On peut écrire sur tout, lit-on partout. Je veux bien mais dans mon cas il y a un sujet qui élude ma plume comme mon chat mes caresses. Pourtant, ce n’est pas faute l’aimer. C’est le genre d’activité solitaire dont ne peut parler sans déclencher les sourires en coin et les hochements de têtes, habituellement réservés aux poètes. Malgré ça, quel plaisir de pratiquer ce…cette… cette activité—non ! Ce sport ! Ce sport, n’allez pas vous faire des idées ! Je veux parler de… je fais de la mus… disons que je vais « à la salle. » « La salle ? La salle de bain ? » Non pas celle-là, je veux dire la salle de musculation. Je vais à la salle de musculation. « Ah. » Vous voyez ! Je sens déjà le jugement poindre à travers les nuances de la déception. Mais bien sûr, je ne fais pas qu’y aller. J’y rentre, je m’y déplace et surtout je « pousse de la fonte. » Je la soulève aussi mais je préfère vous épargner les détails, la longueur de votre sourire en dit assez.
Alors voilà le sujet dont je ne peux pas vraiment parler dans mes poèmes. Et comment cela se fait-il ? À vrai dire, il n’y a pas grand-chose à en dire. Tel un Sisyphe masochiste, mon plaisir n’est pas de voir mon leste dévaler la colline mais plutôt de le remonter. Le but est d’en augmenter le poids jusqu’à la limite ultime, que l’on atteint, somme toute, assez vite. On passe donc plus de temps à se mentir qu’autre chose ; mais quelle joie lorsque le mensonge prend effet ! Lorsque l’on arrive à se berner soi-même ! On est balaise.
Je comprends mieux la confidence. C’est une sage décision de ne point en parler ou devrais-je dire ne n’écrire point de jolis poèmes.
Poète et athlète riment certes dans les textes mais au-delà, ils ne font pas vraiment bon ménage ou du moins, qui imaginerait qu’un bodybuildeur puisse nous chuchoter à l’oreille quelques proses ou jolies fables ???
Il faut savoir raison garder … pour rester en compagnie de nos illustres auteurs grecs. Etre capable de se maîtriser voilà qui est admirable Monseigneur !!!
Promis, je resterai muette comme une carpe et moi-même n’écrirai pas une ligne à propos de cette découverte, mieux vaut ne pas se rebeller en confiant nos secrets aux humains, au risque de froisser quelques susceptibilités divines …