Vendredi, 23 Janvier, 1883
C’est avec hésitation et crainte que j’écris je lève ma plume afin de vous adresser cette lettre, chère Madame la Comtesse. Mon nom ne vous paraîtra guère familier, j’en ai peur.
Par contre, je n’oublierai jamais le vôtre, comme je ne pourrai jamais oublier votre beauté grâce et votre beauté. Votre démarche élégante à vos yeux votre regard intense. Votre présence qui avait réussi à m’accabler de loin, comme de près.
Pourtant, vous étiez sur le balcon à discuter avec vos invités, accompagnée, bien sûr, de ce salopard de première votre époux ; Monsieur le Comte. Et moi, je n’étais que dans la cour à vous contempler.
Que vous a-t-il charmé pour accepter de vous donner marier à lui ?
Qu’a-t-il que je n’ai pas ?
Que vous a-t-il offert que je ne puis vous offrir ?
Peut-être parce que suis-je un noble issu d’une lignée pauvre ?
Ou parce que suis-je bien trop passionné à l’idée de vous rendre mienne ?
Sachez, Madame la Comtesse, que je ne regrette pas mon acte de ce soir-là, mais comprenez que l’idée de vous savoir près de moi m’avait rendu fou.
Je voulais vous frôler. Toucher cette peau crème et douce m’avait subitement ouvert les yeux sur un point : l’homme que vous appelez « mari » n’est qu’usurpation.
Je devrais être à sa place !
Je devrais vous saluer chaque matin et chaque soir d’un baiser tendre et amoureux !
Je devrais vous donner l’amour que vous ne recevez pas !
Ne me mentez contredisez point ! J’ai vu à vos yeux, que votre amour était à sens unique. J’ai vu à votre sourire que vous ne ressentez aucune joie et aucun bonheur à vous présenter en tant que femme qu’épouse de ce charlatan cet homme. Mal aimé une femme telle que vous est un crime que je ne pardonnerai jamais !
Observer la manière dont vos yeux pétillent lorsqu’il vous effleure la peau de votre cou chuchote à votre oreille, m’a fait craquer. Oui, je l’admets, ma jalousie m’a poussé à le frapper et à défigurer son visage de fils de catin…
En effet, il joue l’homme parfait et aimant devant ses invités, mais juste derrière votre dos, il se laisse bercer par l’adultère et l’infidélité !
Quel homme sans scrupule !
Marié et pourtant profite toujours des jeunes filles célibataires !
Honte à lui !
Madame la Comtesse, pardonnez mon affront, mais il ne vous mérite pas.
Alors, sachant cela, pourriez-vous me laisser une nouvelle chance ? Je vous montrerai ma véritable personne et prouverai que mon amour pour vous est loin d’être une idylle d’un jeune homme de vingt ans.
Je vous aime et vous aimerai tout au long de ma pitoyable vie.
Je vous attendrai sur le quai demain, à seize heures tapantes.
Si vous éprouvez un quelconque sentiment à mon égard, je vous prie de bien vouloir m’y retrouver.
Une lettre façon caviardage !