BUELL 2011
L’air est encore frais, mais pour combien de temps ? En ce début de mois d’août la petite route des coteaux d’Aix que j’emprunte est quasi déserte. Ma fidèle moto BMW enfile les virages avec élégance et brio égale à elle-même, étonnante de légèreté malgré son carénage intégral, sa bagagerie et son poids non négligeable.
L’odeur du sous-bois et la rosée à peine évaporée me chatouillent les narines, le vent me caresse le visage, je fais corps avec ma machine qui ne fait pas ses 150000 km et ses 12 ans, bref le bonheur !
Dans une demi-courbe que je négocie, alors que penché vers la gauche, mon regard est pointé vers la sortie du virage, j’aperçois du coin de l’œil sur la droite une silhouette sur le bas-côté.
Une bécane noire, agressive, ramassée, sportive dépouillée, presque vulgaire ! Sans doute une BUELL.
A cet instant, celui où cette machine s’imprime dans ma rétine, je suis pris d’un violent désir pour elle, irrationnel, je suis dessus, je la chevauche, je la possède, je la fais hurler en montant dans les tours.
A la sortie du virage, la belle s’éloignant, je reprends mes esprits, ma moto se redresse toujours avec classe et enchaîne la prochaine courbe, et soudain la honte m’envahit, l’espace d’un instant j’étais prêt à l’abandonner, elle qui ne m’a jamais trahi, m’a servi jour après jour, elle qui parfois encore me donne du plaisir, elle qui encaisse toutes mes humeurs et mes caprices.
Pour une petite guêpe noire, éphémère et violente, j’oublie ma fidèle compagne de route.
Ça va faire trente ans que je roule à moto et pourtant je ne sais toujours pas ce qu’il y a dans le cerveau d’un motard, à moins bien sûr, que physiologiquement ce ne soit pas dans l’encéphale que la réponse se trouve !
Bon sang, tout de même, j’aurai donné cher pour monter cette S… sportive !