1-. 1er Article.
Début mars 2020.
BARANQUILLA. COLOMBIE ATLANTIQUE :
Une semaine et demi de passer des tas de remous et interrogations, La tristesse,le pourquoi. Après toute cette préparation , ce départ, ces 1 an et demi de mer , pourquoi tout, doit il s’ arrêter et me renvoyer vers nulle part .Envie de chialer , de crier , de retrouver ma vie , mon bateau, ma maison, ma belle liberté et ce plaisir chaque soir, à l ancre ou en mer et rien autour , chez moi sur ma coquille confortable au milieu de la nature sans juges , ni conseillers .Pourquoi fallait il tout perdre . Regard vers le cosmos …et attente pour comprendre , car il y a une réponse à tout.
Samedi 22 février 2020
Ce soir, perdues dans Baranquilla, Olga ma compagne de naufrage et petite amie, rencontrée 1 mois plus tôt à Santa Marta ,a disparue dans la fatigue et lassitude du 1er soir , alors que nous arpentions ,épuisés, les rues de la ville fièvreuse en plein carnaval, ce samedi 22 février, à la recherche d ‘ un hotel peu honéreux . Je ne trouverai pas d’ hotel ,ni Olga et passerai la nuit Dans un coin sombre, á l abrí des regards dangereux . Elle, réapparaîtra quelques jours plus tard . Grâce à la description que j’ai faite d’ elle à un gars du coin en lui indiquant oú je logeais. Je suis retourné dans le quartier de las Flores, par instinct, espérant qu’ elle en ferait de même. Las Flores, le “barrios” au limites de la périphérie Baranquillaise où nous avons aterri ce 1er soir, abandonnés à notre sors par des garde- côte je suppose pressés, de rejoindre le carnaval. Un tout petit peu d’ aide fait bien les choses.
Plus d argent dans le milieu de la 1ere semaine ,négociation avec le patron de l’ hotel finalement dégoté dans ce quartier , puis regime d ‘un repas et quelques snacks journaliers .En attendant que mes appels soient entendus . L angoisse dans cette immense agglomeration , du mal pour trouver la moindre chose . La banque contactée, mon frère doit me transmettre la nouvelle visa , l attente anxieuse et les premiers amis qui se manifestent , Cathy, Alfons mon copain de prepa du bateau a Oropesa , Simon mon premier équipier , et enfin la communauté du forum nautique Hisse et Ho, toujours présente , 2 eme appel en quelques mois et malgré des questionnements une réponse honorable des gens de la mer . Voila , un synopsis du recit a suivre .
Vendredi 21 fevrier 2020
Reveil a Santa Marta , beau temps et la météo qui prévoit une accalmie a partir d aujourd hui. Préparations pour le départ , passage à la station essence et Olga veut des cigarettes . Retour vers la plage, je plonge et pars acheter des cigarettes , vers 11h nous prenons enfin le large , premiere partie du voyage agréable sous force 4 et peu de houle , vers 16h le temps s’ est levé mais rien de méchant pour les environs, force 6 a 7, vent et houle de travers, tribord amure , houle environ 3,50m . Grand voile rentrée car j ai observé une couture qui a sauté et un début d’ouverture sur la partie supérieure . Donc au genois , nous continuons d ‘avancer a 5nds et plus .
18h30, le jour baisse nous ne sommes qu ‘a quelques encablures des feux rouges et verts qui annoncent , l’ entree du canal de Baranquilla .
19h :la nuit est presque là, un demi mille a parcourir , j ‘arrive de l’est et j ‘avance perpendiculairement au canal, à plusieurs milles des côtes . La sortie de la rivière Magdalena crée pas mal de remous , ce qui justifie ce canal bien avancé vers le large ,Un coup d’ oueil au GPS confirme ma position ,a priori hors des dangers et hauts fonds..
