Du néant au frisson. Chapitre 63.

4 mins

Eliya

Johane était la dernière à témoigner. À la fin de son interrogatoire, le président reprit la parole. 

— Bien, maintenant que nous avons entendu les victimes, nous allons faire une pause déjeuner. Il est exactement 12h24, l’audience reprendra à 13h45. L’audience est levée, et il tapa à nouveau de son marteau sur le bord de son bureau. 

On se leva et ont sorti de la salle. À mon plus grand soulagement, mes grands-parents n’étaient pas restés à attendre que ça se finisse. 

— Nous avons une heure pour déjeuner, il y a une brasserie juste en face, je vous invite, nous dit monsieur Morov. 

On le suivit sans décrocher le moindre mot. Comme ci, nous avions été vidés de toutes paroles. 

On entra dans la brasserie et on s’installa autour d’une table. 

— Voulez-vous que l’on parle de cette partie-là du procès ? demanda Morov. 

Je pris la parole. 

— Je vais être franche avec vous tous. Je n’ai absolument rien écouté de vos témoignages, j’en suis désolé. C’était au-dessus de mes forces. Je n’aurais pas pu rester crédible, le visage dur si je vous avais écouté. J’ai déjà trouvé mes questions… très strictes. Est-ce que vous avez eu la question sur le suicide vous aussi ? 

Ils me regardèrent et hochèrent tous la tête en même temps.

— Nous l’avons tous eu, Eliya… Nous n’avons pas pu passer à côté de celle-ci. Me dit Antoine.

— Vous savez, c’est plutôt commun cette question, dans des procès d’accident. On la pose pour écarter toutes traces de mises en causes des victimes. 

— Du coup, vous ne trouvez pas ça anormal ? lui demanda Antoine. 

— Pas du tout, ce qui aurait été anormal c’est qu’il ne la pose pas. Là, il écarte toutes demandes de la partie adversaire d’erreur humaine, d’inattention. 

On commanda nos plats, et on continua de parler du procès et de la suite. 

Monsieur Morov nous expliqua que pour la reprise, monsieur Collins sera rappelé. On lui demandera s’il a des choses à ajouter à ce que l’on a dit. Ensuite, ils demanderont à l’avocat de la défense ce qu’il plaide et ensuite ils demanderont à monsieur Morov ce que l’on demande. 

Lors de nos réunions d’avant procès, on s’était tous mis d’accord, sur les conseils de monsieur Morov et sa collègue sur la peine, que l’on voudrait. On demanderait une peine de 10 ans d’emprisonnement et une indemnité de dommage et intérêt de 20 000 euros par personne. On était tombé d’accord, sur le fait qu’on voulait plus de prison que d’argent. 

Une fois le repas fini, je n’ai pas eu le temps de rappeler l’hôpital, j’ai donc écrit une nouvelle fois à Kim. 

Eliya : Salut, Kim, je suis désolé, je n’ai pas pu t’appeler, nous avons eu peu de temps pour aller déjeuner et nous reprenons l’audience dans moins de cinq minutes. Es-tu à l’hôpital ? Et si oui as-tu des nouvelles sur l’IRM d’Axel ? 

Elle me répondit de suite. 

Kim : Ma chérie, je viens d’arriver à l’hôpital, Axel n’est toujours pas redescendu en chambre, ils ont dit qu’il me tiendrait au courant, j’attends dans la salle d’attente. Ne te fais pas de soucis je suis là. Soit forte pour la fin du procès. Plein de bisous d’amour petit chou ! 

Le message de Kim me réconfortait, savoir quelqu’un auprès d’Axel me rassurait. 

Nous sommes rentrés à nouveau dans cette grande salle, nous avons repris nos places de départ. Et les juges ont refait à nouveau leurs entrées. 

Le président reprit la parole. 

— Bien, nous allons à présent réentendre le prévenu, et nous finirons par les requêtes des avocats. Je déclare l’audience ouverte. Il frappa une nouvelle fois de son marteau, et le procureur se replaça devant nous. 

C’était une danse orchestrée, toujours les mêmes mots, toujours les mêmes gestes, une rigueur implacable. 

— J’appelle à la barre monsieur Collins Georges. 

Il se leva et se réinstalla une nouvelle fois, toujours avec la même chorégraphie, à la barre. 

— Monsieur Collins, au vu de ce qui a été dit, avez-vous quelque chose à ajouter pour votre défense ? 

— Non. 

