L’Orbe de Renaissance, Chp III

14 mins

III

Sorn revînt à lui dans une grande inspiration. Le soleil agressa ses yeux et il fallut quelques minutes à ses pupilles pour s’habituer à la diurne clarté. Le sol sous lui était dur et patiné par le temps. Allongé sur le sol, il se mit sur le flanc et se releva légèrement à l’aide de son coude. les coups de la veille encore présents le firent siffler. Une voix caverneuse résonna :
– Te voilà enfin réveillé ! Bois ça, ça va te requinquer.
Une main lui tendit un gobelet crasseux. Sorn ne lutta pas et avala un liquide sans véritable goût, mais affreusement astringent.
– La sensation n’est pas des plus agréables, pas vrai ?! Mais n’ai crainte tu n’en mourras pas.
– Je suis vivant !
– Il semblerait bien. Vous avez eu de la chance que l’on passe par là. Je ne sais même pas comment il est possible que nous vous ayons repéré dans cette nuit d’encre. Ta camarade n’a pas encore ouvert les yeux, mais je ne pense pas qu’elle soit en danger.
– Quel est ce navire ? Êtes-vous le capitaine ?
En disant cela Sorn se rendit compte qu’il était à même le pont, porté par un trois-mâts, une couverture sur le corps. Autour de lui les hommes de la mer s’affairaient pour maintenir la bonne marche du navire. Aucun pavillon ne flottait sur le mât de pavillon. L’homme le dominait de toute sa hauteur :
– Hahaha ! Non je ne suis pas le capitaine ! Je suis Harold Manhoff, prêtre d’Ulif. Et toi comment qu’elle t’a nommé ta mère ?
– Je m’appelle Sorn de Salig.
– Enchanté Sorn de Salig ! Le capitaine souhaite te voir quand tu te sentiras prêt. Si tu as la moindre question n’hésite pas, tu me trouveras dans ma cabine. A plus tard.
La carcasse osseuse qui tournait le dos à Sorn, et s’éloignait, contrastait particulièrement avec son timbre de voix. La tête brouillonne, il se redressa tant bien que mal. Le pont fourmillait, personne ne prenait garde à cette présence étrangère.

