La confrérie Chap 3

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Depuis qu’il avait fait la connaissance de Gora, Ndoum me parlait souvent de lui, il disait qu’il le trouvait plutôt sympathique, et que s’il était à ma place, il ne le ferait pas miroiter pour rien :

– Ça veut dire quoi tout ça, je suis supposée, parce que monsieur est revenu, me jeter dans ses bras comme si de rien n’était, lui dis-je en le regardant droit dans les yeux

– Ce n’est pas ce que j’ai dit,

– Alors tu as dit quoi monsieur son avocat défenseur, m’exclamais-je

– Que si tu n’as pas l’intention de te remettre avec lui, dis le lui Abeng et libère le, il en souffrira un temps mais il s’en remettra,

Sur ce coup-là il m’avait bien eu, surtout qu’il avait raison. Je n’avais pas le droit de le torturer si c’était pour lui dire au final que je ne voulais plus me remettre avec lui. Cela n’avait pas de sens. Si c’était fini, je devais tirer un trait et passer à autre chose. Et si ça ne l’était pas, il fallait qu’on se parle. Cela faisait deux semaines qu’il était passé au magasin, je savais qu’il ne vivait plus avec sa mère mais je ne savais pas où il vivait, alors pour l’effet de surprise… il fallait oublier. Vu le temps qu’il avait mis pour décrocher il ne devait pas être près de son téléphone :

– Hey salut Abeng !

– Salut !

– Je suis content de t’entendre, désolé d’avoir mis tout ce temps à répondre j’étais sous la douche

– Gora j’ai… il faut qu’on se parle

– Je sais bien, même si ça me fait un peu peur de t’entendre le dire comme ça,

– Ah oui ?

– Oui, j’ai l’impression que tu vas m’annoncer une mauvaise nouvelle,

– Je suis à la maison avec la p’tite, tu pourrais passer nous chercher ? lui demandais-je

– C’est comme tu veux ma belle, laisse-moi le temps de passer un truc et je suis chez toi

– A tout de suite alors,

J’avais déjà pris la décision de me remettre avec lui, en réalité lui aussi m’avait manqué. Mais Gora était un homme à l’ancienne et il me fallait négocier avant qu’on aille le rejoindre, je voulais pouvoir continuer à travailler au magasin et aussi recevoir mes amies à la maison. Hé oui, mon chéri était un peu compliqué comme garçon. On n’avait pas de problème à proprement parler mais il était plutôt jaloux et aussi très méfiant avec les personnes qu’il ne connaissait pas. A peu près 1h après mon coup de fil il était là :

– Je n’ai pas été trop long ? S’enquit-il

– Non ça va,

– Où est Akeng ?

– Appelles la tu verras bien, lui dis-je

Il jeta un coup d’œil circulaire dans la pièce et se rendit compte que la nappe de la table à manger bougeait sans qu’il y ait du vent. Il avança doucement vers la table et se baissa en passant les mains sous la nappe pour l’attraper, ça la fit éclater de rire :

– Je t’ai eu ma grande, comment tu vas ? Demanda-t-il en riant à son tour

– Akeng va bien

– Ah oui ? c’est sûr ça ? Dit-il en la chatouillant

– Oui, papa Ora arrête, suppliait-elle en riant fort

– Tu entends ça ma belle, elle m’appelle papa, c’est toi qui lui…

– Oh non je n’ai rien à voir avec ça, dis-je et c’était vrai à part mon père elle n’appelait personne d’autre papa

– Hey Akeng

– Hum !

– Pourquoi tu m’appelles papa ?

– Papa a dit, papa Ora c’est mon papa

– J’aurais dû m’en douter, c’est mon père qui lui a dit, fis-je en souriant

– Et ça t’embête ? Me demanda-t-il

– Non c’est ta fille, pourquoi ça m’embêterait

Gora s’assit en face de moi avec la petite dans les bras :

– Je suis là Abeng je t’écoute,

– Je reviens avec toi à certaines conditions,

– Quoi tu ne…

– Laisse-moi finir, s’il te plait…

– Ok je t’écoute,

– Je voudrais pouvoir continuer à m’occuper de la boutique et de mon commerce, mais une partie de mes activités se passe à la maison alors il faut que tu arrêtes de faire la tête en rentrant si tu trouves des gens que tu ne connais pas chez nous, et puis je suis désolée mais je ne veux pas que la p’tite ai le moindre contact avec ta mère et je ne veux pas non plus qu’elle vienne chez nous, c’est ta mère mais elle ne veut pas de nous, alors nous on ne veut pas d’elle non plus,

