CHAP.15 / 01: Le téléphone providentiel

6 mins

      Le repos de cette nuit avait été salvateur, sûrement une des meilleures depuis la cata. Pour me dérouiller les articulations, je jouais quelques instants à la balle avec les enfants du foyer. Vanessa aidait Elvige à passer du café moulu et de l’eau bouillante à travers un linge dans un bocal faisant office de cafetière. Voici un acte simple de tous les jours qui était devenu une galère à réaliser aujourd’hui. On se brûlait les doigts, on en mettait plus parterre que dans la tasse. Des grains non filtrés rendaient le liquide sableux sous la langue. Un coup, la texture du café pouvait être sensiblement équivalent à du mare (à l’italienne) ou un autre coup, elle était quasi translucide, ce que l’on appelait plus communément ; un jus de chaussette (à l’américaine). Fred et Fab finissaient de rouler leur duvet et les ranger dans leur sac à dos, avant de venir échanger quelques passes avec les enfants. Quand le café fut prêt, selon l’estimation des femmes, mes amis en ingurgitèrent un petit gobelet. N’étant pas amateur du liquide noir, je me contentai d’une gorgée d’eau minérale. Le temps s’était encore rafraîchi. Nous fermions jusqu’en haut du col, la fermeture éclair de nos polaires, durement acquis au Decathlon®. Malheureusement, nous n’avions pas trouvé de gants à cette saison de l’année. Voilà encore quelque chose à ajouter à notre liste de course du bon survivant. Robert revint à son domicile de fortune accompagné des invités de la soirée d’hier.

— Cette nuit vous a-t-elle apporté de bons conseil pour votre projet ? Demanda le responsable politique.

— Pas du tout, avouai-je. J’ai dormi comme une souche sans discontinuité.

— Nous n’avons pas pris le temps de nous concerter, dit Fred.

— Oh, vous voulez peut-être que l’on vous laisse encore un peu de temps entre vous ? Proposa Robert.

— Non, non, pas la peine, notre décision était déjà prise hier soir.

— Ouais, Mic est un mec précoce. Pas dans tous les domaines, j’espère, se moqua Vanessa.

— Merci Vaness’. Notre objectif principal d’un point de vue géographique est l’épicentre de la cata ; Place de la Concorde. Boulogne-Billancourt est sur notre chemin et juste à côté. Nous allons passer par votre mairie, pour voir si par une incroyable chance nous trouvons votre téléphone.

— Bien, c’est ce que nous attendions, dit monsieur le maire. C’est pour cela que je vous propose l’aide de Kylian, mon plus jeune conseiller municipal.

— Et votre seul collaborateur survivant, précisa Kylian.

— Oui, peut-être. Enfin bref, il vous guidera jusqu’à l’hôtel de ville et saura se repérer dans les décombres et il sait à quoi ressemble le téléphone.

— Merci beaucoup Kylian. Nous acceptons avec plaisir votre coup de main, dis-je.

— Vous n’avez pas trop le choix jeune homme. Si découverte du portable il y a et que sa réparation est possible, mon statut de maire est prioritaire pour lancer une communication. Et je suis le seul à avoir le code d’accès.

— Hum, sachez que nous ne reviendrons pas sur nos pas si nous le trouvons, fit remarquer Vanessa. Nous irons d’abord jusqu’à notre objectif avant de repasser vous voir.

— Dans ce cas, Kylian reviendra seul pendant que vous poursuivrez votre route.

Je pris discrètement la main de Vanessa pour l’adjurer de ne pas répondre. Miracle, cela marcha.

« Mince, faudra que l’on trouve un moyen de lancer l’appel sur place sans l’accord de ce type » pensai-je.

— Pas de problème, monsieur le maire.

— Très bien ! nous sommes ravis de votre coopération.

— Nous sommes venus ici pour cela, pour apporter notre aide à notre communauté nationale.

Vanessa peina à cacher une grimace désabusée.

