« Un soupir, pour tout bagage
Une image en souvenir de toi,
Moi, je m’enfuis, j’abandonne mes rêves d’autrefois »
Cécile Corbel
La torpeur est une drogue. Je sentais cette drogue couler dans mes veines, comme un venin brûlant qui m’engourdissait progressivement. Chez bon nombre d’individus, la torpeur est une sensation lourde, une transition difficile entre deux états qui se veulent contradictoires. J’aime être entre l’éveil et le sommeil, entre l’aube et le crépuscule. Je me suis toujours dit que j’étais un entre-deux, une sorte de gardienne des portes qui veille au ballet lunaire et solaire, à la ronde des heures.
Je sentais les volutes de fumée, une vapeur parfumée, dégagée par un narguilé, nonchalamment savouré par une splendide jeune femme aux traits flous, à la bouche pulpeuse et aux cheveux entortillés de lierres en face de moi. Elle était brune et me souriait. Je ne connaissais même pas son nom, ni d’où elle venait. Elle était là, juste là, devant moi. Je me sentais alors saisie par des caresses. Effleurements aériens, mon amant de tous mes rêves me prenait dans ses bras, sans aucune honte face à la femme qui nous observait. il y avait ces caresses, ces sensations d’être enveloppée dans une rose de soie, dans des draps de satin, oui c’est ça…Pourtant mes draps ne sont pas en satin, loin de là. Mon lit était l’antre charnel d’un corps qui aimait apposer son odeur musqué dans ses draps. Je sais que l’image n’est pas la plus agréable, mais j’ai fait de mon mieux pour vous le décrire.
Oh, et cette voix.
Cette voix caverneuse de cet homme qui m’enlaçait sans pudeur. Je tourne la tête vers son visage qui semble si nette. Ma vision n’est plus aussi trouble lorsqu’elle se pose sur lui. Son visage doux, éclairé par deux prunelles glacé ne me lâchait jamais.
— Atarillë…Viens à moi douce épouse.
Moi, épouse? Je suis trop jeune pour ça, ou peut-être pas, cela dépend des pays. En fait, je suis célibataire, donc oui cela m’étonne qu’on m’appelle comme ça. Serais-je mariée sans le savoir? La bonne blague…Moi qui n’ai jamais eu de vrai petits amis. Il paraît que je les fait fuir, les hommes. Entre mon sâle caractère qui ne supporte pas la moindre allusion mal placée et l’aura orageuse qui m’entoure, selon ma grand-mère, je ne risque pas de trouver quelqu’un.
Ah, c’est le brouah…
Ma colocataire fait un boucan d’enfer. Mais pourquoi je vis avec elle au fait? Ah oui, je suis étudiante, du moins en fin d’études. J’ai un professeur horrible, peu d’argent, une famille dysfonctionnelle…Ah non, pas les idées noires ! Pas ça ! Je n’entends plus sa voix, je ne sens plus le parfum des roses…Non…
J’ouvre les yeux…Je me sens toujours sur un pont reliant deux univers. Comme faisant face à un trou noir qui me ramenait inexorablement à la réalité. Cette lourdeur, le poids de mon corps sur ma conscience, et l’écho de cette voix, qui se mêle à une musique que je crois connaître. La musique de hipster de ma colocataire.
— Hey, Eva, bouge-toi, tu vas être en retard à ton rendez-vous !
Non, je n’ai pas envie d’y aller. Ce professeur me donne la nausée. Cela fait plusieurs mois, non, un an qu’il me fait tourner en rond. Il est vieux, décrépi comme une goule qui aurait la lèpre. Il sent le vide-grenier de ma grand-mère et encore, il y a des choses intéressantes au vide-grenier. Ma grand-mère vend de beaux vêtements, des gants anciens que j’aime lui piquer. Elle m’a refilé plein de vêtements d’avant-guerre…Mais je m’égare. Ce professeur est malsain. Il a un regard de hareng qui vous fixe. Vitreux, vides, ses yeux me font peur. On dirait qu’il va m’égorger au moindre mot qui ne lui plaît pas. Car si moi, j’ai toujours été polie avec lui, l’inverse n’était pas vrai. Cela fait deux ans que je suis sur ce projet d’Histoire de l’Art et l’Art pictural ne m’a jamais parut aussi dévorateur.