Gora se passa la main sur le visage en me regardant, il jeta un regard à Akeng en la serrant contre lui et soupira, je ne voulais pas qu’on se dispute, et s’il avait émis des objections j’aurais certainement cédé à quelques-unes d’entre elles ou au moins négocié. Mais il ne dit rien. Pendant quelques minutes il resta les yeux fixés sur moi. Peut-être qu’il se disait que j’avais encore autre chose à lui dire, je ne saurais l’affirmer. Cependant au bout d’un moment je le vit baisser la tête :

– Tu sais que je n’ai jamais voulu que tu travailles, m’occuper de toi c’est ce que j’ai toujours voulu mais, je ne peux pas te dire aujourd’hui d’arrêter, c’est grâce à ça que tu as pu prendre soin de la gamine, et tes amies, garçons ou fille ont été là pour toi alors que moi non, je ne vais pas non plus t’interdire ça (il souffla) en ce qui concerne ma mère je… je suis obligé de me plier à tes exigences, mais il faut que tu fasses quelque chose pour moi

– Dis-moi,

– On a eu la maison gratuitement à condition que tu gères les appartements de mon patron il est souvent en déplacement et cela lui cause quelques soucis régulièrement avec les locataires

– C’est tout ?

– Non,

– Je t’écoute

– Je n’ai jamais été doué pour gérer les sous tu le sais, et c’est l’une des raisons pour lesquelles je ne voulais pas que tu travailles, j’ai besoin que tu gères le salaire qu’il va me verser, il nous faut avoir des sous de côté lorsque la petite ira à l’école parce qu’à ce moment-là mon contrat sera terminé, et je ne sais pas si j’aurais autre chose tout de suite après

– Tu fais quoi pour ton patron ?

– Les installations électriques de plusieurs maisons qu’il a construites pour une grosse boite du coin

– Ok c’est dans tes cordes alors, bah écoute je suis d’accord,

– De quoi tu as eu peur ma belle ?

– J’avais peur que ce soit un emploi de complaisance… enfin le genre de boulot qu’on file à un ami pour le dépanner, ce genre de boulot est souvent compliqué à garder

– Tu vois que ce n’est pas le cas,

– Oui je…

– Hey, ne t’inquiètes pas d’accord, fit-il en me caressant la joue, on a trois ans tranquille, on pourra recommencer à stresser plus tard tu veux bien ? là je suis content, je viens de récupérer ma famille et tu n’imagines même pas comment je me sens, j’ai manqué la première partie de sa vie mais je vais me rattraper, avec vous deux promis

Quelques jours après ça nous avons emménagé chez nous. On pourrait penser à ce stade que les choses iraient en s’améliorant. Que chacun avait pigé où était sa place et s’y tiendrait, mais rien n’est jamais aussi facile pour tout le monde. La première année les choses se passèrent comme dans un rêve. Je vivais avec Gora et Akeng et sa mère vivait chez elle, mademoiselle Poaty avait augmenté le nombre de ses déplacements à Dubaï, elle y passait toujours un mois entier mais elle y allait maintenant six fois dans l’année au lieu de quatre. Elle avait dégoté à son cousin Mori, l’ami de Gora avec lequel il avait été au lycée technique, un bon job à la douane alors lorsque les containers arrivaient c’est lui qui se chargeait de tout, et venait seulement me laisser la marchandise au magasin.

Elle avait ouvert aussi une petite entreprise de location de chaises, tentes, vaisselle, couverts etc… etc… et puisque tout était stocké sur le même site c’était encore moi qui m’y collait, mais je n’avais pas à me plaindre, cette fille elle me payait rubis sur ongle, souvent je lui disais que c’était quand-même trop pour un gérant, et elle me répondait toujours la même chose, « mieux vaut que je les dépense pour quelqu’un qui me rends service ». Et j’avais mal de l’entendre de dire ça. Pendant les mois où elle était au pays elle était toujours très entourer mais aucune de ses filles ne lui demandaient autre chose que de l’argent, tout le temps… et elles n’avaient aucune conversation sérieuse. Je l’avais entendu leur dire que le magasin était à moi et que je lui permettais seulement d’y exposer ses produits.

