourir de ce fléau, il est loin d’être le dernier…

Les spores se répandirent à la vitesse du vent dans les environs, par milliers. Ces champignons ont éclos mystérieusement dans plusieurs parties du globe et le nombre de victimes fut, dans les premières heures, incalculable. Les gens, quelque soit leur âge, leur sexe, leur catégorie sociale, tombaient comme des mouches. Le simple fait de respirer, d’être touché par ces spores assurait aux humains une mort quasi-immédiate. Les autorités, du moins ce qu’il en restait, complètement dépassées, ne surent comment réagir.

Mercredi – Les morts se comptaient par millions, souvent dans des zones géographiques concentriques aux éruptions de champignons. Ceux-ci semblaient sortir de terre comme par enchantement, comme s’ils n’apparaissaient là que dans un objectif : éliminer toute trace de vie humaine dans les environs. Les humains, habitués à répondre à des menaces identifiables et contenables, furent rapidement débordés. La panique et les vents violents qui soufflèrent sur la surface du globe eurent raison de plusieurs millions de vies. Des gouvernements entiers étaient terrassés par ce mal mystérieux, les forces armées, impuissantes face à ce mal mystérieux, tombaient comme des mouches. Les bataillons de chercheurs, trop peu organisés pour répondre à cette épidémie mystérieuse, étaient inefficaces, quand ils étaient encore vivants. Toutes les voies de communication furent coupées, de crainte d’une diffusion encore plus importante de ce que l’on pensait être une épidémie.  Certains avions de ligne s’écrasèrent, les spores ayant réussi à s’infiltrer dans les systèmes d’aération en haute altitude. Rien ne semblait les arrêter. Leur taille microscopique leur permettait de pénétrer tous les systèmes réalisés par l’homme, que ce soit des masques, des climatisations, des chambres fortes… 

Il fallut plusieurs heures, temps équivalent à un lourd tribut humain, pour comprendre d’où venait le mal. La dangerosité des spores tueuses rendit complexe toutes les analyses qu’il fallut tenter. Cela coûta la vie à un certain nombre de scientifiques. Tant que le champignon n’était pas ouvert, il semblait toutefois inoffensif. Les chercheurs purent ainsi isoler la spore dans un univers totalement confiné, mais ne purent identifier la souche bactériologique. Elle semblait affecter les voies respiratoires des humains de façon extrêmement violente, en les paralysant et en créant une inflammation brutale des poumons. Aucune réponse plausible de sortit des laboratoires et la pandémie continua de s’étendre sur les territoires.

Jeudi – Cette hécatombe eut des effets dévastateurs dans tous les pays. Les plus avancés technologiquement, qui possédaient des centrales nucléaires, virent les installations exploser face à des surchauffes de réacteurs, faute de personnel pour s’en occuper. Les accidents de voiture étaient légions, les scènes de pillages et de violence complètement hors de contrôle. A la mi-journée du jeudi, les deux-tiers de l’humanité avait été victime de la spore tueuse et plus aucun recours n’était envisageable. Les organisations et les procédures finement tissées par les humains disparurent en quelques heures face à l’ampleur inattendue du Mal.

Des monceaux de cadavres s’entassaient dans les grandes villes, attirant rapaces et charognards. Des feux hors de contrôle se développaient en tout point du globe, dévastant tout sur leur passage, apportant par la même une forme d’hygiène en brulant les corps. Le bétail accumulé par les hommes dans de grands hangars, devenait fou dans ces prisons de bois et de métal, privés de nourriture et de soins. Beaucoup, dans la panique s’entretuèrent et d’autres, plus chanceux, réussirent à s’échapper pour rejoindre les plaines, ce qui deviendrait demain leur habitant naturel.

Même si les survivants faisaient attention à ne plus écraser ce fameux champignon, auquel personne n’avait eu le temps de donner un nom, les animaux, eux, à priori immunisés, s’en fichaient. Lors de leurs courses effrénées, ils les écrasaient et diffusaient ainsi ce qui serait pour eux demain la clé de leur liberté et la reconquête de leurs territoires. La roue avait tourné, c’était l’animal qui était en train de provoquer la fin annoncée de l’humanité.

Vendredi – Les rares humains qui avaient survécu, se pensant immunisés et désignés par le tout-puissant comme celles et ceux qui allaient permettre le repeuplement de la planète, se trompèrent lourdement. L’humanité avait été éradiquée du globe le vendredi midi, le champignon ayant mis plus de temps à se développer dans certaines régions plus inhospitalières ou plus isolées. Le dernier humain vivant sur Terre fut une femme, ultime clin d’œil à nos sociétés patriarcales. Isolée de la société, elle vivait en ermite dans les montagnes himalayennes, ce qui lui valut d’être protégée des méfaits de la société et de ses conséquences néfastes.

La surface de la Terre est, en cette fin d’automne, jonchée de corps sans vie. Mais elle n’est pas sans vie. Comme si un souffle nouveau apparaissait, les animaux sortent de leurs tanières et s’aventurent précautionneusement dans des endroits où ils n’osaient plus aller, de peur de se faire abattre ou chasser. Des bêtes d’élevage, peu habituées à devoir se nourrir seules, découvrent les joies de la liberté et les immensités à leur disposition. Elles devront toutefois continuer à se méfier des prédateurs, car si l’homme n’est plus là, elles n’en sont pas moins des proies pour d’autres.

Quelques bruits inhabituels viennent encore briser le silence : des moteurs qui tournent, des sirènes qui se sont actionnées, des cloches qui sonnent… De la même façon, des éoliennes continuent d’agiter l’air de leurs grandes pales, alimentant des circuits électriques qui ne serviront plus à personne. Quelques rares lampadaires continuent d’éclairer des rues désertes où errent encore des animaux de compagnie à la recherche de leurs maîtres, n’ayant pas encore compris que le règne de l’Homme était fini.

Samedi – “Ce fut bien plus simple que je ne le pensais. ces humains étaient définitivement bien faibles face aux forces que je peux déployer, même si je commençais à en douter. Ah, je me sens plus légère, comme si je m’était débarrassée d’une vilaine maladie ! Je vais enfin pouvoir respirer ! Fini les nuages de pollution, fini les forages, fini l’abattage intempestif des arbres, fini la luminosité perpétuelle qui m’empêchait de dormir ! J’ai encore quelques problèmes à régler, notamment ces cochonneries de centrales nucléaires que je vais devoir assainir, mais au vu du temps qu’il me reste à vivre, ce ne sera qu’un détail.”

“Les mers vont pouvoir se repeupler, les territoires vont enfin pouvoir être partagés par tous les animaux, les ressources naturelles serviront enfin à de nobles causes, les forêts vont pouvoir respirer. C’est une cure de jouvence qui m’attend. Il va toutefois falloir que je fasse attention à ne pas engendrer un autre fléau comme l’Homme dans les années à venir, sinon l’histoire risque de se répéter.  Ah, on ne m’y reprendra pas de sitôt !”

“Mais comment je vais faire pour virer toutes les cochonneries qu’ils ont mis à flotter dans l’espace autour de moi !?”

Dimanche – C’est repos…

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4 années il y a

Bonjour David,
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