Le Conte de la Sorcière des Bois 45. Laideron au désert éveillé

10 mins

Le cri éventra le brouillard et heurta de plein fouet les cœurs égarés. Jilam reçut la sensation d’une froide averse. « Qu’est-ce que c’était ? » Une bête qu’on égorge, probablement.

Tête-de-Pie s’accrochait à son bras à l’instar d’une petite fille apeurée. Captive des sables mouvants qui avaient englouti sa mémoire, chaque instant la confrontait à un passé effrayant dont sa conscience fragilisée ne parvenait à s’extirper.

« Cela venait de par-là, je crois. » Silène pointa du doigt le rideau de brume.

« Tu es sûre ? » Jilam tâchait de réconforter la fée-lutin tout en luttant pour se maîtriser lui-même. « Nos sens sont traîtres, tu l’as dit toi-même. On ne peut pas se fier à eux.

J’ai dit : je crois. Et Dayl confirme qu’il y a bien quelque chose de vivant non loin. »

L’époux de la sorcière jeta un œil circonspect vers la luciole bleue virevoltante dont la lumière était l’unique rescapée de l’ogre de poix qui avait dévoré le soleil et la lune, et le temps avec eux. La faim le tenaillait, la fatigue l’écrasait, et ses blessures, trop nombreuses pour les compter, maltraitaient sa raison déjà bien amochée. Il accepta de suivre Silène, Tête-de-Pie dans son sillage.

« J’ai froid petit d’homme, se plaignit la fée-lutin.

Tiens, prends mon manteau. » Le jeune homme regretta rapidement son geste, dès la première morsure gelée. Ses tremblements s’accentuèrent ; à croire qu’il était une souris secouée entre les mâchoires d’un félin joueur. Cette pensée ressuscita un nouveau souvenir. Il fallait vraiment qu’il soit dans de beaux draps pour que songer à Mú le réconforte. Je t’en prie. Où que tu sois, veille sur elle.

Un autre hurlement se déchaîna, suivi bientôt d’un second. Tête-de-Pie émit un hoquet d’effroi. Quant à Jilam, il avait identifié la nature du cri. C’était le bruit de la raison qui se fend en deux.

Une ombre se découpa soudain à travers le linceul de fumée. « Silène, attend », chuchota Jilam d’une voix rouillée par l’angoisse. Mais l’elfe s’avançait déjà en direction de la silhouette grise qui se tenait agenouillée, la tête ballante penchée vers le sol.

Un bras se leva pour s’abattre brusquement en un geste de vive colère. Il fut accompagné d’un énième rugissement. Jilam identifia un mot : « Meurs ! »

Il se figea. Collé contre lui, Tête-de-Pie se morcela comme une vieille souche décrépie par la pluie.

« Meurs ! » répéta l’écho déchirant.

La fée-lutin voulut s’enfuir et tenta d’entraîner avec elle le jeune homme, mais ce dernier resta campé sur ses jambes. Trop terrifiée pour déguerpir seule, elle dut se résoudre à avorter sa retraite amorcée. Silène, elle, continua de s’approcher à pas prudents de la créature démente.

Encore une illusion ? Non. Un bandeau ténébreux se détacha du brouillard, révélant des soupçons de couleurs, ternes mais néanmoins un témoignage de vie. Avec prudence, l’elfe se pencha vers l’être de fumée sans que rien ne signale qu’il ait remarqué sa présence. Le bras se dressa de nouveau pour s’abattre aussitôt. « Meurs ! »

Silène posa sa main sur l’épaule, puis, devant l’absence de réaction, écarta la masse de cheveux bruns, crotteux et emmêlés, qui lui dissimulaient le visage. Elle avala un cri de stupeur. Jilam s’approcha à son tour, Tête-de-Pie sur ses talons, et tous deux constatèrent l’identité de la miséreuse. « Reyn ! »

Il s’agissait bien de la reine des Rats, dépossédée de toute sa superbe et de sa férocité ; son manteau de visombre réduit à une loque crasseuse. La poussière maculait ses cheveux de feu. Mais le pire émanait des multiples entailles découpant ses bras et ses jambes. Le sang avait abondamment coulé des plaies. Il dessinait étrangement une forme, une silhouette gisant sur les graviers que Reyn s’acharnait à poignarder encore et encore à l’aide de sa dague brisée.

Silène l’appela : « Reyn.

Tais-toi et meurs ! » La lame fendue frappa. L’ombre de sang demeura impassible malgré les coups répétés.

« Reyn, c’est moi, intervint Jilam. Et Tête-de-Pie est là aussi. » La fée-lutin passa la tête par-dessus l’épaule du jeune homme pour aussitôt replonger derrière son dos, tétanisée par le fracas de la démence.