Plus tard elle m’avait expliqué que si elle leur disait la vérité ces filles-là étaient capables de venir récupérer des sous au magasin en son absence. Et on osait appeler ça des parentes et des amies. Enfin ! Chacun ses problèmes. On n’avait pas beaucoup de charges avec Gora, juste la bouffe, les fringues, quelques sorties de temps en temps, rien de bien excessif alors on avait pas mal d’économie. Un jour en allant livrer une cliente je passais par la cité rose. Il y avait une pancarte devant une des villas, « à vendre », quand je voulu aller frapper la première fois je fus interpellé par une femme qui passait :

– Ma fille ce sont des blancs qui habitent là hooo, déjà les maisons des gabonais coûtent les yeux de la tête, imaginez les leurs…

Après avoir dit ça elle s’en alla, je failli d’abord abandonner et puis je me dis que cela ne me coûtais rien de demander, heureusement. En entrant je fus accueilli par un couple de vieux européens fort sympathiques, en réalité ils vendaient pour rentrer vivre dans leur pays et sachant que leurs enfants ne viendraient pas vivre au Gabon, ils préféraient faire profiter de la maison à quelqu’un d’autre. Et pour que la vente se fasse vite ils avaient décidé de la vendre un bon prix :

– et c’est combien pour vous un bon prix ? demandais-je un peu suspicieuse

– 2.000.000 de cfa toutes charges comprises

– Vous êtes sérieux ?

– Oui mademoiselle, et puisque vous êtes la première à avoir osé entrer pour demander, nous vous accordons deux semaines pour trouver les finances ou le crédit nous vous attendons,

– C’est vraiment gentil, dis-je en souriant

Je pris leurs numéros en promettant de revenir bientôt. En sortant de là j’appelais mademoiselle Poaty, et lui exposais mon souci, j’avais de la chance elle était encore au pays :

– Sérieux c’est tout ce qu’ils demandent pour la maison avec tous les documents et tout

– Oui, je n’en reviens pas,

– Et de quoi tu as besoin ma chérie ? Me demanda-t-elle

– D’argent, j’ai un million et demi de côté mais il me faut encore cinq cent mille…

– Ecoute tu ne vas pas claquer tout ce que tu as de côté, disons que je te prête un million et tu complètes avec un million ce serait parfait non ?

– Oui, il faut juste que j’en parle avec Gora

– Oh non, tu lui en parleras ce soir, là il est au boulot tu risques de le distraire dis-moi où tu es et je te rejoins avec les sous, les deux millions et on ira récupérer tes sous après pour que tu me rembourse ta part

– Tu ne penses pas qu’il va m’en vouloir ?

– Si au début peut-être, mais une maison comme celle-là ma chérie c’est presque six cent ou sept cent milles cfa de loyer par mois en la louant à une entreprise et je sais à qui tu pourrais t’adresser, alors donnes moi ta position

– La cité rose,

– Derrière les appartements de Total Gabon ?

– Oui,

– J’arrive

Comme promis elle arriva au bout d’une vingtaine de minute, et grâce à son expérience pour la négociation j’eu la maison à un million huit cent mille, tout fût bouclé en un rien de temps. Elle m’avait conseillé de mettre la maison à nos deux noms Gora et moi ce serait plus sûr, vu que nous n’étions pas encore mariés. Dans la foulée elle me fit rencontrer le chargé des affaires générales d’une autre grande entreprise, et justement il cherchait des maisons à louer dans la zone. En deux heures montre en main on avait fait l’achat et la mise en location de la maison. Le type nous en avait offert huit cent mille, sans charges, mais il me fallait retirer le montant de la taxe immobilière car c’était à eux de la reverser à l’état.

En allant chercher Akeng chez mon père j’en discutais avec lui. Mes craintes le firent sourire :

– Ton ami n’est pas un idiot, il ne va pas se fâcher pour ça, et ça va vous aider

– Oui c’est un sacré coup de chance,

– Le couple s’en va quand ?