Sorn se rendit jusqu’à la cabine du capitaie et frappa à la porte du capitaine. Elle tourna sur ses gonds, tirée par un homme de main. Le capitaine fit signe à son hôte d’entrer et demanda à son obligé de les laisser seuls. Le capitaine n’était pas habillé de manière outrancière ou extravagante, si ce n’est une veste un peu ouvragée. Ce qui le distinguait plus que tout c’était la moustache qu’il arborait, épaisse et blonde. Elle en venait même à dissimuler l’épaisse charpente qui lui servait d’épaule. Le capitaine fit signe à Sorn de prendre place dans un grand fauteuil tapissé de velours rouge, filigrané de clous de tapissier dorés. Tandis que ce dernier s’exécutait, le capitaine servit deux verres de liqueur et les disposa sur le bureau qui les séparaient, entre cartes et compas :
– C’est un cliché, je le sais bien, mais il est tellement plus plaisant de discuter autour d’un objet neutre et d’un plaisir partagé.
– Je suis….
– Tututut, laisse moi finir. Je suis le Capitaine Knir, et ce vaisseau est le Verlavant. Voici comment se passe les choses ici : deviens un pirate, et tu auras la richesse, une maison et une famille ; refuse, et nous t’abandonnons sur la prochaine île déserte. Qu’en dis-tu ?
– Je suis en plein examen de chevalerie, alors je n’ai pas vraiment le temps pour devenir un pirate. Sans vouloir vous offenser bien sûr, dit-il la gorge serrée.
– Peut m’importe. Si tu veux être un chevalier, alors tu deviendras un chevalier des mers avec nous ou rien du tout.
– Être un pirate n’est pas exactement être un chevalier. Sans vouloir vous offenser, votre réputation est comment dire… différente, proposa Sorn.
– Et quelle réputation avons nous ?
– Comment dire…
– N’hésite pas.
– Et bien vous êtes vu comme des bandits violents, alors que les chevaliers…
– Ils sauvent le monde ?
– Oui, voilà.
– Je vois. Alors tu dois savoir que nous ne sommes pas les bandits que l’on veut faire croire. Nous ne nous attaquons qu’aux vaisseaux qui battent le pavillon des nations esclavagistes. Combattre pour nous ferait de toi un justicier.
– Oui mais je dois …
– Peut importe ce que ton passé t’oblige à faire, ici commence une nouvelle vie pour toi. Et pour ton amie.
– Ela ! Elle m’était sortie de la tête. Est-ce que je peux la voir ?
– Bien entendu. Tu la trouveras dans la cabine sous la mienne. On ne laisse pas une dame sur le pont avec des hommes qui manquent de compagnie.
– Merci capitaine. Je vais la voir de ce pas !
– Fini ton verre avant de partir. Je me sentirai insulté si tu n’y touche pas. Tu ne veux pas que je me sente insulté, pas vrai ?
– Non capitaine !
Le verre alluma un feu de forêt dans sa gorge. Chaque respiration ravivait les flammes éthyliques. Son visage rubicond fît sourire la moustache de Knir. Il se leva, et se rassit pour se remettre du coup. La porte fût difficile à tirer, mais il s’en sorti tout de même. Knir l’arrêta :
– Es-tu des nôtres ?
– Je crois capitaine.
– Il me faudra plus que ça pour que tu ne sois pas débarqué sur le prochain caillou. Tu as jusque demain. Envoie moi ta dame lorsque tu la verras.
– Bien capitaine.
Sorn parvint à la cabine de Ela. L’alcool lui fît oublier ses bonnes manières et il entra sans s’annoncer. Ela, à qui l’on avait remis des habits secs (luxe auquel Sorn n’avait pas eu le droit) , était à demi-nue lorsque l’importun pénétra dans la pièce. Une envolée d’objet divers et variés obligea Sorn à fuir et à attendre que la dame ait fini son affaire. La pièce de bois bascula de nouveau, et un regard d’assassin fît office d’accueil :
– Entre ne te gêne pas !
– Merci, et désolé.
Alors qu’il la dépassait, une gifle caressa son cuir chevelu sans crier gare.
– La prochaine fois je te découpe, entendu ?
– Il n’y aura pas de prochaine fois. Sois-en assurée ! Le capitaine souhaite te voir.
– Tu sais ce qu’il me veut ?, dit-elle en enfilant ses chaussures;
– Sans doute la même chose qu’à moi.
– Plus explicitement ?
– Faire de toi sa nouvelle recrue. C’est ça où l’île déserte apparemment.
– Ton examen dans tout ça ?
– Il n’a pas voulu m’écouter. On doit trouver un moyen de prendre le large. J’ai un examen qui m’attend.
– On ? Qui te dit que je veux partir d’ici ?
– Je ne peux pas laisser une femme seule ici ! Ce serait insensé !
– Ce qui est insensé c’est de penser que je suis en détresse. Je vais voir le capitaine et ce qu’il propose, dit-elle en se dirigeant vers la sortie. Peut-être que ce sera plus excitant que de courir après une boule magique. On se voit plus tard. Au fait, si tu te demandes, ma tête va plutôt pas mal, même si j’ai un oeuf de la taille d’un poing.

Sorn était sur le pont. Une pierre de grès entre les mains, il était embauché pour le briquer. “Et que ça brille”, lui avait dit Canenbois (qui avait toujours ses deux jambes, mais à qui il manquait une dent sur trois). Sorn joua avec la pierre de grès fin, et soupira puis finit par se mettre à la tâche. Il briquait le pont depuis un bon moment quand un bruit de porte qui claque le sorti de sa torpeur. Ela déboula comme une furie, le visage déformé par la colère :
– On part dès que possible !
– Pourquoi ça ?
– Ce type m’a fait des avances !
– Qu’est-ce qu’il t’a avancé ?, demanda ingénument Sorn.
– Tu es vraiment naïf, tu le sais ? Il m’a demandé de coucher avec lui andouille !
– Je vois. Et donc ?
– J’ai refusé, bien entendu. Tu me prends pour qui ? Et pour me punir, il m’envoie en cuisine avec le Coq. Je vais lui en éplucher des tubercules moi !
C’est une furie qui entra dans les entrailles du Verlavant. Sorn était content il ne laisserait pas une femme dans un environnement aussi dangereux.