Après quelques encouragements et salutations nous nous mîmes en route avec notre nouveau compagnon de marche temporaire, Kylian. L’air était frais, mais un magnifique ciel bleu sans aucun nuage dominait la capitale. Nous sortîmes du tunnel et aussitôt, nous quittâmes l’autoroute vers l’avenue du Palais. Nous repassâmes sous l’autoroute pour arriver au bord de la seine. Heureusement le pont de Saint-Cloud enjambant le fleuve était bien sur ses piliers. Nous empruntâmes l’édifice. Les péniches accostées en bordure avaient été renversées. Certaines avaient en partie coulée ne laissant apparaître que leur proue. D’autres avaient été retourné complètement ne montrant que leur coque à fond plat. Toutes n’avaient pas subi le même sort, enfin presque, puisqu’une seule dans mon champ de vision flottait dans le bon sens. Sa poupe avait percé un sillon de deux ou trois mètres dans la berge. Cela l’avait immobilisé au sec depuis tout ce temps. Je me demandais si des gens y avaient trouvé refuge. Cela aurait pu être mon cas. J’enregistrai sa position dans un coin de ma tête au cas où. Je signalai la péniche d’un geste du doigt à mes acolytes. Le pont débouchait directement dans la commune de Boulogne-Billancourt. Nous croisâmes les premiers habitants déambulant dans les rues. Dans la continuité après cent mètres nous accédâmes au large rond-point Rhin et Danubes. La végétation bien structurée et taillée sur le sens giratoire était devenue une forêt vierge. Cette grande place ne s’était pas transformée en camp de réfugiés mais en une espèce de grand marché, avec ses stands bricolés et leurs maigres marchandises à troquer. Deux boutiques attiraient particulièrement la foule. Une devait fournir du pain et l’autre de l’eau potable. Les files d’attentes s’étiraient sur plusieurs dizaines de mètres. A certains endroits de la queue, il y avait des points de frictions entre survivants affamés ou déshydratés, impatients d’atteindre le comptoir du stand. Mais pour la grande majorité, l’attente se faisait dans le calme, les gens étant diminués, affaiblis et blasés par leurs conditions misérables. Kylian menant notre groupe pris la grande artère ; l’avenue André Morizet. La mairie se situait tout droit pile un kilomètre plus loin. Le spectacle de désolation n’était guère différent à celui que l’on avait connu à Mantes ce qui nous surpris au plus haut point. Étant plus proche de l’épicentre, nous pensions découvrir des dégâts bien plus important que chez nous. C’est comme si la puissance de la vague de destruction avait été constante, sans s’essouffler sur des centaines de kilomètres. Quelle était cette arme pouvant provoquer ce genre de dévastation régulière. Nous dépassâmes un autobus de la RATP planté au milieu de la voie sur ces gentes dénudées de ces pneus. Plusieurs familles avaient élu domicile à l’intérieur. Un petit salon de jardin avait été installé sur le toit de l’engin occupé par des hommes assis dans des chaises longues raboutées. A la porte côté conducteur, un homme en gardait l’entrée, armé d’un fusil à pompe. La vue d’une arme à feu me faisait toujours une sensation bizarre, de peur sûrement. Je regardai instantanément le sac à dos de Vanessa qui marchait juste devant moi en songeant à l’outil de mort qu’elle transportait. Mon amie jeta un regard méfiant à l’homme armé, surveillant le moindre de ses gestes. Pour apaiser la tension, je saluai le garde du bus d’un geste de la main et d’un sourire forcé. A l’approche de la mairie, la population survivante se faisait plus dense. Le moindre carré de terre, accueillant souvent une souche d’arbre, aux bords de l’avenue, était exploité en potager et jalousement gardé par des hommes et femmes armés pour la plupart de couteaux et d’instruments de jardinerie, entourés par des barrières et autres palettes de bois. Nous avions parcouru la moitié du chemin sur cette avenue nous menant à la mairie. Nous traversâmes une portion résidentielle composée d’une série d’immeubles de pas plus de cinq étages à l’origine.

Enfin, nous arrivâmes devant l’hôtel de ville, un édifice imposant en béton armé, d’allure solide, sans fioriture, à la façade lisse percée de hautes fenêtres. Le bâtiment ressemblait plus à une usine qu’à un monument administratif. Seule le fronton en rotonde au son centre rappelait la fonction du bâtiment avec l’inscription « HOTEL DE VILLE ».

— Elle ne m’a pas l’air trop endommagé, jugea Fab. Voire même conçu pour affronter les éléments.

— C’était la volonté de l’homme qui l’a fait construit dans les années 20, le maire de l’époque qui porte le nom de cette avenue, exposa notre guide Kylian.

— Très intéressant le court d’histoire. On rentre maintenant, s’impatienta Vanessa.

Nous ne rentrâmes pas par le hall principal. Kylian nous fit contourner le bâtiment pour accéder par une entrée au plus proche du bureau du maire. Nous pénétrâmes par une porte de service à l’arrière du second bloc du bâtiment. Malgré la bonne impression générale de l’intégrité de l’édifice vue de l’extérieur, à l’intérieur on s’aperçut que les dégâts étaient plus visibles. La plupart des faux-plafonds s’était effondré au sol. Les gaines du réseau de climatisation pendouillaient dans tous les couloirs et toutes les pièces. La majorité des fenêtres avaient explosé parsemant à leur base des plages d’éclats de verre. Des revêtements muraux et des parois en placoplatre brisés jonchaient les sols, rendant notre progression difficile. C’était imperceptible, mais l’édifice avait souffert d’un choc de structure générale. Cela avait pour conséquence ; des portes bloquées par leur chambranle, des marches d’escalier manquantes, des crevasses dans les sols, des carreaux de carrelage et des lattes de parquet décollés et projetés dans tous les coins dans un désordre le plus complet. La plupart des panneaux d’affichage et de communication n’avait plus leur place sur les murs. Des milliers de documents papier piétinés et souillés parsemaient les sols.

— Ça va Kylian ? Tu t’y retrouves ? Demandai-je.

— C’est vrai que tout ce désordre modifie nos repères, mais ça va je sais où on est et où on va.

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3 Commentaires
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DeJavel O.
2 années il y a

Donc on se réveille le matin, on se rend à l’hôtel de ville et Kyllian reconnaît les lieux. Ok on continue !

DeJavel O.
2 années il y a

Je refais un commentaire, parce que je trouvais que je n’avais finalement rien dit de bien constructif.

Voici mon point :

Il y a quatre buts possibles à un chapitre :

Gagner
Prévenir (empêcher)
Éviter (ou s’échapper)
Trouver

Donc ma question est : Selon toi, quel but a été atteint dans ce chapitre ?

Si on ne peut pas répondre spontanément à la question, c’est qu’il manque quelque chose ou que la scène est inutile.

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