– Dans dix jours papa, et la société récupère la maison à la fin du mois, avec mademoiselle Poaty on a fait le tour de la villa il n’y a aucun travaux à faire, mais Gora va devoir refaire presque toute l’installation électrique

– C’est son domaine, fit mon père en souriant

– Une chance, dis-je

Mon père sourit. Il nous raccompagna sur la route et s’assura de nous mettre dans un taxi. En rentrant je trouvais Gora assis dans le salon. Il avait l’air embêté. Beaucoup plus que d’habitude :

– Bonsoir monsieur ! fis-je, en général ça l’amusait que je l’appelle comme ça

Il sourit en tournant la tête vers nous :

– Hey mes deux chéries, dit-il en se levant

Il me prit la p’tite des bras après m’avoir embrassée. Puis il retourna s’assoir. Il jouait maintenant avec Akeng et semblait se détendre :

– Comment tu vas ? fis-je en allant m’installer près de lui

– Un peu mieux maintenant que je suis avec vous deux, dit-il en me regardant, j’ai eu un souci avec un des autres électriciens au boulot, rien de grave mais je suis un peu… je ne sais pas comment dire,

– Raconte

– Ce gars, on ne se parle jamais, il a sa zone de travail, j’ai la mienne et basta, depuis un an et demi qu’on bosse sur ce site il ne m’a jamais salué ne fut-ce que d’un geste de la main. Mais je crois qu’il nourrissait du ressentiment envers moi, et je ne comprends même pas pourquoi, me confia Gora

– Qu’est-ce qui s’est passé avec lui Gora dis le moi ? Fis-je inquiète

– Voilà, il y a quelques jours… enfin ça s’est passé la semaine dernière, en arrivant sur le chantier, il a trouvé une des maisons dans lesquelles il travaille ouverte, et une grande partie du matériel avait été volé, il est allé au bureau pour remonter l’information, le patron à fait intervenir la police et en quelques jours les gars ont retrouvé les voleurs du moins deux d’entre eux, mais seul une partie du matériel a pu être récupérée

– Qu’est-ce que cela à avoir avec toi ?

– Rien, mais écoute, avant hier matin j’arrive et je trouve la villa dans laquelle je bosse en ce moment, la porte défoncée, j’ai appelé le patron il est venu voir et comme la semaine dernière la police est venue, mais moi je ne garde rien dans les villas, donc les gars qui ont fait ça se sont retrouvé face à une maison vide

– Ce qui est une bonne chose pour toi,

– Oui, mais le patron m’a appelé avant que j’ai fini aujourd’hui, et il m’a demandé de passer le voir, je suis donc passé le trouver au bureau, arrivé sur place je le trouve avec des policiers, et là il me demande si je connaissais l’autre électricien avant que je ne commence à bosser sur ce projet, je lui réponds que « non », il demande encore si j’ai eu un problème avec lui depuis le début du chantier, je lui dit encore « non », et là il m’apprend que les policiers l’ont arrêté, ils ont découvert que c’était lui qui avait embauché les deux autres, ceux qui ont cassés sa villa et les petits qui ont cassés celle sous ma responsabilité,

– Quel idiot celui-là ! Faire un casse sur ton lieu de travail, il faut être complètement stupide pour faire ça

– N’est-ce pas ! mais tiens-toi bien, ce type jure que nous sommes complices, heureusement que le patron me connait, il lui a demandé comment on se connaissait et où je vivais, mais l’histoire qu’il a racontée au patron était digne d’un roman fantastique, les policiers en riaient encore quand je suis parti

– Qu’est-ce qu’il est allé inventer ?

– Qu’on avait grandi ensemble à Libreville, et qu’on avait été dans un centre de formation là-bas, et que c’était là qu’on avait appris l’électricité, et que j’habitais chez lui parce que mes parents m’avaient foutu à la porte à cause de mes coups foireux, enfin bref…

– Heureusement que ton patron te connais,

– Tu le pense aussi ! Depuis le lycée technique le patron bosse avec moi, mes premiers pas sur les chantiers c’est avec lui que je les ai fait, ce gars… il doit être fou,

Même rassurée de l’innocence de Gora je m’interrogeais tout de même sur son collègue, pourquoi avait-il voulut l’embarquer dans cette sombre affaire ? Ils ne se connaissaient même pas :

– En tout cas moi j’ai une bonne nouvelle, enfin j’espère

– Comment ça ? fit Gora en me regardant, raconte,

– Je ne sais pas trop, en fait j’espère que tu ne vas pas te mettre en colère

– Me mettre en colère ? Pourquoi ? qu’est-ce que tu as fait Abeng ? dit-il suspicieux