Je m’extirpe de mon lit et je fais face à ma psyché, ce grand miroir offert par ma mère-grand. J’ai ce visage rond et enfantin qui m’a valu bien des problèmes. La bouche boudeuse, l’œil vert, la petite silhouette d’une fée sortie d’un conte pour enfant. Voilà mon éternel reflet, le tout avec mon indomptable chevelure rousse et bouclée. Pourquoi je suis là moi au fait? Ah oui, mon avenir…
Je me dois d’exister, de briller, de devenir quelqu’un, mais au fond de moi je me sens liée à autre chose. Un avenir m’attend, subsistant par un passé glorieux que j’ai entrevu en songe un millier de fois. C’était comme si j’avais un rôle important à jouer ailleurs. Quelque chose qui m’échappe. Longtemps je me suis dit que ces idées, ces flashs, ces visions étaient nés d’un esprit rebelle et enfumé de rêveries idiotes. Mais je ne pouvais m’en détacher. C’était fixé à mon A-D-N de façon définitive.
— Eva, grouille-toi !
Mais Tais-toi ! Elle aussi, je commençais à ne plus la supporter ! À m’écouter, on dirait que je suis une vraie émo, franchement. Rien ne va. Pourtant la vie est belle quelque part. La pluie sur la vitre, la douceur de la brise au petit matin. Oui ça fait cliché, je sais. C’est ridicule presque, mais moi j’aime ça. La nature vibrante de vie, d’exaltations étranges, de sensations imperceptibles et pourtant…
Le ciel avait une sombre allure. Un air d’orage sous l’ensemble cotonneux des nuages agglutinés entre eux. C’était relaxant quelque part, de voir qu’en haut il y avait de l’agitation. Je voyais devant moi un palais immense, sculpté dans les nuages, un château paisible, imperturbable, qui faisait face sans broncher aux intempéries. Quand j’étais petite, ma grand-mère était persuadée que je pouvais faire venir la grêle et la tempête. A présent, je pense que tout cela n’était que des coïncidences.
Mais il fallait que je me dépêche. J’enfilais une robe douce, en coton rouge sang, avec un corset de cuir marron, style steampunk. Avec cela, j’ai mis un collant sombre, des bottes en cuir assorties à mon haut, ma montre à gousset, je m’arrangeais comme je pouvais…
—Tu sais que tu es belle, ma douce demoiselle?
Cette voix. Cette présence. Depuis petite, je la sentais. Une fois, alors que j’avais douze ans, j’ai vu devant moi, cet homme, grand, les cheveux en bataille, un air rebelle et doux à la fois. Mais ces yeux…Ils étaient bleus, d’un bleu limpide, comme l’eau de roche. J’en suis tombée amoureuse. Il était là, en permanence près de moi. Mais je ne voulais pas y croire.
— Je suis là, depuis toujours, tu le sais très bien…
J’allais répondre. J’entortillais mes mèches rousses autour de mon doigt…Puis voyant l’heure, j’attrapais mon sac et je sortis dans le salon.
Bon, elle est là.
Avachie sur le canapé, à moitié en train de réviser des cours. Elle n’était pas très grande, un peu sèche au niveau de la taille. Bien que je n’ai jamais été ronde, j’ai toujours apprécié les femmes aux courbes charnues. Ces images de déesses enrobées, de danseuses orientales dépeintes par Delacroix m’avaient toujours fascinées. Elle, elle n’était pas moche, ou inintéressante. Au contraire, elle avait un certain succès auprès de la gent masculine. C’était une vraie crevette, cette Fanny. Ses cheveux courts, son style un peu hipster avec ses grosses lunettes et ses chemises à carreaux. Elle était actuellement en slip et en débardeur avec un moustachu dessiné dessus et une chemise de bûcheron.
— Mais tu as encore mis ce style surchargé? C’est sympa mais bon, tu es plus jolie en petite robe en dentelle je trouve.
— Si tu veux, chacun son style Fanny…
— Oooh ! tu es de mauvaise humeur, je le sens ! Allez, ce soir je t’emmène en soirée ! Cela te fera du bien ! »
Fanny adorait aller en soirée. Elle traînait dans les inaugurations des premières années de psycho ou dans la soirée de Bérengère à l’autre coin de la rue. Moi je n’aimais pas ça. Je préférais passer la soirée avec Abe, une de mes meilleures amies, ou à jouer aux jeux vidéos avec Manuela, c’était beaucoup plus sympa. Déjà que je galérais à trouver un espace vital dans un bocal enfumé et que je passais mon temps à avancer mon mémoire. Je n’avais rien contre tout ça, juste ce n’était pas mon monde.
— C’est gentil, Fanny, mais non merci…
— Allez ! C’est pas en jouant à tes jeux que tu trouveras l’amour !