Sa corvée terminé et son repas avalé (les tubercules avaient été bien épluchées), Sorn rendit visite à Harold. Ce dernier lui avait aussi demandé une entrevue. Il toqua à la porte et la voie caverneuse lui intima d’entrer :
– Entre donc !
– Vous vouliez me voir monsieur ?
– Appelle moi Harold. Fais comme chez toi !
La cabine de Harold n’était pas très grande, sa couchette était défaite. Des fragments de cristaux prenait place sur des étagères de fortune. Une petite table souligné d’un tabouret rustique était collée au mur. De vieux livres, et des parchemins s’empilaient sur la table, à côté d’un encrier et d’une lampe à huile. Un petit hublot donnait sur la mer. Un nouveau verre fût servit, et Sorn n’eut pas vraiment d’alternative que de le prendre. Harold entama la conversation tout en tirant sur sa pipe :
– Alors comment se passent les premiers instants sur le vieux rafiot ?
– Pour tout dire, je préférerais être ailleurs.
– Et où ça dit moi ?
Sorn s’expliqua de nouveau, de l’examen de chevalerie jusqu’au poisson.
– Je passerai l’épisode du poisson. Parfois les choses ne sont qu’affaires de stupidités. Le Père aurait donc décidé de réveiller le Grand Dragon de Feu avec l’Orbe. En voilà une histoire ! Si cela venait à se produire, il y en a plus d’un qui aurait des ennuis. C’est tout de même étrange que cet homme ait d’un coup des velléités belliqueuses, lui qui est reconnu pour être un pacifiste. Enfin, ta mission est mal engagée en tout cas, tu es un pirate à présent, à moins que tu n’ai décidé de rejeter l’offre du capitaine, résuma t-il en s’allumant une pipe odorante.
– Non, je vais accepter, mais je vais tout de même devoir fuir ce navire.
– Hopopop ! Je n’ai absolument rien entendu. Et maintenant, je voudrais que tu me laisses, j’ai pas mal à faire, coupa t-il.
En disant cela, il désigna les écrits qui patientaient.
– C’est tout ce que vous vouliez savoir ?
– C’est déjà pas mal non ?
– Bon , très bien. Avant de partir, je peux vous demander quelque chose ?
– Vas-y, mais sois bref, dit-il d’un ton comminatoire.
– Pourquoi est-ce que vous êtes devenu un pirate, je veux dire vous n’avez pas l’air d’en être un ?
– Tout d’abord, aucun d’entre eux n’était marin ou pirate auparavant. Ils le sont tous devenus par la force des choses, et comme eux, je ne l’ai pas choisi. J’étais un passager de ce bateau. Un jour, les esclaves en soute se sont rebellés et ils ont récupéré le navire devenant dans le même temps les pirates qu’ils sont aujourd’hui. Le bateau a été armé et renommé et nous voici. Lors de la rébellion, tout les marins ainsi que les quelques passagers ont été massacré. Ils m’ont fait une fleur parce que je sais traduire les vieilles écritures. Certains livres de l’ancien capitaine parle de trésors, et d’objets légendaires. À moi de déchiffrer tout ça , et si possible de les localiser si je veux continuer à faire parti de l’équipage.
– Vous saviez que des esclaves se trouvait à bord ?
– Oui, je le savais. Je n’ai pour seule excuse que le fait qu’il me fallait absolument partir. Allons, je crois qu’il est temps pour nous de nous quitter. Je te souhaite une bonne nuit Sorn.
– Bonne nuit Harold.
Alors que Sorn se levait, la voix caverneuse se remit à parler tout en regardant son travail en cours :
– Moi si je devais m’évader, j’attendrais le prochain ravitaillement…

Sorn-le-mousse n’avait pas sommeil. Sur le gaillard d’avant, accoudé au bastingage, il tentait d’observer l’horizon au fond de la nuit noire. Une lampe à huile se rapprocha de lui. Ela venait le rejoindre. Elle s’installa à côté de lui et imita son compagnon d’infortune. Le silence les enveloppa, laissant le clapot des vagues sur la coque continuer son monologue. Après un long silence introspectif, Ela pris la parole :
– Alors, une idée pour leur fausser compagnie ?
– Harold m’a suggéré de profiter du prochain ravitaillement.
– Tu parles du prêtre d’Ulif qui était à table avec nous ?
– Oui.
– Je suis étonnée de le voir ici, normalement, ils ne sortent pas de leur temple. Toujours est-il que j’ai aussi pensé au prochain ravitaillement, mais c’est dans plus d’un mois. C’est loin des quelques jours qu’est censé prendre la traversée vers Dranac…
– Un mois ! C’est beaucoup de temps perdu…
– Il va falloir prendre son mal en patience.
– On ne retrouvera pas l’Orbe et je ne serai jamais chevalier si ça continue comme ça.
– C’est fort probable ! Réfléchit à un plan fuite, et on en reparle demain. Bonne nuit.
Ela repris la lampe qu’elle avait déposée à même le sol, et retourna vers son placard de cabine. Sorn, lui, resta là à broyer du noir.