– J’ai investi une bonne partie de nos économies dans un achat,

– Arrêtes de me faire stresser, dis-moi ce que tu as fait ma belle,

– En allant livrer une cliente aujourd’hui, je suis passé devant une pancarte « maison à vendre », je suis entré me renseigner et elle ne coûtait que deux millions cfa tu te rends compte, alors je l’ai achetée

– On avait déjà tout ça de côté déjà ? S’enquit Gora intrigué

– Non, en fait ma patronne m’a avancée un million, et il me reste encore deux cent mille, les proprios nous ont fait une ristourne, encore une chose

– Dis-moi

– Toute l’installation électrique est à refaire ou presque, c’est une vieille maison, ils avaient déjà fait refaire la plomberie et les peintures…

Gora me regardait sans comprendre où se situait le vrai problème avec cette maison :

– Et c’est quoi le souci ma belle ?

– J’ai fait ça sans t’en parler d’abord, j’ai cru que tu… allais te fâcher

– Ah oui ?

– Hum hum !

– Tu as fait une bonne affaire, c’est très rare de tomber sur des opportunités pareilles tu sais, alors on cherchera un truc à offrir à ta copine d’accord ?

– D’accord, et pour les travaux ?

– Les proprios s’en vont quand ?

– Dans dix jours, et la société la récupère à la fin du mois,

– Ok je vais y bosser les week-ends, après leur départ j’aurais environ deux semaines, je vais voir, t’en fais pas je vais m’organiser,

– Ok,

– Viens plus près de moi, me dit-il en me prenant moi aussi dans ses bras, ma journée avait mal commencée mais grâce à mes deux chéries je suis le type le plus chanceux du monde, ajouta-t-il en nous embrassant toutes les deux sur le front

Il avait fermé les yeux et nous tenait serrées contre lui. Il avait, disait-il, l’impression que nous étions les seules personnes à le comprendre vraiment, et qu’il n’était jamais aussi heureux que lorsqu’il était avec nous. Au bout d’un moment Akeng descendit jouer parterre. Mais moi il ne me lâcha pas. Il me tenait serré contre lui en me parlant tout bas. Il disait qu’il découvrait la véritable nature des gens et que cela lui faisait peur. Il disait que cela lui manquait l’époque du lycée, en ce temps-là, il avait des amis qui étaient des frères pour lui. Je pense avec du recul que c’est ce sentiment de solitude qui le rendit sensible à l’esprit de corps que lui proposait la confrérie, mais nous n’en sommes pas encore là.

Par crainte de recruter encore un ouvrier malhonnête, le patron de Gora lui proposa de lui verser le salaire de son ancien collègue s’il acceptait de s’occuper des maisons dont ce dernier avait la charge. Il disait qu’à l’allure ou Gora travaillait, il aurait fini un an avant la fin de son contrat alors il préférait le garder occupé jusqu’à la fin de son contrat quitte à prolonger celui-ci. Gora accepta, il lui restait un peu moins d’une année et demi avant la fin de son contrat alors pourquoi ne pas re-signer pour peut-être deux ans de plus, surtout qu’il n’avait rien de mieux en vue. Entre temps son patron s’était mis à me verser « un dédommagement » pour le boulot que je faisais avec ses locataires, il disait que grâce à Gora et moi il pouvait dormir tranquille.

Il faut dire qu’il était partit en voyage dans son pays plus de cinq mois et à son retour entre les comptes et les factures, tout était en ordre. Entre temps mon père s’était marié avec une femme qu’il avait rencontrée lors d’une promenade dominicale en ville. Ils s’entendaient plus que bien tous les deux alors je me sentais rassurée. Mon père avait acheté pour Gora et moi un immense terrain nu à la sortie de la ville. Gora disait qu’on n’avait pas les moyens de bâtir dessus pour le moment surtout à cause de la distance, alors après avoir construit la barrière autour du terrain on décida d’y planter des arbres fruitiers et d’y faire un potager.

Ce cadeau de mon père c’était certainement pour compenser le fait qu’avec sa femme ils vivaient sur le terrain où j’avais mes appartements, Gora me proposa de faire une croix dessus. Malgré ces deux loyers en moins, notre situation financière n’en pâtît pas. Simplement je craignais que lorsque le contrat de Gora se terminerait nous soyons un peu embêtés. A la fin de son premier contrat, Gora ouvrit un compte en banque. Il m’expliqua qu’au moins il pourrait avec le temps avoir la possibilité de prendre un crédit et qu’on aurait notre propre maison bientôt.

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