La réponse nous surprit tous, même son avocat, semblait déconcerté. À quoi jouait-il ? Il avait la chance de pouvoir s’exprimer encore une fois et il la gâchait avec un simple « non ». 

— Bien, vous pouvez vous rasseoir. Monsieur le président, je vous laisse la parole. 

— Maître Alisbert, nous vous écoutons. 

L’avocate de Collins se leva derrière son bureau. 

— Au vu des accusations envers mon client, nous plaidons l’irresponsabilité mentale, et demandons un internement, pour troubles psychologiques, plutôt qu’un emprisonnement, qui ne réglerait pas le problème de monsieur Collins. En effet, après écoute du témoignage de l’expert psychiatrique, une peine de prison sans suivis psychologiques ne guérirait pas mon client. 

L’avocate de Collins se rassit. 

— Maître Morov, c’est à vous, déclara le président. 

Monsieur Morov se leva à son tour. 

— Au vu des circonstances, et de tous les témoignages entendus, nous demandons une peine de 10 ans de prison et une amende de 20 000 euros par victimes présentes pour dommage et intérêt. 

Monsieur Morov se rassit. Le président tapa une nouvelle fois sur le coin de son bureau. 

— Bien après avoir entendu tous les partis, je déclare le jugement mis en délibéré, mes confrères et moi nous retirons. 

Un coup supplémentaire, et ils se levèrent pour quitter la salle. 

— Qu’est qu’on fait maintenant ? demanda Julien. 

— On attend, lui répondit Morov. 

— Ça va être long ? 

— Je ne pense pas, les demandes étaient claires. Pas plus d’une demi-heure, je pense. 

J’en ai profité pour regarder mon téléphone.

Kim : Axel est revenu en chambre, l’IRM n’a rien donné. Ils le laissent encore dans le coma. Courage mon chou !

J’ai montré le texto à Antoine, il me prit la main et la serra fort dans la sienne. 

— Ne t’inquiète pas, il va s’en sortir. 

Une demi-heure après, comme Morov l’avait prédit, l’officier du début revint se planter devant nous. 

— Mesdames, Messieurs, veuillez-vous lever, les juges ont fini leur délibéré. 

Nous nous sommes tous levés, et les juges ont repris leurs places. 

Le président prit la parole.

— Après délibération, nous déclarons monsieur Collins, coupable d’homicide involontaire, et nous le condamnons à un internement d’une année, suivis d’un emprisonnement d’une année également, à compter de ce jour. D’un dédommagement de 10 000 euros par victimes, et d’un retrait immédiat de tout permis de conduire. 

Le président retapa de son marteau. 

— La séance est levée. 

Je suis retombé sur ma chaise. Abasourdie par la décision du juge. Personne ne comprenait. Antoine demandait des explications à Morov, Maria pleurait, Julien jurait et Johane semblait apeurée. 

Et Collins lui, il souriait. Se sourire qu’il nous servait depuis le début. 

— Ne vous inquiétez pas, nous allons faire appel, ce n’est pas fini. Tentait de nous rassurer Morov. 

— Il a gagné. 

— Non Eliya, nous avons encore des options il n’a pas gagné, me répond-il. 

Je me suis levé et j’ai quitté la salle, je suis sorti de ce tribunal. J’ai dévalé les escaliers, sans me retourner. Je n’écoutais pas Antoine hurler mon prénom. J’ai attrapé mon téléphone. 

— Ok Google, donne-moi l’itinéraire le plus court pour la gare de Pau. 

Maps c’est alors ouvert et j’ai courus. 

Il fallait que je parle à Axel, j’avais besoin de lui. On avait perdu le procès. 

C’était fini. 

Tout était fini.  

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2 Commentaires
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ccccccccccccc bbbbbbb
2 années il y a

Absolument scandaleux!
On croirait presque à un complot plié d’avance.
S’il n’y a pas appel, je crains une justice plus sommaire et définitive.

O. DeJavel
2 années il y a

Ouf ! Mais qu’est-ce qui a bien pu se passer dans la tête des juges ? Morov a-t-il été trop confiant !

Une finale de roman noir. Dis moi au moin qu’il pleut quand Eliya lance son fameux « Ok Google…»

Sous-lieutenant La Pinaille au rapport : il faudrait rephraser ceci : « Ensuite, ils demanderont à l’avocat de la défense ce qu’il plaide et ensuite ils demanderont à monsieur Morov ce que l’on demande. »

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