Lettre de Mathilde à son fils, 10 février 1983
Comme je m’y attendais, les cours de Michel Foucault à Paris sont tout à fait sensationnels. C’est la preuve qu’il ne se dit pas les mêmes choses à Paris qu’en province. J’espère que toi aussi quand tu feras des études, tu auras la chance d’aller à la Sorbonne ou au Panthéon ; tu verras, c’est une autre vie.
Il nous a dit avoir le trac quand il venait nous faire cours. Ça ne se voit pas. C’est moi en revanche qui ai le trac d’aller y assister. Je sens que j’ai le privilège de participer à quelque chose d’unique et de précieux. Le soir à l’hôtel, je recopie les notes que j’ai prises, et c’est comme si je profitais une nouvelle fois de son cours dans le cocon de ma chambre. Je ne prends même pas le temps de manger, je n’en ressens pas le besoin. Je réentends sa voix paternelle et je ne peux pas être plus heureuse. Tu vois qu’il ne faut pas t’inquiéter pour moi. Tout finit toujours par s’arranger.
Je t’embrasse.
Ta maman.
Journal de Maxence, 20 février 1983
Ce week-end avec Maman restera dans les annales ! Dès qu’elle est venue me chercher chez grand-mère, nous avons été louer une voiture car c’était décidé, elle allait me faire découvrir Paris. Le voyage ne m’a pas paru long et je n’ai pas été malade. Nous avons écouté la radio. C’est moi qui changeais quand les chansons ne me plaisaient pas. Nous avons entendu beaucoup de 45 tours que Maman a chez elle : Belfast, Tchoo tchoo (hold on the line), Stay, Let’s all chant, Porque te vas… On a chanté à tue-tête. Il faut dire que nous connaissons absolument toutes les paroles !
Vers 16 heures, nous sommes arrivés à Paris. C’est moi qui décidais où on irait. J’ai d’abord voulu voir la tour Eiffel, et la rue de la Paix à cause du Monopoly bien sûr ; ça ne casse rien. Ensuite, Maman m’a fait découvrir ses quartiers préférés : Saint-Sulpice, La Sorbonne, Saint-Germain. Le soir, elle a voulu me montrer où habitait Michel Foucault. J’ai trouvé que ce serait amusant. On a sonné chez lui, mais il n’a pas ouvert. Maman a voulu entrer quand même. Elle a garé la voiture devant l’entrée du sous-sol de l’immeuble et nous avons attendu que des gens veuillent bien entrer. Au bout d’un moment, un conducteur a fait le code, la porte du garage s’est ouverte ; Maman s’est alors mise derrière le véhicule. Nous avions réussi à entrer dans l’immeuble ! Nous nous sommes garés à une place vide mais Maman ne savait pas comment monter dans l’appartement de Michel (elle l’appelle comme ça, je me suis mis à faire pareil). Elle ne connaissait d’ailleurs pas l’étage. Elle a un peu pleuré et finalement, elle a décidé d’abandonner, en rigolant. Le problème, c’est que nous ne savions pas comment sortir du garage de l’immeuble, où nous étions tout bonnement enfermés.
Le roman (86 pages) a été publié chez L’ire de l’ours en 2022.
Roman version papier disponible en librairie. Version numérique téléchargeable sur les plateformes.
Je ne connaissais pas ce récit, peut-être autobiographique de ce qui semble être une correspondance épistolaire entre une mère et son fils…Un thème que j’apprécie beaucoup.