Mon cœur battait ardemment pour toi autrefois, mes yeux croisaient les tiens avec délice et nos rires envahissaient l’air, ne devenant qu’une seule et même chanson de bonheur. Nous étions heureux, et j’ai laissé ce sentiment, pourtant si puissant, tomber dans les abysses profondes de l’oubli et de la haine. Nos cœurs se sont séparés et les rires qui jadis, ensorcelaient l’atmosphère, se sont éteints.
J’ai rejeté la faute sur toi. Je me suis persuadée que si j’avais cassé ce lien si fort qui nous unissait avant, c’était de ta faute. Les insultes ont été nombreuses et cruelles. J’ai été acerbe et aigre envers toi. Ta simple pensée me répugnait violemment et je luttais pour ne pas éprouver une once de pitié ou de compassion à ton égard. Mais je n’avais rien compris en réalité.
Mais, bien après, ton regard a croisé le mien alors que nous étions simplement assis, sur des chaises en bois, muets. Je connaissais ces yeux. Je les avais déjà vus et je ne pensais jamais pouvoir les revoir un jour, particulièrement chez toi. Comme à mon habitude, j’ai tout d’abord repoussé ta présence. Mais je me suis interrogée et ai remis toute notre histoire en question.
Je comprends désormais. Ce que je t’ai fait vivre. Ce que tu as enduré par ma simple faute.
Stupide étais-je de rompre, non pour manque de sentiments à ton égard, mais pour mon image sociale. Je savais parfaitement ce que vivait mon cœur et ce qu’il souhaitait faire, mais j’ai mis ma fierté en avant et ai cassé ce lien d’autrefois. J’espérai que tout s’arrangerait par la suite mais j’ai été incapable de m’expliquer. Je me disais qu’au fond, c’était ma punition, un châtiment que je méritais amplement. Je t’ai laissé tomber, je ne m’en pardonne pas, et ne le ferai sûrement jamais.
Revenons à ce regard que nous avons échangé, que je puisse encore me délecter de cette image.
Mon cœur s’est mis à battre comme si il reprenait souffle après une longue plongée dans des eaux noires et profondes. Je me suis mise à revivre. Une bouffée de vie m’a soudainement envahie, accompagnée d’une vague d’espoir.
Un espoir blessant et douloureux comme une dague chauffée à blanc. Cette lame s’est enfoncée dans mon coeur et j’ai peiné à respirer. « Espérer fait vivre », m’a t-on dit. Ce dont je n’avais pas été prévenue, c’est de la souffrance qui accompagne ce sentiment d’attente et de doute. « Aimer fait vivre » n’est qu’une phrase abjecte et le plus abominable des mensonges. L’Amour compresse mon être jusqu’à ce que la dernière goutte de sang ne coule sur le sol, sale. Aimer n’a rien d’agréable, il torture le corps et incendie l’âme tout en se drapant dans une cape faite des lambeaux du coeur. Il fait vibrer la moindre note de musique dans la tête jusqu’à ce que cela devienne insupportable à vivre. Il souffle des idées aux oreilles, et voici comment mes mots se retrouvent sur cette page sans réelle raison. On a trop souvent décrit l’Amour comme le plus merveilleux de sentiments qu’un être puisse ressentir, comme le but de toute une vie, comme notre raison d’être. Balivernes. Balivernes, dis-je. Rien n’est plus déchirant que d’aimer et ces larmes qui coulent en sont le résultat. Peint ainsi, on ne pourrait que repousser ce sentiment mais lorsque cet Amour nous entraîne dans sa danse effrénée, on ne peut pas décliner l’offre, on ne veut pas refuser. On aime Danser. On aime Aimer.
Les larmes enfoncent leurs piques dans mes yeux; je les chasse d’un battement de paupières et détourne mon regard du tien. Je m’efforce de calmer mon coeur qui bat le rythme d’une musique naissante. Un léger sourire se dessine sur mes lèvres. Ma tête bourdonne et la musique se transforme en valse. Entraînée, j’effectue quelques pas, aux premiers abords timides. Finalement je lâche prise, mon coeur semble exploser (de bonheur ou de douleur? Je ne saurai dire), je me laisse emporter par la Danse et commence à Aimer.