Cela faisait une semaine que Sorn avait affirmé vouloir être un pirate et une semaine qu’il astiquait le bateau sous tous les angles. Cela lui évitait de penser au temps qui s’écoulait sans pouvoir agir. De mémoire de pirate, jamais un navire n’avait été aussi étincelant. La brique était de nouveau de sortie, alors qu’il voguait non loin des cailloux de l’archipel de la Baline, et c’est à ce moment-là que le nid d’oiseau se fît entendre:
– Bateau en vue ! Pavillon esclavagiste à une heure !
Tout les marins se précipitèrent pour regarder au loin, la main en visière. Knir sortit de sa cabine, déplia sa longue vue et confirma l’information. Il grimpa sur un tas de caisse en bois et réuni tout le monde autour de lui :
– Messieurs, c’est l’heure du vote. Un bateau de ces chiens d’esclavagiste est à notre portée. La question, vous la connaissez : aborderons nous ce navire ? Ceux qui sont pour, merci de lever la main.
Toutes les mains se levèrent, Sorn leva timidement la sienne, de peur d’être en porte à faux avec le capitaine. Ela avait la main levée. Elle avait hâte d’en découdre et d’évacuer la frustration des tubercules.
– Je vois que tout le monde est d’accord, même les nouvelles recrues ! J’aime voir ça ! Dans ce cas, A L’ABORDAGE !, harangua Knir.
Un patchwork de voix sauvages répondit à ces mots.
– Rappelez vous, pas de mort, pas de blessé. Un équipage en bon état est un équipage qui vaut cher. Si esclave il y a nous leur offrirons la liberté. Et si l’équipage nous offre la moindre résistance, alors pas de quartier. Messieurs, allons récupérer ce navire !
Il leva son sabre, et les pirates répondirent tous d’une même voie ; déterminée, volontaire, bruyante.
Le capitaine prit la barre et changea brusquement de cap. Les hommes préparèrent les canons, tandis que d’autres s’attelaient à manœuvrer la voilure. Comme si il voulait se battre lui aussi, le Verlavant pris de la vitesse, et gagna rapidement du terrain sur le navire ennemi. Le pavillon rouge fût élevé. La victime fît elle aussi gonfler ses voiles, espérant que les attaquants perdent du terrain et abandonnent la poursuite. Knir n’abandonna pas, au contraire. Cette once de résistance lui fît plaisir, inondant son corps d’adrénaline. Parfois, récupérer un bateau était trop facile à son goût, car pour s’assurer la vie sauve, les équipages préféraient souvent la capture au combat. La poursuite guida les navires droit sur une zone de haut-fond. Apercevant la menace, le premier abaissa ses voiles, et agita pavillon blanc. L’excitation avait fait place à la déception dans le système cérébral de Knir. Une course dans les haut-fonds l’aurait mis en joie, mais la proie en avait décidé autrement. Les deux bateaux étaient à présent côte à côte, les pirates avaient pris possession du navire marchand. Les marchandises étaient inventoriées. Aucun signe d’esclave. Le butin était composé de sucre, d’épice et d’un peu d’or. Un sourire se dessina légèrement sous la moustache du capitaine, une bonne cargaison et un équipage, voilà qui ferait une somme rondelette.

