Eliya
Je suis entré dans sa chambre sans même y frapper. Antoine a sursauté.
— Désolé ce n’est que moi.
Il était dressé devant la fenêtre, il regardait la pluie s’écraser contre les carreaux. Je me suis approché de lui. Il s’est tourné vers moi. Le regard baissé sur nos chaussures.
— Antoine…
Il releva la tête, et j’ai pu voir dans ses yeux, toute la tristesse de son âme. Je n’ai pas pu m’empêcher de le prendre dans mes bras, et de le serrer fort. Au bout de quelques instants, il resserra ses bras autour de moi. Je ne voulais pas le lâcher. Et j’avais encore moins envie qu’il me lâche.
On s’est assis au bord de son lit face à la grande fenêtre.
— Pourquoi ne voulais-tu pas venir ?
— Je crois que je n’ai pas besoin de te répondre, tu connais déjà la réponse.
Je ne voulais pas y croire. Je ne pouvais pas croire qu’Antoine serait passé à l’acte. Qu’il mette tout en périls, alors que je tentais de le sauver.
— Je suis contente que tu aies changé d’avis.
— Tu n’aurais pas insisté…
— Tu es là maintenant.
On est resté un moment à observer la pluie tomber. Sans se dire un mot. Antoine avait mis sa main par-dessus la mienne, et de son pouce il me caressait le haut de celle-ci.
— Tu as reçu le mail de l’avocat ?
Je ne savais pas si je devais lui dire la vérité. Garder le secret, allait peut-être empirer les choses. J’avais du mal à cerner le caractère d’Antoine, il était calme et doux, mais il pouvait dérailler en un instant. Est-ce qu’il avait toujours été comme ça ?
— Non…
— C’est bizarre, attend je vais te montrer.
— Antoine, je ne l’ai pas reçu, parce que… Comment te dire, j’ai peur que tu le prennes mal.
Il m’attrapa le visage et le tourna vers moi. Son pouce caressait maintenant ma joue. Sa main était réconfortante.
— Dis-moi, je te promets de ne pas le prendre mal.
— Ce matin, j’étais chez l’avocat, pour tout lui dire, pour trouver une solution pour te sauver, et ce soir si je suis arrivé en retard, c’était parce que j’étais avec lui, et que ce qu’il vous a dit par mail, je l’ai su en direct.
Il arrêta son geste, mais avait toujours mon visage dans sa main.
— Tu veux dire que c’est toi qui m’as sorti de la merde ?
— Pas vraiment, enfin je suis allé voir l’avocat, pour qu’il fasse tout pour t’en sortir au cas où, mais c’est l’officier Esposito qui t’a vraiment sauvé.
Contre toute attente, et pour seule réponse, Antoine s’approcha de moi et m’embrassa. Je n’ai pas reculé, je ne me suis pas détourné de son baiser, je lui ai même rendu.
On se sépara, je sentais la chaleur envahir mes joues.
— On devrait peut-être rejoindre les autres me dit-il.
J’ai acquiescé d’un signe de tête, et nous sommes descendus.
— Vous voilà, on se demandait ce qu’on allait commander à manger pour ce soir, nous dit Johane.
— Vous êtes plus pizza ou sushi, reprit Julien.
— Ça m’est égal, répondit Antoine.
— Pareil, dis-je.
Je cherchais Axel du regard, mais il n’était pas dans la cuisine.
— On commande des pizzas du coup, dit Maria.
J’ai lâché ma commande et je suis parti à la recherche d’Axel. J’avais fait le tour de la maison, je suis même remonté à sa chambre, mais il n’y était pas. En redescendant pour aller chercher mon portable, dans la mienne, il était là, sortant de la bibliothèque.
— Axel, je te cherchais partout.
Il s’approcha de moi, ouvrit la porte de ma chambre, et m’y poussa.
— Je t’ai vu entrer dans la chambre d’Antoine.