Je grinçais des dents…Et puis j’allais être en retard. C’est bien beau de me secouer pour que je me lève, de brailler de sa voix sifflante, pour ensuite me prendre mon temps avec ces idioties. Non franchement.
— Mouai, là je dois déjà trouver un moyen d’avoir mon année, je te laisse !
Pas le temps de manger quoi que ce soit, je file dehors. L’air est lourd, chargé de pollution, à peine filtré par les quelques arbres de la résidence. Mais cette sensation de liberté…. Souvent je marche et j’ai l’impression d’avoir des ailes dans le dos, comme si une force m’élevait du sol. Je suis passée de l’oppression à la libération. Elle n’est pas méchante Fanny, mais il y a quelque chose chez elle qui me gêne. Pourquoi je vis avec elle, me direz vous ? Et bien c’est une amie et au départ je n’imaginais pas que cela se passerait comme ça, vraiment pas…
Pourtant de l’extérieur tout va bien, on paye chacune nos parts de loyer, on se chamaille un peu pour le ménage, mais rien de grave. J’aurais pu tomber sur bien pire. Elle était raisonnable, les seules fois où elle a ramené des mecs à la maison, elle l’a fait en mon absence, m’ayant prévenu au préalable et ayant tout rangé derrière. Non vraiment, aucune ombre au tableau…Mais c’était plus subtil que cela, plus insidieux. C’était des phrases anodines, qui me poussaient à changer, à ne plus être moi. C’était une jalousie implicite, qui se cachait derrière les meubles, derrière ses grandes lunettes carrées. C’était elle, tout simplement. Elle me sortait sans cesse des réflexions, des mots durs derrière un enrobage de bonbon milka…
Mais je suis en retard. Je cours à travers les ruelles, j’esquive les regards lourds de sens d’hommes banals qui se transforment en crocodiles. Ils sont là, de leurs prunelles emplies de perversité, à me considérer comme un objet en jupette et en corset. J’avais une envie violente de meurtre, celle qui vous glace le sang et vous donne l’impression d’être un psychopathe en manque de sang de gros lourds. Je sais, je fais une fixette mais ils m’ont pourris la vie sur chaque parvis de Montpellier, dans chaque ruelles, je ne pouvais avancer sans avoir l’impression d’être un gigot ambulant.
— Hey, cette pluie est glacée !
De grosses gouttes se mirent à tomber du ciel. Rien d’étonnant à tout cela pourtant. De l’eau, condensée, inondant doucement les strates de la terre. L’odeur de pluie était semblable à l’humus des terres baignées des cascades. Cette odeur de pluie qui éveille en moi des souvenirs antédiluviens…L’ombrelle de soie aux motifs colorés, un homme habillé en dandy, au sourire enjôleur, et …
— Mais c’est froid !
Cette phrase retentit dans mon esprit “Glace, givre, frost congelant les peaux humaines. Las de votre comportement, que tombe la grêle…”
Et la grêle fut tombée. Je le vis encore devant moi. Ce visage souriant, ce regard bleu limpide qui me fixe sans défaillir. L’eau m’évite, l’eau ne me mouille pas. Souvent cela m’arrivait quand j’étais enfant. Des choses étranges, sans que je n’arrive à comprendre. Je fixe ce phénomène, éberluée. Etait-ce une coïncidence ?
Puis je me dis que je suis en retard et je cours. Tel un lapin blanc, je me ressaisis. Je n’ai pas le temps de me poser des questions. Je franchis le dernier passage piéton, je tourne au chemin, je rentre dans la cour, puis le grand bâtiment au fond, je cours sans cesse, jusqu’à arriver à cette porte.
Puis j’hésite. Je hais cette porte comme je hais la personne qui se trouve à l’intérieur de la pièce. Elle représente ces individus omnipotents, qui se croient tout permis, même humilier une jeune femme qui n’a rien demandé. Je tape à la porte, sa voix impérieuse me dit d’entrer, je m’exécute.
Je pénètre dans cet antre gouverné par l’orgueil d’un homme trop centré sur sa petite personne. Il est là, les cheveux grisonnants et épars, l’air renfrogné, cette odeur d’eau de Cologne évaporée. Il s’énerve, me disant que je suis en retard. Pour toutes les fois où j’attendais ses mails avec la peur au ventre, ou il ne répondait jamais. Pour toutes les fois où il m’a fait venir sans me demander mon avis. J’aurais pu vivre à 400 bornes qu’il m’aurait fait venir. Et sa manie de me malmener, de ne jamais trouver le moindre bon élément dans mon travail.
