Les Crapules de la Cabane – Chapitre 20

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                                        Chapitre 20 : En plein cœur 

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Alors que je m’approchai de la caisse, le temps sembla s’écouler plus lentement. Comme dans une scène romantique au cinéma, quand le protagoniste s’amourachait de la fille d’à côté, frappé d’un coup de foudre fortuit. C’était soit l’amour, soit la drogue. Ou peut-être bien un peu des deux. Olivia sourit lorsqu’elle m’aperçut. Mon cœur se réchauffa instantanément. Je faisais peut-être une attaque cardiaque, finalement. Mon palpitant accordait ses pulsations au rythme de la mélodie imaginaire qui tournait en boucle dans ma tête. Le vrombissement des voitures dans la rue, les conversations inaudibles des passants, le chant des oiseaux, tout s’estompa pour ne laisser que les échos de la guitare folk retentir dans mon esprit. Je percevais presque les vibrations des cordes de l’instrument, grattées dans une douce cadence, comme si l’orchestre jouait juste à côté de moi.

Un élan soudain de confiance m’envahit. Je devais ça probablement à la cocaïne. L’occasion de parler à Olivia à cœur ouvert se présentait enfin à moi. C’était maintenant. Je pouvais le sentir jusqu’au fond de mes tripes. Avec pour seul et unique moteur, un besoin viscéral de me déclarer à elle, je m’arrêtai juste devant le comptoir.

— Tout va bien, Harlem ? me demanda-t-elle, d’un air inquiet. Tu sembles… ailleurs.

— Il faut que j’te parle.

Sans lui laisser le temps de se poser davantage de questions, j’attrapai sa main et l’entrainai avec moi pour nous isoler dans le rayon confiseries, à l’écart de mes amis. Nos mains jointes, je restai muet un instant, le temps de trouver les mots qui convenaient à ce genre d’épanchement. Je n’avais pas l’habitude de faire ça, je n’avais jamais aimé qui que ce soit d’autre. Préoccupée par mon attitude étrange, Olivia était entièrement focalisée sur moi, en apparence curieuse d’entendre ce que j’avais à lui dire. Tournant le dos à la caisse, cachée par la gondole qui l’en séparait, elle ne remarqua même pas le manège qui se déroulait à son insu. Du coin de l’œil, je pouvais deviner le reste de mon équipe qui passait derrière le comptoir, pour fouiller dans l’ordinateur. Mais à cet instant, j’étais bien loin de mon but premier. Je ne pensais plus qu’à Olivia, et à tout ce que je voulais lui dire depuis si longtemps.

— Écoute… commençai-je en prenant une grande inspiration. Je…

Merde. Les mots ne voulaient pas sortir. Ils se bousculaient trop vite dans ma tête. Incapable de donner forme à mon transport au travers d’un discours, je lâchai les mains de la jeune femme pour poser les miennes de chaque côté de son visage. Emporté par mes sentiments, sans réfléchir, mes lèvres rejoignirent les siennes dans un baiser particulièrement tendre. Je n’avais jamais embrassé personne de cette façon. Mais la douce chaleur qui enveloppa mon corps, dans cet échange plein de sincérité, disparut en un éclair. Notre étreinte fut brisée brutalement par un boucan insupportable. L’hallucination musicale s’essouffla elle aussi. Un paquet de bonbons, qui trônait sur l’étagère à côté de nous, explosa, littéralement. Des coups de feu se mirent à résonner dans toute la boutique. Dans un réflexe de survie, je plongeai au sol, entrainant Olivia dans ma chute presque maîtrisée. Allongé sur elle, je tentai de la protéger, au mieux, de la rafale de tirs qui détruisait tout sur son passage. Le son des balles qui fusaient au-dessus de nos têtes était assourdissant. Les vitres de la devanture explosèrent, retombant sur le sol dans une pluie d’éclats frétillants. Puis, plus rien. Comme après une tempête furtive, le chahut se stoppa net.

Le bourdonnement strident qui résonnait dans mes oreilles, me fit grincer des dents. Je me relevai prudemment, et levai la tête au-dessus du rayonnage pour identifier la source de l’attaque. Les deux hommes aux pompes cirées. Ils étaient là, pistolet à la main. En simple spectateur désemparé, j’envisageai déjà un trépas imminent. Je cherchais le reste de la bande en balayant le carnage du regard, quand Mohan bondit derrière le comptoir. Alors que l’un de nos deux assaillants venait de poser un pied à l’intérieur, écrasant quelques bris de verres sur son passage, il reçut en plein visage un coup de manche à balai. Mohan avait attrapé le premier objet à potentiel contondant qui lui était tombé sous la main. L’individu, surpris et désorienté, s’écroula en arrière. Son partenaire s’avança à son tour, et fut lui aussi terrassé, par la caisse enregistreuse qui vint s’écraser sur son abdomen. Le souffle coupé, il tomba lourdement à genoux. Taz était à l’origine de cette dernière offensive. J’en restai bouche bée, choqué de le voir pour la première fois, animé d’un instinct aussi vif.