Je me mis sur la défensive, automatiquement, ça sonnait comme un reproche en sortant de sa bouche.
— Oui, j’y étais, c’est interdit ?
— Qu’est-ce que vous avez fait ?!
J’avais du mal à comprendre sa réaction, c’est lui qui avait eu l’idée de ce week-end tous ensemble. Et c’est encore lui qui avait eu l’idée de me laisser les fréquenter tous les deux.
— Axel, je croyais… Enfin, tu as dit…
Il se rapprochait de moi, jusqu’à ce que je ne puisse plus reculer. J’étais prise entre le mur et lui.
— Je sais ce que j’ai dit Eliya ! Mais je n’y arrive pas ! Ça me rend fou.
Il posa ses mains de chaque côté de ma tête, sur le mur. Mon cœur s’accélérait.
— Axel…
— Je ne veux pas te partager avec lui.
Un frisson parcourut mon corps.
— Mais…
Je ne pus dire un mot supplémentaire. Axel écrasa sa bouche contre la mienne. Un sentiment de bien-être m’envahit, et là encore, je ne l’ai pas repoussé. J’ai agrippé le bas de son tee-shirt. Sa langue se fraya un passage, pour rencontrer la mienne. J’avais envie de plus. Chaque baiser d’Axel, me faisait, me sentir vivante. À cet instant, j’en oubliais tout. Il n’y avait que lui et moi. Il arrêtait le temps. Et j’avais besoin de ces moments avec lui.
Ce n’est que quand on entendit la porte sonner, qu’on se détacha l’un de l’autre. À bout de souffle. J’avais l’impression d’avoir couru un marathon, mes jambes tremblaient. Ce frisson ne me quittait pas.
— Je crois que le repas est arrivé, dit-il.
J’ai redescendu, ces marches d’escalier, mais cette fois avec Axel. Antoine se retourna vers nous, et en croisant son regard, toute la culpabilité que j’avais, d’être avec l’un puis l’autre me revint en pleine figure. Il fallait que je fasse un choix, je le savais. Mais je n’en trouvais pas la force.
Heureusement, la présence des autres allégeait la situation. Nous avons mangé, on a ri, tous ensemble. Et on a chacun rejoint nos chambres, fatigué de cette journée.
J’ai laissé les rideaux de ma chambre ouverts. Regardant et écoutant la pluie. Cette pluie, qui m’avait volé mes parents elle aussi. J’ai fermé les yeux, et me suis laissé bercer par son chant.
« — Allo ? Allo ?!
J’entends de l’agitation autour de la personne qui a décroché, je n’arrive pas à comprendre ce qu’il se passe.
— Oui allo, mademoiselle ?
— Oui qui êtes-vous ? Pourquoi répondez-vous au téléphone de mes parents ?
— Ah vos parents, écoutez, mademoiselle, je suis l’agent de police Weber, mademoiselle, il va me falloir votre adresse, je ne veux pas vous bousculer ni vous choquer. Je vais vous envoyer un agent pour venir vous récupérer.
— Mais que se passe-t-il dite le moi !
— Vos parents ont eu un accident de voiture sur l’autoroute.
— Vous êtes vraiment, une bande de sale gosse, lâche, dommage que je n’en ai pas tués plus ! »
Je cherchais ma respiration, j’entendais des voix autour de moi, elles m’appelaient toutes. J’avais mal, aux bras, quelque chose m’enserrait, me secouait.
Ce n’est qu’en ouvrant les yeux que je compris, ce qu’il se passait. Un autre cauchemar avait pris possession de moi. Axel me secouait. Antoine dans l’encadrement de la porte, les autres derrière lui.
Tout le monde savait maintenant.
C’est une bonne situation ça… Non ! quelle galère, faut qu’elle sorte avec Maria et ça sera réglé
Une situation inextricable!
La tension est extrême dans ce passage, on ne voit pas d’issue.
Mmm.., tout le monde savait que quoi ? Les cauchemars, les évanouissements ? Puzzled.