— Mais pourquoi avez-vous utilisé In design™ pour faire votre mise en page ?!
Pour faire ma mise en page ? Car je voulais faire un bon travail. Je sentais mes veines bouillir. Comme à chaque fois, j’osais à peine parler. J’avais une boule dans la gorge.
— Il n’y a rien dans votre travail…
— Rien ?
— Et oui rien, je vous avez dit de vous calquer sur mon article sur le sujet.
J’observais cet être détestable. Quelque chose de pitoyable se dégageait de lui. C’était un misérable bougre qui passait son temps à hurler sur tout le monde: ses étudiants, sa secrétaire, les autres professeurs. Tout le monde y passait. Cela devait être une triste vie que de passer son temps à user ses cordes vocales pour pas grand chose. Quelque part je le plaignais.
— De toute façon depuis le début je vous le dis, vous êtes bonne à rien.
Je serrais mes poings. Depuis tout ce temps je me retenais de hurler. A chaque entrevue c’était l’enfer, mais je restais polie et je me soumettais à ses colères. Mais cette fois-ci c’était trop. Je voyais sur son bureau quelques feuilles voler et la lumière devenir hésitante. Je fronçais les sourcils, fixant le néant qui clignotait étrangement.
— Mais monsieur, je travaille depuis plus d’un an, il ne peut y avoir “rien” dans mon travail.
— Rien! J’ai dis qu’il n’y avait rien! Vous êtes bouché ou quoi?!
Le néant, rien, le vide. Toutes ces années de travail intensif, de réprimandes, d’humiliation, ce n’était rien. Autour de moi, tout était flou. Je voyais les murs trembler, et soudain la fenêtre s’ouvrir. J’ai juste entendu un cri et senti une force terrible prendre possession de mon corps. Des flashs qui sortaient de nulle part, si ce n’est de moi, un parfum doux et sucré et le professeur devant moi, suppliant, criant.
— Atarillë, je t’avais dit…
— Que…Que se passe t-il ?
Je le vis devant moi. Il n’y avait plus rien si ce n’est cet espace de vide. Une onde d’énergie tournoyait autour de moi et je sentais à mes pieds une douce sensation, comme si je barbotais dans l’eau fraîche d’une belle rivière. Mais comment pouvais-je savoir que la rivière était belle ? Pourtant je ne fume rien, j’ai toujours refusé ce que me proposait Fanny…Mais c’était quoi tout cela ? J’ai sans doute craqué. Oui, je me souviens encore, de tous ces visages qui m’oppressaient, de ces paroles qui m’agressaient, voulant me réduire au néant, au rien de ce monde. Tu n’es rien, rien, rien.
— Écoute-moi !
Je sursautais. Il était là, c’est vrai. Mon pauvre ami, mon doux amour que j’ai longtemps aimé et refoulé, quel fléau tu as face à toi, un rien incarné en rien, c’est amusant…
— Cesse de te laisser aller à leurs mensonges, ce ne sont que de pauvres êtres, dénués d’existence, tu n’es pas rien ma douce, crois-moi…
Je le vis s’approcher de moi, tendrement. Son étreinte me réchauffait tout doucement, là où j’étais transi de froid. Je ne m’étais pas rendu compte, ma peau était devenue aussi froide que les grêlons, comme si elle avait absorbé la pluie glaçante de tout à l’heure.
— Ils savent que tu es importante, ils le sentent…Tu es toi, personne ne pourra changer cela, ils sont jaloux, ne les écoute pas…
Je sentais son corps contre le mien et ses lèvres qui se glissaient dans mon cou, tendrement. Je frissonnais, j’avais peur, je ne savais plus ou j’étais, qui j’étais… Ce parfum de rose, de cette main tendre qui me coiffait doucement, tout cela résonnait en moi sans que je ne sache d’où cela venait.
Ce rêve m’emportait à nouveau.
A présent, c’était une femme sublime qui se présentait à moi, aux doux traits ronds. Sa bouche était pleine de douceur lorsqu’elle s’apposait sur ma joue.
Que tu es belle ma fille…Voilà ce qu’elle disait. Bon sang je me perds…où suis-je ?
