Elles me croient pessimiste, désabusé, voire dépressif. Elles pensent que je regarde le futur avec des yeux abîmés. Des yeux sans tain. Elles croient que je vais mal, que je souffre au plus intime de mon moi profond. Elles se trompent. Pleinement. Rigoureusement.
Par moments, la nature les rappelle à l’ordre. Pluies intensément courtes. Vents soudainement virulents. Sécheresse lourdement longues. Canicules à répétition. Les inondations soudaines qui noient les maisons. Les tornades qui les éventrent.
Mais elles s’accrochent à un présent qui les rassure encore un peu. Tentent de gommer l’inacceptable qui, parfois, leur fait peur. Se persuadent que rien ne peut empêcher la bonne marche du monde. Ni les experts qui menacent. Ni les porteurs de désespoir qui se manifestent.
Elles ne veulent pas entendre mes menaces. Elles préfèrent les ignorer pour ne pas sombrer. Dans un désespoir immense. Dans une dépression intangible. Dans une dégradation systémique. Elles ont peur, tout simplement. Mais la peur finit par tuer.
De partout, des alarmes sonnent. Depuis les villes et les banlieues, surtout. Triste condition humaine qui perd, peu à peu, ses repères. Vainement, elles cherchent une route à suivre. Un avenir pour se projeter. Impossible envol et semelles clouées au sol.
Elles se serrent la ceinture en se plaignant un peu. Elles vivent plus chichement. Plus modestement. Autour d’elles, elles voient des cordes s’user, des esprits s’échauffer. Des corps vengeurs. Des cœurs perdus. Des familles lacérées. Des enfants victimes.
Difficile pour elles de ne pas chercher à se rassurer. De ne pas profiter de ce qui est encore possible. De ne pas tordre le cou aux idées noires. Le système actuel ne se délitera pas. La bête climatique ne gagnera pas. Et la bête humaine n’adviendra pas non plus. Quoique…