Le Verlavant escorta l’Epervier jusqu’à l’Ile de la Tortue, presqu’île sans loi où, selon la formule, tout se vend et tout s’achète. Une demande de rançon venait d’être envoyé à l’armateur du navire marchand, et la marchandise se déplaçait d’étals en échoppe affrontant de féroces négociations. Ela et Sorn étaient eux, assignés à résidence. Knir n’avait pas encore confiance en leur serment. Dans la cabine de Ela, la place n’abondait pas mais Sorn creusait tout de même des tranchées. Le coup de l’envie pressante pour s’évader n’avait pas obtenu le succès escompté (c’était pourtant une astuce du Code). Il ne voyait pas comment sortir d’ici et il voyait son bel avenir fuir avec le temps qui passe. Il y eu du bruit aux abords de la cabine, un coup sourd et la porte s’ouvrit en grand. Un encapuchonnée fît signe aux apprentis pirates de le suivre, ce qu’ils ne manquèrent pas de faire. L’homme qui gardait la porte était allongé au sol, inconscient. Sur le pont tout était calme et ils purent descendre sur le quai sans encombres. L’ombre avançait droit devant sans se retourner si bien qu’il leur étaient parfois difficile de ne pas la perdre. Puis elle entra dans une boutique et disparue. Le marchand les incita à passer derrière un paravent. Une fois derrière celui-ci, le marchand déplaça un tapis, dévoilant une trappe dans le sol dévoilant elle-même une échelle. Au bout de cette suite d’échelons, un tunnel éclairé au flambeau et au bout de ce tunnel, une salle ronde éclairée avec des lampes à huile. Au milieu de la pièce trônait une table carrée où deux hommes attendaient. Le premier était debout et se tenait à la droite du second qui était assis. La capuche du premier était tombée et dévoilait un visage arborant un nez aquilin inconnu au bataillon. Le second lui souriait, tirant les traits de sa mâchoire osseuse. Harold était content de son petit effet.
– Prenez place ! Izir, tu peux nous laisser à présent. Ton argent t’attends auprès du Marchand.
Izir ne se fît pas prier pour emmener son nez aquilin loin d’ici et tout le monde pris place autour du meuble sur pied. Harold se mit à rire. La salle trembla sous cette soudaine exclamation.
– Je connais un capitaine qui ne va pas s’en remettre !
– Ça c’est de l’évasion !, exulta Sorn. Merci Harold, je vais pouvoir reprendre le cours de ma mission !
– Attends Sorn. Ne t’emballes pas. Ce genre de service n’est jamais gratuit, tempera Ela. Qu’est-ce que tu veux en échange Harold ?
– Rien de bien compliqué. Je veux faire partie de cette quête.
– Donc tu veux nous suivre ?, résuma Ela.
– Oui.
– Et pourquoi ça ?, interrogea Ela.
– Je suis un prêtre d’Ulif. L’Orbe est un objet de légende pour mon ordre. En mettant la main dessus, j’entrerais dans l’Histoire.
– Qu’est ce que tu pourrais bien nous apporter ?, poursuivit Ela.
– Je suis intimement persuadé que mon savoir sera utile à la compagnie, notamment pour les recherches à Colver.
– Moi je suis pour, déclara Sorn. C’est toujours bien d’avoir quelqu’un qui sait des trucs avec soi.
– Moi j’ai encore une requête avant d’accepter : tu es un prête d’Ulif, on est d’accord, ? relança Ela.
– Nous sommes d’accord, acquiesça Harold.
– Tu dois donc savoir spécialiser les armes, je me trompe ?
– Exact. Si c’est une arme spécialisée que tu désires en échange de ma présence, je n’y vois pas d’inconvénient. Sorn aura le droit à la sienne aussi.
– Dans ce cas, nous avons un accord.
Ela tendit la main à Harold et le marché fût scellé. Sorn imaginait déjà posséder une épée de feu, luisante et indomptable, qui inspirerait la peur dans les cœurs ennemis.

