Titre : ma sœur Louane.
Depuis ma naissance elle s’est assagit, ma mère me disait très souvent que ma sœur avait trouvé en moi une raison de grandir. Aussi loin que mes souvenirs pouvaient me porter, j’apercevais encore ses yeux d’azur étinceler librement à chaque fois qu’elle me regardait. Louane avait de jolis cheveux couleurs or, ses lueurs d’incarnat rutilait lorsqu’elle boudait et elle me comblait de bisous lorsqu’elle sentait pour moi un surplus d’affection. Je l’aimais ! Ma sœur adorait la pluie. Elle était toujours triste quand l’orage frappait et larmoyait en même temps que le ciel. Ce n’était pas une personne émotive mais lorsqu’un soir où l’averse frappait, je lui demandai pourquoi elle devenait sensible quand le ciel devenait gris, elle me répondit : « je n’ai pas moi même de véritable raison de m’émouvoir, Phill, j’ai toujours pensé que le ciel pleurait pour les enfants qui sont morts dans la solitude sans mère ni père ni frères ou même d’ami pour leur dire adieux. Le ciel pleure et je pleure avec lui. C’est puéril, Phill, mais je veux y croire. ». Elle m’effrayait ces moments là mais à forces de l’observer tous ces jours d’automne passés, je compris que je ne voulu pas me séparer de cette atmosphère grisâtre. Elle me fit aimer la pluie mais… ce fut par un jour radieux qu’elle me dit adieu. Louane était malade de naissance et son état ne lui permettait pas d’avoir de compagnon, moi j’avais des amis et j’allais la voir lorsque cela me plaisait. Entravée par sa fragilité, elle se réfugia dans les livres. Elle me contait des histoires pour me garder près d’elle ; et doucement, comme enivré par sa voix et ses douces manières de conteuse, notre amitié devint indispensable à mon quotidien. Très vite, elle devint celle que je voulais voir sourire.
Nous avions trois ans d’écart mais à douze ans, Louane dénotait une sagesse bénit grâce à quoi elle savait enlacer son petit frère et le calmer. Il m’arrivait de rougir de tendresse en observant de loin sa silhouette paisible pendant qu’elle contemplait le soleil couchant. Lorsque cette fille pressentait de l’irritation en mon âme, elle me proposait de la mener promener dans les allées de notre jardin ; Louane avait comprit assez tôt que sa main délicate et affaiblie logée dans la mienne ainsi que nos pas silencieux qui s’engouffraient dans les rangées de fleurs et d’arbrisseaux, comblaient en mon cœur ce chaleureux désir de quiétude. J’aimais ma sœur et j’ai longtemps pensée que si j’étais né dans un monde où nous ne nous connaissions pas, je l’aurais cherché instinctivement comme pour trouver cette autre part de moi où était enfermé mon cœur.
L’année de ses seize ans elle devint incapable de quitter son lit, elle passait la majorité de son temps à sommeiller, tant elle était affaiblie. J’allais chaque jour visiter cette fille au charme réconfortant et lui parler quand elle en avait la disposition. Elle ne riait plus, elle n’en avait plus la force, elle souriait uniquement.
L’hiver de son dix-septième anniversaire, je restai presque chaque soir à ses côtés, cela me comblait, elle me regardait avec amour. Chaque jour, j’avais la sensation que ses forces lui échappait, ils s’évaporaient sensiblement sous forme d’éffluve. Les jours enneigés devinrent accablant. Une matinée, alors que l’hiver laissait place au printemps, ma sœur m’appela à son chevet. « Ah ! Phill, mon adorable petit frère, dit-elle alors qu’elle saisi ma main ; ces mots seront le dernier cadeau et ma seule manière de te dire merci, alors écoute moi jusqu’au bout je te prie. Aujourd’hui l’hiver s’en va… et je m’en vais avec lui, je t’ai longtemps entendu sangloter pendant que tu veillais sur moi et grâce à cela je n’aurais pas eu à pleurer pour mon propre sort. Grâce à toi, Phill, je ne me suis jamais sentit seule. Parce que tu étais en peine, le ciel n’aura pas à pleurer pour moi. Je suis heureuse ! Mais…, le vent de l’oublie viendra enlever ce qu’il te restera de moi, c’est cela qui me rend triste. Tu prendras soin de toi, de père et de mère n’est ce pas ? Elle sourit après avoir aperçu mon acceptation ; bien, je te laisse faire alors. Je t’aime Phill, ici et dans cette autre vie, je ne cesserait jamais de t’aimer ; toi qui fut mon plus grand ami, mon seul réconfort en ce monde où je fus privé de liberté. A… Adieux… Phill ! »
Le délicieux sourire qu’elle octroyait à son petit frère s’imprima sur son joli visage au moment où elle ferma les yeux. Les premiers rayons d’un doux soleil de printemps ravivaient les éclats de sa chevelure dorée et de son visage à jamais endormit. Louane était partie. Je fus comme sortit d’un long rêve à la fin pénible mais chaleureux.
Un soir, durant l’été de mes quatorze ans, j’étais entrée dans la pièce qui autre fois était la chambre de ma sœur, j’ouvris les fenêtres et m’assis sur le bord du lit, j’observai les étoiles. Un tendre souvenir d’elle titilla mon cœur et je me tournai comme pour parler à quelqu’un mais une bourasque s’introduisit par la fenêtre pour me rappeler que j’étais seul. Le monde me rappela que Louane ne reviendrait plus, un soupir de lassitude me poussa au sanglot et je m’endormit.
Je rêvai ! Dans ce rêve, je revis très clairement ma sœur, elle marchait au bord d’un lac. Affublé d’une robe toute blanche, elle arpentait doucement la pelouse éclairer seulement par les feux de la lunes. Je ne pouvais interagir avec elle. Ses filons d’or luisaient dans la clarté de l’eau et son sourire envoûtait l’espace d’une paix indicible. Louane semblait heureuse, belle et totalement satisfaite mais elle s’arrêta et murmura quelque chose avec mélancolie. « Ah, Phill ! » dit-elle alors qu’elle ne soupçonnait pas mon existence en ce monde. Je fus heureux. Heureux de la revoir une dernière fois dans ce songe ; heureux de la voir si énergique, si vivante et si belle comme autrefois… heureux qu’elle aie été ma sœur.
Adieux Louane !
Bravo. Admirablement bien écrit et émouvant à la fois.