LA TENTATION 2010 Fin de saison
Le soleil est encore haut mais la chaleur est moindre, comme un répit, une trêve.
J’ai encore la tête rincée de soleil et de calanques aux bleus sombres et éclatants et aux verts désarmants d’innocence. Mon corps est salé et rassasié de lumière offerte par une petite crique inhospitalière à l’abord, mais généreuse à l’apport ; je sens encore le glissement de la mer sur mon corps nu et la sensation familière du grand bleu sous moi, étrange jouissance volée semblable à un coït impromptu avec une belle endormie.
Ce matin à huit heures j’ai clôturé sans tracas la dernière grosse soirée du Palais Club de Cannes avec un effectif réduit. J’arrive au bout.
Serein, J’ai enfin parcouru la corniche de l’Estérel, cette pure merveille, à moto.
Cool, j’enroule chaque virage avec précision comme un acte d’amour, sans brutalité mais avec insistance, répétition et rythme, le plaisir présent et durable.
Putain ! Que notre planète est belle, ça donne envie de frugalité, rien que nous et Elle, sans intermédiaires, amour et eau fraîche ! Je rêve. Pardonnez-moi !
De retour, je suis assis à la terrasse de mon café préféré au Suquet, le plus vieux quartier de Cannes, petites ruelles et charme de l’habitat instinctif antédiluvien.
Je regarde le spectacle du monde, touristes incongrus aux tenues improbables, défilé de corps inélégants comme seuls sont capables de produire les européens, moches et beaux, grands et petits, fous et sensés ; ils me fascinent et m’animent. Je les aime !
J’échange à la volée quelques « philosophies » avec le propriétaire de l’estaminet, vieux monsieur pétri d’humanité, artiste et poète de la vie.
Nous sommes attirés par cette empathie qui souvent se comporte à l’inverse des pôles d’un aimant, la finesse, le tact et la culture viennent au contact de la brutalité, la franchise et l’action !
Alors, oui, en cette fin d’après-midi, j’ai la tentation de mettre mon sac à terre, de cesser cette farandole endiablée, de me poser. Ici.
Mais, déjà, le souffle de mon âme chasse cette légère faiblesse et me remet en route, en chemin une grappe de tomates écarlates sur un étalage me fait signe.
Tentation.
Je cède.