19h15. Nuit noire , les yeus rivés sur les feux d entrée , j ai mis le moteur afin d’ affiner ma trajectoire et d’ arriver au plus vite …..Trop tard. En me retournant , sur tribord , derriere moi assis dans le cockpit, un mur d eau déboule et je ne l’aperçois qu’en dernieres secondes , trop tard , je ferme et plisse les yeux, je m accroche a Acapella et , d un coup, plus rien n’ existe. La vague ne nous fait aucun cadeau , dès son contact avec le voilier elle le redresse sur son flan babord et je suis ejecté sur tribord dans le choc. Je m’ envole sans rien toucher et je retombe a la verticale dans la mer apres un bond de 3 ou 4 metres voire plus dans les airs . Je m’ enfonce sous l ‘ eau et je remonte comme une bulle. Le plus surprenant , c’ est que dans ces moments là, il n y a pas de peur , j’observe, j’ analyse . Par exemple, en m’ enfoncant sous l eau , je ne bouge pas , je pense : Ok je m’ enfonce et je vais remonter comme une bulle ou encore , tiens c’ est aujourd hui que ma vie s’ arrête , le destin voulait qu’Olga soit avec moi,,etc , juste des pensées qui me traversemt l’ esprit .. Puis je remonte et j’ apercois Acapella , mats brisé, chandeliers et filière défoncées , un hublot explosé, mais elle flotte , et la lumiere fonctionne. Je rejoins rapidement le bord en nageant les 7 ou8 mètres qui me séparent du voilier et profite de l’ accalmie pour remonter a bord où j entends la voix d Olga sous les décombres qui me supplie de la sortir de lá . Ceci fait elle s’installe tant bien que mal dans un coin. Soulagement, elle n’est pas blessée . .Mais elle a froid et reçoit des trombes d eau à cause du hublot explosé . Plus tard je lui amenagerai un coin mieux protégé et plus au sec.
Une longue nuit s ‘ installe . Une nuit de peur et de froid , d’épuisement et de faim. Plusieurs fois dans la nuit je me laisserai tomber, sans plus aucune ressources physiques et je repartirai après quelques minutes avec l’énergie du désespoir. Éviter la panique. Pour cela ,je ne trouve qu’un remède, m ‘activer. Bouger, ne pas penser. Je patauge dans emviron 80 cm d ‘ eau. Toutes nos affaires flottent au milieu des décombres divers, des planchers. Rien n ‘a été épargné. Argent ,papiers ,matériel électronique, Mon Mobile. Je tente un appel Vhf sur la radio de bord, rien,bientôt elle s’ éteindra, le Vhf portable, pas mieux .lui aussi meurt doucement . La lumière aussi menace et nous plonge 2 ou 3 fois dans des ténébres effrayant de vacarme. Mais elle perdure. Reste les fusées . La côte est visible ,il se peut qu’ on nous aperçoive. Une ,deux, toujours rien . J ‘en conserve quelques unes pour le cas où un bateau apparaîtrait, mais la nuit s’écoulera, j’ épuiserai les fusées et personne ne viendra. Pendant ce temps Olga pleure et gémit,recroquevillé sur la banquette saturée d’eau,et régulièrement arrosée par les déferlantes qui cognent et s’engouffrent, menaçant de nous achever à tout moment. Je lui aménage un espace sur tribord, mieux protégé. Ça va un peu mieux pour elle, mais un morceau du mats ,cassé et toujours relié au bateau par les drisses et aubans, sous tension, frappe durement sur la cabine et menace d’exploser les derniers hublots ou pire d’exploser le roof. Il faut que je sorte et que j’ essaye de soulager la tension . Dehors ,c ‘ est le noir . Seules nos lumières intérieures brillent encore. Plus de Lampe frontale. Par chance je retrouve mon petit couteau de cuisine. Je sors dans la tourmente et me rapproche du mats. J’entreprends de couper tout ce qui est coupable. Après quelques longues minutes d ‘ acharnement,le mats se detend et se couche doucement dans l’eau le long du flanc tribord d ‘Acapella . Ouf !. J ‘ en profite pour me faufiler vers la proue .l’ ancre a été ejecté et les 50 mètres de chaines et bouts avec ,mais elle reste fixé au bateau. Ce qui veut dire que nous sommes immobilisés. La profondeur ici n ‘exède pas 10 à 12 mètres ou nous n ‘ aurions probablement pas cassé le mats. Encore une fois je cisaille tout ça avec mon couteau de fortune. Bouger, se laisser pousser par les embruns et se rapprocher de la côte. Je l ‘ai apercue avant la nuit. C ‘ est une côte basse qui presage un aterrissage sur une plage de sable. Les heures passent ,je continue d’écopper et de m’activer, ne pas penser. j’ évacue tout ce que je peux, s’ alléger. Les banquettes saturées d’ eau et qui approchent facilement les cinquantes kilos sont évacuées ainsi que tout ce qui me passe entre les mains d’ objets encombrants et potentiellement dangereux. Pendant ce temps là, nous remuons et sommes ballotés de tout côtés. Je me cogne et me blesse plusieurs fois mais je m’ acharne, . Ne pas penser.
Plus tard dans la nuit, je sors et j ‘ aperçois pour la 1ere fois la côte bien dessinée . Nous nous sommes sensiblement rapprochés. Dans la noirceur nocturne, elle est là . Une végétation basse que je devine aride confirme une plage de sable encore invisible en aval de celle-ci. De plus en plus souvent ,nous nous échouons temporairement. Ces moments là sont les plus pénibles car la poussée et le choc des vagues crée un vacarme effrayant et nous incline abruptement. La nuit avance imperturbablement dans son concert infini de bruit de vagues et de chocs . Les choses se sont stabilisés . Olga s ‘ est relativement apaisée. Je jette un coup d’ oeuil à l’ extérieur et oh! Soulagement ! Pour la 1ere fois, je réalise que nous allons probablement nous en sortir . La côte est là toute prôche. Même si Acapella succombe aux pressions diverses qui là malmènent, nous pouvons raisonnablement envisager de nager jusqu’ à la plage. Mais pour l ‘instant pas question de bouger. Patienter, attendre d’ être encore plus prêt et rester alerte et actif. J ‘ aperçois Olga qui malgré le froid et l’eau somnole légèrement et je suis soulagé. Moi aussi j ‘ ai ralenti le rythme . Je me rapproche d ‘ elle pour un petit câlin si bien venu. Encore quelques heures de courage et nous atteindrons le rivage. Vers 4h du matin, Acapella se pose doucement sur son flan bâbord tout prêt du rivage, en douceur. Mon vaillant gallion n’a pas fléchi. Elle nous aura protèger jusqu’ _au bout et ramenez en sécurité.
Soulagés mais épuisés. Nous rassemblons 2 ou 3 affaires. Et nous évacuons mon cher navire. Une belle plage nous accueille. Il doit être environ 4 heures ce matin. Nous reverrons le jour s’étirer et la vie reprendra… Mais le repos est encore loin .Pour l’ instant, le bonheur d ‘ avoir survécu oblitère totalement tout le reste . Vivant !!! Ensemble !!! que demander de plus…
Á suivre…
Aujourd’hui. Samedi 9 mai 2020 ,Cartagène des Indes,Colombie :
.. Je compte écrire une série d’ awrticle sur les péripéties et incertitudes que nous avons déjà traversées , celles qui sûrement nous attendent encore et ce lent, pénible, retour à la vie dans une Colombie insécure et impitoyable…… Secouée par le chaos mondial du Corona virus…. Enfin, cette relation naissante, passionnée, tourmentée et fragile avec celle qui me guide et m’aide à mieux comprendre ce pays et cette mentalité qu’ elle connait si bien, alors que je bredouille fébrilement sa langue….
Suivez-moi !….