Comme piqué par une impulsion, je me laissai guider par l’unique et infime chance de nous sortir de cette embuscade que j’entrevoyais. C’était le moment de se tirer ! Ma main dans celle d’Olivia, je l’aidai à se relever et sortis de ma planque une seconde pour attirer l’attention des trois autres.

— Allez, on bouge !

— Il y a une sortie, par là ! m’indiqua Olivia en désignant le fond du magasin.

Rejoints par le reste du groupe, nous nous mîmes à courir jusqu’à la porte avant de disparaître. La lumière du jour ne m’avait jamais parue si belle. Peut-être parce que je pensais ne jamais la revoir. Lancés dans une folle échappée, à bout de souffle, on ne s’arrêta qu’une fois devant l’immeuble où vivait Olivia. C’était le point de chute le plus proche. Pas de repos pour les guerriers. Toute l’équipe continua de courir, grimpant les trois étages à grandes enjambées, pour ne s’arrêter qu’une fois à l’abri, dans l’appartement d’Olivia. Je claquai la porte derrière nous et me laissai glisser contre elle, jusqu’au sol, haletant rapidement.

Angus s’assit sur le canapé et plongea sa tête entre ses mains. Taz, lui, n’avait jamais eu les yeux aussi grand ouverts. Il passa une main dans ses cheveux pour dégager son visage de cette mèche rebelle qui ne l’avait jamais dérangé jusque là.

— Putain, on a eu chaud ! s’exclama-t-il, un large sourire aux lèvres.

Je vis rouge. Je me levai d’un bond et empoignai Taz au col, le plaquant contre le mur sans ménagement.

— Ça t’fait marrer, hein ?! On a failli se faire buter, j’te signale ! Tout ça, c’est à cause de toi ! gueulai-je avant de le relâcher.

— En quoi c’est de ma faute, putain ?!

— Si t’avais pas ramassé la dope dans cette foutue chambre d’hôtel, on n’en serait pas là !

— C’est un peu facile, je trouve… marmonna Angus, depuis le canapé.

Pris d’une rage que je contenais difficilement, je m’avançai dans le salon pour faire face au binoclard. Lui aussi de mauvais poil, il se leva pour planter son regard dans le mien.

— Excuse-moi ? T’as un truc à m’dire, Angus ? demandai-je d’un ton fébrile.

— C’est pas de la faute de Taz. Personne n’aurait pu prévoir ce merdier ! Et j’te rappelle que, toi non plus, t’as pas géré ce coup-là à la perfection !

— Moi ? J’ai pas géré ? Je dirige l’opération depuis le début ! Sans moi, vous étiez paumés !

— Si t’avais pas cherché la merde à Ed, son frangin ne nous serait pas tombé dessus ! Deux fois, en plus ! On a perdu une brique, par ta faute ! Et on est défoncé ! Encore une fois, par ta faute !

Je ne percevais rien de cohérent à ses reproches. Était-ce l’adrénaline ? La drogue ? Ou seulement la frustration et la trouille ? Les quatre à la fois, sans doute. Le moment n’était pas idéal pour régler nos comptes, ni même pour trouver un coupable au bordel ambiant. J’étais encore assez lucide pour m’en rendre compte. Je devais des excuses à Taz. Les mains tremblantes, les nerfs à vif, je me retournai pour faire mon mea-culpa, quand je me raidis.

Olivia pleurait, dans les bras de Mohan, blottie contre lui. Il l’entourait de ses bras, sa tête posée sur la sienne, et caressait ses cheveux avec affection. Beaucoup trop d’affection. Ce qui émanait d’eux était évident, transcendant même. La brusque révélation me frappa en plein cœur, comme un poignard. Mohan Et Olivia… Je ne parvenais pas à soutenir cette réalité lancinante, pourtant je persistais à la contempler, malgré moi. La gorge serrée, la poitrine oppressée, je les observai un instant qui me parut interminable.

— C’est quoi ce bordel ? demandai-je d’une voix frémissante d’émoi.

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4 Commentaires
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DeJavel O.
2 années il y a

Oh ! Je suis soufflé ! Alors là ! Pauvre Harlem ! Franchement Shi ! Tu nous a bien eu ! Et en plus, il y avait des signes avant coureurs !

Moran et Olivia c’était écrit dans le ciel, mais quand ça s’est produit, ça m’a rentré en pleine tronche !
Wooaaa ! Quel chapitre !

DeJavel O.
2 années il y a

C’est franchement réussi ! Les indices étaient là ! Mais tu as réussi à nous surprendre ! Rien de mièvre, que de l’inattendu. Les indices étaient semés et Bang !
Une scène superbement conçue !

Tu nous fais regarder à droite, à gauche, les crapules qui se surpassent, on se met à espérer en eux… et au moment où nous soufflons… le crève cœur nous tombe dessus ! Je suis admiratif !

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