— Tu es entre mes bras belle Atarillë, perdue au ” Lac des fées ”
Soudain j’ouvris les yeux. Je me retrouvais près d’un lac, une musique apaisante en tête. Je ne reconnaissais pas ces lieux. Pourtant ils avaient quelque chose de familier. C’était comme si j’y avais toujours vécu. C’était comme une réminiscence, un souvenir trop vite oublié dans ma jeunesse. Mais ce souvenir m’échappait encore, me narguait. Tout ce que j’avais refoulé explosait littéralement une un songe extatique.
L’onde coulait doucement, suivait son sillon, et mes pieds nus caressaient l’herbe tendre. Face à moi se trouvaient le palais d’une enfance fantasmée, les jardins remplis de roses odorantes, les statues aux rondeurs sensuelles. Elle était là, me prenant dans ses bras, sa voix riante sonnant comme une douce mélodie à mes oreilles. Puis il était là également, venant jouer avec moi dans ce somptueux jardin, aux mille fleurs colorées, aux pétales envolés à la brise champêtre. Ah ! Que c’était doux, cette sensation de liberté libre, de t’aimer sans contrainte, de me sentir chez moi.
Puis doucement ce fut le déluge. Je voyais l’eau tout engloutir, tout comme je sentais les larmes glisser sur ma joue. Un frisson parcourut mon échine. Les odeurs martyrisait mes narines tant elles étaient multiples : douces, acides, âcre et boisées. Ma peau était lovée contre de la soie tant la sensation de douceur était extasiante. Finalement ce fut les picotements qui me lancinaient les doigts qui me ramenèrent à la raison.
Je revoyais le bureau de mon professeur. Il était, prostré en position fœtale, accroupi dans un coin sombre de la pièce. Tous les dossiers s’étaient envolés, éparpillés, le bureau était à moitié brisé. J’avais déclenché un ouragan. C’était réellement moi qui avait fait ça ? Le doute revenait, comme un serpent insidieux. Que c’était-il réellement passé ?
— Vous êtes un monstre! Comment ? Mais comment ?!
On aurait dit que j’étais devenu un Grand Ancien à ses yeux. J’esquissais un sourire carnassier. Il n’avait eu que ce qu’il méritait au fond. Je flottait entre la satisfaction personnelle et la peur de moi-même.
— Atarillë…
Cette voix. Ce murmure qui me rappelait à l’ordre…Oui, je reprenais conscience, véritablement. Je vois cette pièce mise sens dessus dessous, ces meubles renversés, cet homme misérable et apeuré. Et je me fais peur. Je ne sais pas ce qui m’arrive.Je me mets donc à courir, le plus vite possible. Loin de cet enfer. Je sentais à nouveau cette oppression, cette sensation terrible de m’être mise à nue. C’était comme si mes jambes ne touchaient pas le sol. Je m’envolais loin, loin de tout..
Encore quelques mètres, des couloirs interminables. Que suis-je en ce monde? Suis-je réellement humaine? Je ne pense pas, je ne sais pas. Il y avait quelque chose en moi, comme une boîte de Pandore qui ne demandait qu’à s’ouvrir. J’entendais le professeur couiner au loin, mais moi je n’étais plus là. En face de moi le paysage se métamorphosa. Il se tordait dans tous les sens; les trottoirs coulant comme du miel sur le béton à moitié arraché à la croûte terrestre. Le ciel était le centre de la Terre et les nuages formaient des marches, un escalier interminable que je prenais à droite, puis à gauche.
Puis j’ai ouvert les yeux.
Et il était clairement là, devant moi. Arthur, oui, c’était son nom. Je sentis ses mains froides sur les miennes, son souffle contre ma joue, et un baiser venant égratigner mes lèvres avec une tendresse ingénue, un air de violon tournant dans mon esprit comme un air champêtre.
— Tout va bien se passer, mon amour, ne t’en fais pas…
Puis ce fut le néant.
Jamais je ne m’étais sentie plus libre, plus envolée qu’à cet instant. Je n’existais plus. Du moins, je n’étais plus en ce monde lourd, ou la gravité nous figeait au sol de sa puissance colossale. Ou le vent nous torturait de son chant mélodieux, sans jamais nous indiquer où se trouvait la porte de ce royaume que je cherchais depuis ma naissance.
( L’histoire vous plaît? Pour avoir la suite, rendez-vous sur mon compte Wattpad, juste ici: https://www.wattpad.com/user/PersephonaEdelia )
Incroyable !
Tu comptes terminer ton roman d’ici combien de temps ?
Merci 🙂
Et bien j’en suis à une bonne moitié, j’aimerai bien le finir au moins a la fin de 2019 cela serait bien, mais il y aura plusieurs tomes à mon avis
Top, tiens nous informé !