« Silence ! Tu vas mourir, oui ?! » Elle avait la main écorchée à force de serrer le manche de son arme. De toute évidence, les nombreuses blessures, dont elle semblait ignorer la souffrance, lui avaient été infligées par nul autre qu’elle-même. Un profond dégoût s’empara de Jilam. C’en était trop.

Il se précipita pour arracher le vestige de dague des mains sanguinolentes. Reyn se mit dès lors à ruer à l’image d’un hériphant en furie. Ses hurlements perçants évoquaient quant à eux ceux d’une harpie. Silène s’empressa de porter assistance à son camarade. Elle saisit l’autre bras de la reine des Rats, lequel cherchait à lacérer le visage de Jilam. C’est au prix d’un long effort qu’ils parvinrent enfin à maîtriser leur amie.

Reyn plongea subitement dans une violente crise de tremblements. Jilam se débarrassa de son gant et le glissa dans la bouche de l’infortunée afin de l’empêcher de se mordre la langue. La catatonie succéda aux soubresauts. Un vide scintillant emplissait les yeux exorbités de l’elfe.

Jilam s’en alla ensuite apaiser Tête-de-Pie en proie à la panique. 

À peine le calme était-il de retour que l’averse les cueillit par surprise. Les deux comparses se dégotèrent une corniche en guise de toit. Il leur avait été difficile de traîner leurs deux fardeaux. Trempés jusqu’aux os, impossible néanmoins pour eux d’allumer un feu. Ils avaient épuisé leur maigre stock d’étoupe et pas la moindre brindille ne jonchait ces Gorges nues de végétation, si ce n’est le lichen luminescent poussant dans la roche et que leur instinct refusait de toucher. Ne restait plus à nos deux éponges sur pattes qu’à se serrer et tâcher de puiser un filet de chaleur en dépit de leurs habits mouillés.

Le déluge était en revanche bienvenu. Silène s’empara de sa gourde pour récolter la précieuse eau de pluie. Mais, quand elle porta le goulot à ses lèvres, son visage se défigura et elle se mit à tousser et à cracher. « Ça me brûle la gorge ! J’ai l’impression de boire du feu ! »

Le bref rayon d’espoir s’éteignit, masqué par le rideau.

Reyn demeurait dans son état de paralysie, piégée entre éveil et sommeil. Silène soigna de son mieux ses entailles aux bras et aux jambes ainsi que sa pauvre main, écorchée à force de serrer le poignard. Elle nettoya les plaies avec l’eau saine de la gourde de Jilam avant de les bander d’un morceau de tissu propre prélevé d’un pagne. Cela ne suffirait probablement pas à éviter l’infection, mais de quel autre moyen disposaient-ils ? C’était Nellis qui portait la pharmacie. Elle la guérisseuse.

« À ton tour, dit Silène en se tournant vers Jilam, dont le visage arborait en effet de vilaines griffures infligées par Reyn durant leur mêlée.

C’est bon, ne t’inquiète pas.

Ne joue pas à ça. Assieds-toi. » Le ton était on-ne-peut-plus ferme malgré la fatigue qui l’étranglait. Jilam ne trouva pas la force de répondre. Après s’être débarbouillé, il se laissa sagement recoudre sous l’éclairage blafard dispensé par Dayl la luciole.

« Aïe ! Vas-y doucement ! 

Quel douillet tu fais, je te jure. Les humains sont vraiment en mousse.

Ouais, on est plus fragile que vous. Qu’est-ce tu veux qu’on y fasse ?

Chut, cesse de gigoter. On ne va pas y passer la nuit. »

Est-ce seulement la nuit, ou le jour s’en est-il simplement allé ?

Reyn reposait dorénavant sur l’épaule de Silène. Dans son sommeil, elle demeurait la proie de ses hallucinations. Son corps était parcouru de soubresauts tandis que des suppliques s’échappaient parfois de sa bouche entrouverte de laquelle dégoulinait un filet de bave. En parfait miroir des deux elfes, l’épaule de Jilam servait de coussin pour Tête-de-Pie. Comme sa cheffe de clan, la fée-lutin luttait contre les diables du cauchemar, crachant par intermittence de faibles sanglots, son poing fermement agrippé à la manche du jeune homme.

Le vacarme de l’averse vrombissait aux oreilles de nos voyageurs égarés sous leur pathétique abri. Le déluge battait le brouillard inflexible à ses assauts.

Jilam passa sa gourde à Silène qui but une minuscule gorgée, puis il but à son tour. Étancher leur soif accentuait leurs crampes au ventre. Ils n’en avaient plus pour longtemps, ils le savaient. La seule question qui demeurait : Est-ce le corps ou bien l’esprit qui lâchera en premier ?

