Chapitre 9 – La tension
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La jeune femme se retourna vers son compagnon : Une évidence lui sauta aux yeux. L’homme n’était pas nerveux.
Mais les minutes passèrent et elle dû admettre son incapacité à faire confiance. Son esprit ne cessait de considérer l’insouciance de ce type qu’elle ne connaissait après tout que depuis quelques heures. Le doute traînait au réfectoire et à la salle d’étude de l’esprit de la couventine. Il courait avec elle un 80m haies, comme le faisait cette aspirante au titre, cette salope qui avait l’habitude de lui coller au cul, de marteler le sol dans ses foulées, la seule capable de se soulever en même temps, capable de lui souffler sur l’épaule. « J’ai seulement besoin que vous me confirmiez… » implora-t-elle. L’homme resta coi. Il n’était peut-être qu’un idiot. « Au final, vous n’aurez pas fait grand-chose pour me tirer de là.
— Ce qui vous est arrivé est entièrement de votre faute. Votre passé ne me regarde pas, mais je vous savais parfaitement capable de tout expliquer. Et puis, j’avais de la compagnie.
L’homme secoua son journal.
« Bon sang, vous… vous… »
Les ingrédients d’une réaction en chaîne s’alignaient parfaitement. Falsetti avait le don de la chercher. S’il s’était débarrassé de la bombe, elle se promettait de lui remettre ça dans le nez. Mais dans le cas contraire, elle allait lui faire payer ses angoisses, en autant qu’elle vive pour le frapper.
La surveillante se leva. Gerflynt la suivit des yeux alors qu’elle pivotait pour entrer dans le poste de pilotage. La femme dégageait une féminité équilibrée. Capable d’autorité, elle semblait également bienveillante envers les autres, ces autres dont elle aurait tant aimé faire partie, les normaux. Elle la vit susurrer un mot à l’oreille de l’ingénieur de vol. Quelques minutes plus tard, on les entendait plaisanter. Cette femme avait un p’tit copain avec qui tout partager. Cette femme se rendait au bout du monde avec lui. Cette femme était respectable, ce que la môme n’allait jamais devenir, à cause de cette naissance. Gerflynt tenta à nouveau de croiser les bras, mais sa chaîne lui rappela son rang. La poutre dans sa gorge, lui signala l’assaut d’une nouvelle montée de colère. Les paroles de sa révérende mère se ruèrent à son secours. « Inspirez… Expirez…». Il était impératif qu’elle se change les idées, qu’elle parle de tout, de n’importe quoi. « Au couvent, on a dû vous raconter.
— M’mm… Vous vous êtes entichée d’une supposée demi-soeur.
— Ma ressemblance avec Eleanor Sorensen est flagrante. Il faut être idiot pour en douter. Ma Mère s’inquiète sans raison. Elle est tout ce que j’ai en ce monde.
— Bien entendu, un héritier de plus dans une famille de gangsters, ça n’a jamais posé problème… »
La jeune femme toisa l’italien. « Vous me croyez naïve, mais je sais ce que je fais. Je ne cherche pas l’argent et franchement je me tape de cette famille de criminels.
— Vous vous mettez pourtant en danger.
— Pfftt ! Laissez-moi rire. Trois heures depuis que je suis sous votre supposée protection que déjà je frôle la mort à deux reprises. J’ai beau repasser tous les scénarios, je ne peux pas exclure celui où c’est vous qui étiez visé par la b… »
Falsetti plia son journal, l’air peu amusé. « Sur ce vol, il y a de bien meilleurs cibles que moi.
— Ah ! L’icône de la conscience tranquille… Deux pistolets dans sa valise, un revolver dans son bagage à main et un Springer dans la poche intérieur de son veston. Ouais.
— Comment avez-vous osé, demanda l’Italien qui pour la première fois du voyage semblait près de perdre sa contenance.
— Avec cette houle, les bagages ont bougé. Vous n’êtes peut-être qu’un idiot. Ne pas s’en faire alors que la dyn… » Morsure de lèvres. « les p’tites poupées sont dans mes bagages, hein ? Vous n’avez pas songé à ce détail, vous étiez en bonne compagnie, évidemment ! Donnez une femme à un Italien et plus rien n’existe… »
Gerflynt était à nouveau sur le point de faire un sprint.
— Ne vous faites pas de mauvais sang, je connais l’horlogerie, » répondit Falsetti.