Le but du jeu pour le nouveau trio était de quitter le marché, sans attirer l’attention. Harold avait déjà un stratagème était déjà bien établi, et il guettait le retour du Marchand. Ce dernier ne tarda pas et leur annonça que la voie était libre. Il les informa aussi que des hommes étaient passés et avaient questionné à leur propos. Le plan de Harold tenait dans un vieux coffre plein de vieilles nippes. Il entreprit de grimer chacun d’entre eux. Il n’eut aucun mal a transformer Ela en homme tant son corps était filiforme. Un chapeau à bord long cachait son visage, et une veste un peu grande modifiait sa corpulence. Sorn eut le droit à une robe de bure. Elle grattait et sentait le crin de cheval. Harold lui se mua en un extravagant commerçant tout en turban. Il énonça son plan :
– Nous allons sortir chacun notre tour. Vous prendrez plein Est jusqu’à la sortie de la ville. Vous allez y trouver un pont, vous ne pouvez pas vous tromper, il n’y a qu’une route. Le point de rendez-vous est au pied de ce pont. C’est bon pour tout le monde ?
Ela hocha de la tête, Sorn fît pouce en l’air et ils retrouvèrent la surface l’un après l’autre. Sorn sortit de l’échoppe en se demandant par où était l’Est. Il épiait les moindres mouvements autour de lui, en espérant ne pas croiser de regards familiers. Il visualisait vaguement la direction de l’Est, mais il ne parvenait pas à se décider. Où aller ? Désorienté, il pris le parti de demander son chemin à un passant à l’arrêt. L’homme se retourna et un sourire partiellement édenté salua le jeune imprudent. Les yeux de Canenbois brillaient de triomphe. Il toucherait la prime du limier pour avoir débusqué le gibier. Ses bras tentèrent de ceinturer Sorn, mais ils se fermèrent sur le vide. Sorn se mit à courir aussi vite que possible. Il lança tout ce qui lui passait sous la main pour ralentir son épais poursuivant : marchandise, étal, passant, rien n’y personne n’était épargné. La robe de bure le gênait pour cavaler, et le pirate gagnait du terrain. Sorn profita d’un troupeau humain stagnant à l’angle d’une rue pour se dissimuler en son sein. Canenbois déboula peu après sur le carrefour, sa tête tournait furieusement de tout côté, ses yeux épousant l’éventail des possibilités, cherchant par où sa proie était le plus probablement passé. Le fuyard ne perdait pas une miette de la scène, son instinct de survie lui interdisait de bouger. La sueur coulait sur son front et ses tempes. Il cherchait à contrôler sa respiration, et dans le même temps son rythme cardiaque. Le groupe de personnes le dissimulant ne bougeait pas, chaque membre occupé à papoter avec son voisin immédiat. Canenbois lança un regard perçant en direction du groupe. Sorn eût l’impression d’être transpercé, le temps ne s’égrainait plus . Le pirate fît quelques pas dans sa direction, mais il fût stopper dans son mouvement par un autre pirate et il s’élança à l’opposé avec son acolyte. Le temps reprit sa routine, Sorn respirait de nouveau, et il se rendit compte de son propre taux d’humidité. D’un revers de manche il s’épongea, puis il prit connaissance de son environnement. Il ne savait pas où il se trouvait par rapport à la sortie de la ville. Malgré les risques, il se renseigna de nouveau, et on lui désigna la direction qu’avait pris son poursuivant. Il s’engagea alors dans le sillage de Canenbois avec une appréhension palpable. La tête basse, enfoncée dans sa capuche, Sorn rasait les murs. Le pont se dessinait petit à petit au loin. L’urgence d’y arriver força Sorn à accélérer le pas. Son allure tendait à la course alors qu’il touchait au but, mais une force l’attira dans une ruelle étroite. Sorn n’eut pas le loisir de hurler car une paume de main lui écrasait vigoureusement les lèvres, en lui demandant de se taire. La main relâcha son étreinte. Sorn fît volte face, Ela était là, et Harold juste derrière.
– Les pirates filtrent tout ce qui passe sur ce pont. Je me doutais que cela risquait d’arriver.
– Comment allons rejoindre le continent alors ?, demanda Ela.
– Pas d’inquiétude, je comptais de toute manière sur la Souterraine pour sortir d’ici, expliqua Harold.
– La Souterraine ?, Interrogea Sorn
– C’est le nom du réseau de tunnel courant sous Tortue, expliqua Harold.
– Pas d’autres moyen ? demanda Ela. Parce qu’être enfermée sous terre, je ne trouve pas ça hyper rassurant.
– Si tu veux ton arme enchantée, c’est sous terre que nous devons aller.
– Et sous terre nous irons ! déclara solennellement Ela.
– Moi, tant que ça me fait avancer dans mon examen… se résigna Sorn.
Au fond d’une ruelle miteuse, et sous l’oeil des ombres, les trois compagnons descendirent un escalier dérobé qui les mena droit au réseau tunnelier de l’île de la Tortue.

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