Qu’importait en vérité. Dans les deux cas, ils finiraient comme tous les autres braves imbéciles les ayant précédés : transformés en statues vivantes, conscients dans la pierre mais privés de raison ; la haine les dévorerait morceau par morceau jusqu’à ce que leur identité se dilue entièrement dans la roche.

Épaule contre épaule, soutenant chacun leur fardeau, l’elfe et l’humain s’accrochaient à leur ultime lien ; pure vanité du vivant face à la mort.

« Dire qu’elle était prête à me tuer. » Silène détaillait, un rictus aux lèvres, les traits sales et tiraillés de Reyn.

« Elle est très secrète. Mais elle ferait tout pour protéger son clan, expliqua Jilam. Rien ne compte plus pour elle. Les siens l’aiment parce ce que c’est une cheffe formidable. » Il s’interrompit. « Ne lui dis pas que j’ai dit ça. » Ils échangèrent alors un sourire complice.

Les larmes du ciel juraient de s’éterniser. Les bourrasques les harcelaient de leurs tourbillons glaciaux tandis que leurs habits détrempés décuplaient la douleur infligée par les coups de poignard du froid. La lueur bleutée émise par la luciole ne dispensait aucune chaleur. Tout juste permettait-elle de distinguer l’ombre des visages.

« Tu peux dormir, je monte la garde », proposa Silène.

 Inutile. Je ne pense pas pouvoir m’endormir tellement j’ai froid. » Le jeune homme jalousait les deux belles au bois dormant sans les envier, au vu des grimaces de supplice qu’elles tiraient.

« Dayl n’a vraiment pas d’idée pour nous sortir de là ? s’enquit-il.

Il est tout aussi perdu que nous, je crains. Quoi ? Pourquoi tu ris ?

Rien, simplement… Dire que mon seul espoir se raccroche à Dayl, je dois être vraiment au bout du rouleau. »

La remarque avait visiblement blessé l’elfe. « Il a fait de moi ce que je suis, tu sais. Et sans lui, tu serais toujours la proie des Oubliés. Ne l’oublie pas.

Je n’oublie pas, se défendit Jilam, un peu honteux. C’est juste que j’aie du mal à l’imaginer. Moi qui pensais que tu n’étais bonne qu’à réciter des litanies, entretenir le tertre sacré et t’occuper du vieux Dayl.

C’est lui qui m’a tout enseignée. Ce n’est pas sa faute si sa malédiction l’a changé. »

L’époux de la sorcière se pencha en arrière et fixa son regard sur la corniche les surplombant et sa façade tapissée de ténèbres. « Tu sais, je me déteste, un peu. Pas autant qu’avant. » Pourquoi est-ce que je lui dis ça moi ?

Tandis que l’humain cherchait le firmament, les pensées de l’elfe se plantèrent par terre. Les bras enlaçant ses genoux, elle lui ouvrit ses cœurs. « Dayl se détestait. Cela me mettait en colère. Il avait tort d’écouter les autres. Ce n’était pas sa faute. Il est certains démons qu’on ne peut vaincre. Encore moins tout seul. »

Jilam ferma les yeux et soupira. « Oui. Les gens rejettent ce qu’ils méprisent. Ils ont peur. Peur que cette différence qu’ils côtoient ne les contamine. Comme une maladie en fait. Alors ils s’éloignent. Les gens seuls le sont forcément parce qu’ils sont dangereux. C’est comme ça qu’on les voit. Je ne suis pas différent d’eux. J’ai longtemps méprisé les autres autant que je me méprisais moi. Non, plus encore. Et puis, j’ai rencontré Nellis. Elle aussi se méprisait. D’une autre façon. Beaucoup méprenne son orgueil pour de l’égoïsme, alors qu’en vérité, elle joue un rôle. Son propre rôle, destiné à se berner elle plutôt que les autres. Elle a toujours vécu dans la peur. Les autres ont peur d’elle, mais c’est elle la plus effrayée de tous. Alors elle utilise cette peur comme une arme, un bouclier qui la protège. J’étais pareil.

» Quand on s’est rencontrés, elle et moi, on a tous les deux baissé instinctivement nos boucliers, comme deux amis qui se reconnaissent sur le champ de bataille. Je ne sais trop pourquoi. On ne se connaissait pas. De parfaits étrangers. Ce que je sais, c’est qu’il s’est produit quelque chose cette nuit-là, un truc unique, qui n’arrive qu’une fois dans une vie. Peut-être qu’une fois tout court. Je ne pouvais pas laisser passer ma chance. Tant pis si elle me change en crapaud ou en marionnette, il fallait que j’en ai le cœur net. Et tu sais quoi ? Je ne regrette absolument rien. »

La candeur du sourire que le jeune homme lui décocha surprit Silène par l’émotion qu’il déclencha en elle. Les pensées de Dayl se mirent à vibrer à travers sa chair, lui prodiguant une tendre chaleur pimentée d’amour. Elle plongea sous cette ondée printanière, l’embrassa avec force et passion.

« Oui, je vois ce que tu veux dire. Un peu. »

Tous les deux se serrèrent en quête de la chaleur de l’autre. Malgré le froid, la faim, une sérénité sincère émanait d’eux. Ils ne dormirent pas vraiment. Il s’agissait plutôt d’une sorte de méditation, une communion de songes éveillés ; davantage revigorant qu’un sommeil agité par de mauvais rêves.

Quand ils émergèrent de leur état, la pluie s’en était allée, abandonnant l’ogre brouillard à ses racines. Leur épuisement s’était suffisamment estompé pour qu’ils marchent d’un pas aguerri. Chacun traînait son fardeau. Tête-de-Pie et Reyn fluctuaient entre des phases de semi-conscience et des crises hallucinatoires. Il fallait sans cesse leur garder un œil attentif et les tenir par la main au risque qu’elles s’échappent et s’égarent.

« Je crois que j’ai déjà vu cette statue. » Jilam lorgnait la créature de pierre d’un œil méfiant. Celle-ci se cachait le visage derrière les mains à l’instar de toutes celles qu’ils croisaient. Avec une lenteur prudente, il s’approcha. Ses paupières clignotèrent. « Attends ! Ce n’est pas la première fois qu’on passe par-là, et non plus la deuxième !

Chut, calme-toi. C’est ton esprit qui te joue des tours. Il n’y a aucun moyen de différencier une statue d’une autre dans ce brouillard. Les Oubliés manipulent tes sens, je te l’ai dit cent fois. Ils veulent que tu cèdes à la panique, que tu perdes ta raison. Ne cogite pas. Nous devons avancer, coûte que coûte.

Mais nous tournons en rond ! »

L’elfe soupira. « Ceux qui ont bravé les Gorges n’ont pas pu tous y rester. Sinon, comment les légendes auraient pu nous parvenir ? Non, il doit y avoir une issue.

Pour des êtres bien plus puissants que nous, oui, peut-être. Mais nous, on est pas de taille. »

Silène se retourna vivement, sourcils froncés. Jilam se figea net. Pendant un instant, il avait confondu la chamane avec Nellis. Cette vision fugace suffit à lui redonner un peu de baume au cœur. La panique naissante s’en était allée aussi promptement qu’elle l’avait happé. Il repositionna correctement la bandoulière de sacoche sur son épaule endolorie. C’est que le Mousse-qui-pionce pesait son poids en plombs.

Alors qu’ils marquaient une courte pause afin de puiser les ultimes gouttes du fond de leur dernière gourde, Silène remarqua que Jilam tripotait quelque chose dans la poche de son manteau. Quand elle le questionna à ce sujet, le jeune homme lui révéla un objet étrange à ses yeux du bois et dont elle ignorait tout de l’usage.

« C’est une montre à gousset. Tante Hortia me l’a offerte quand elle nous a quittés.

Ta tante ? Elle est… ?

Non, non. Je voulais dire, elle est partie, très loin. Trop loin, ajouta-t-il avec une pointe de tristesse avant de soupirer. Enfin bon. Elle disait toujours que la vie est propice à l’inattendu. Elle m’a offerte la montre pour mes treize ans. Quand elle est partie, elle en m’a dit que chaque fois que je regarde l’heure, je dois penser à elle, penser à ce que je fais et imaginer ce qu’elle fait, et qu’ainsi elle saura et que je saurai.

Ta tante t’aimait beaucoup. » Silène, songeant à Dayl, capta les pensées de la luciole bleue.

« Des fois, je me dis, que j’aurais dû partir avec elle.

Mais alors tu n’aurais jamais rencontré Nellis.

Oui. » Une vague de nostalgie frappa Jilam.

Silène ajouta : « Et tu ne serais pas dans ce pétrin, non plus. » Le jeune homme ricana. « C’est vrai. »

Un sourire traversa les traits creusés de son amie qui colla une paume froide contre sa joue recousue. « Je suis contente.

De quoi ? »

Ainsi étaient-ils perdus dans un lieu sans nom auquel personne ne songeait. Le brouillard leur dissimulait le reste du monde, si tant était qu’il ait un jour existé. Plus rien n’était certain à leurs yeux.

« Silène ?

 Ça va aller. J’en suis sûre.

Pourquoi ? » questionna le doute.

Et la certitude de lui répondre : « Toi et moi, on se souvient. »

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