Deux Joyaux Violets. Chapitre 21,1.

6 mins

Un Noël maussade, partie 1. 

TORI

La veille de Noël approchait, l’école avait organisé une soirée pour les présents, afin de nous rassembler lors du Réveillon. Je trouvais l’initiative belle, mais Basil et Aiden n’étaient pas du même avis. J’avais essayé de les motiver, pour m’accompagner mais rien n’y fait, ils étaient catégoriques. J’ignorais s’il s’agissait d’une simple envie ou d’un véritable rejet de leur part. Il était vrai, Noël n’était pas une fête que tout le monde célébrait, étant une fête religieuse en premier lieu. Pourtant, mes parents aimaient la fêter et y prenaient un véritable plaisir. J’appréciais ces repas familiaux, nous n’avions pas nécessairement besoin d’être nombreux, juste à trois, à discuter et rire pendant que la télévision passait en boucle des bêtisiers grotesques. L’ambiance chaleureuse de l’intérieur de la maison, contrastait le froid hivernal à l’extérieur, nous nous sentions comme dans un cocon, inatteignables, en sécurité. Mes parents me manquaient beaucoup, et j’espérais qu’ils passaient un excellent Réveillon.

 Le château avait été décoré par le club d’Elfes qui prenaient soin du jardin, voulant rendre le sourire aux malheureux, coincés ici. En vérité, la plupart ne pouvaient se payer le transport, ou n’avaient simplement plus de famille, et je pensais alors à mes deux camarades, seuls dans leur chambre. La Salle Principale était ce qu’elle était, soit un véritable bazar, pourtant un immense sapin s’ajoutait au foutoir habituel. Des guirlandes avaient été accrochées ici et là, tandis que la lumière et la musique avaient été changées pour s’accorder avec l’esprit de Noël. C’était une réussite pour le club, bien que ce n’était pas aux goûts de tout le monde.

 Je lisais dans ma chambre, l’heure avançait et je pouvais entendre les gloussements des filles de mon couloir, se préparant ensemble joyeusement à la fête. Je me mis à sourire, certains y trouvaient un certain réconfort tout compte fait. J’attendais Oswin qui devait me rejoindre. Elle apparut quelque temps après, l’air affolé.

― Toi, il t’est arrivé quelque chose, je devinai, ayant une confiance aveugle à mon intuition.

 Oswin était plus grande que moi, plus mince mais aussi plus agile. Elle me mettait ma raclée lors des entraînements avec monsieur Jin. Pourtant, elle semblait bien fragile à cet instant.

― T’es pas une Psychic pour rien, ma grande.

 Je levais les yeux au ciel, bien consciente qu’elle changeait de sujet, c’était un de ses meilleurs talents. Je décidai alors de me taire, je lui en avais déjà fait assez baver. J’avais mis du temps à obtenir la confiance d’Oswin. A vrai dire, elle m’avait énormément énervé à m’ignorer de la sorte, mais il fallait également avouer que j’étais très envahissante. Elle s’était d’abord rapprochée d’Aiden, ce qui est assez incroyable venant de leurs parts à tout le deux. La Vampire était alors obligée de me parler de temps à autre et petit à petit, elle s’était ouverte à moi. Pas complètement, mais l’évidence fut plus criarde lorsque nous l’avions aidé, avec Basil. Je pensais d’ailleurs qu’elle se sentait redevable, bien que ça ne soit pas le cas. C’était ainsi qu’Oswin et moi étions devenues de très bonnes amis, bien qu’elle ne me disait pas tous, je savais que j’étais celle sur qui elle pouvait compter. Bien qu’il y avait cet idiot d’Aiden, mais c’était une autre histoire.

― J’étais avec Aiden. J’ai essayé de lui faire changer d’avis mais il résiste.

 Je ricanais.

― Je me doute, c’est pareil de mon côté avec Basil.

 Elle soupira et s’allongea sur son lit, défaitiste. Nous nous préparâmes ensuite, sans aborder le sujet des garçons. Oswin, contrairement à moi, avait ramené une magnifique robe mauve qui lui tombait sur les chevilles, sa grande taille harmonisait parfaitement la robe. Ses cheveux étaient coiffés et incroyablement volumineux, la Vampire transportait une aura remarquable, inspirant le respect. Je ne pouvais pas en dire autant de moi, je n’avais qu’une jupe d’été avec un joli débardeur.

― Tu te fous de moi, là ? Elle semblait mortifiée.

 Je savais qu’elle parlait de ma tenue, je l’ignorais en cachant mon fou rire, je n’avais même pas emporté de maquillage. Elle décida alors de me prêter un de ces ensembles noirs qui était simple mais assez élégant. Elle me maquilla ensuite, telle une mère qui s’occupait sa fille.

― Tu me sauves, tu sais ça, riais-je et elle me fit un clin d’œil amusé.

 Il nous fallut seulement quelques minutes avant de sortir de la chambre, toutes pimpantes. Arrivées dans la Salle Principale, je découvris une toute nouvelle ambiance, assez agréable, les élèves semblaient heureux, enfin pour la plupart. C’était toujours grisant de ressentir, en tant que Psychic, autant de bonnes émotions. Celles-ci écrasaient les sentiments moroses, les rendant presque imperceptibles. Il y avait beaucoup de monde, les deux tables devaient contenir environ cinquante places chacune, de quoi bien remplir la salle. Le club de musique avait saisi la scène pour jouer quelques morceaux et la plupart des invités se poussaient devant le buffet pour tenter d’obtenir une coupe de champagne.

― C’est plutôt classe, j’ai pourtant entendu pas mal d’anciens élèves critiquer Noël à Ecclésia, dit alors Oswin en zieutant sur les élèves.

― On a peut-être de la chance cette année, répondis-je.

 Nous nous lancions un simple regard avant de sourire, prochaine étape : récupérer du champagne. C’est alors que nous nous engageâmes dans la foule, tout en riant.

 Le dîner était servi sur les tables, chacun avait le loisir de s’y prêter lorsqu’il le souhaitait. Oswin et moi optons pour le champagne, avec deux coupes, puis trois et quatre. Je me mettais à rire pour tous et n’importe quoi, Oswin m’accompagnant agréablement. Je me servais de ma télékinésie pour faire flotter les verres au-dessus des têtes, et pensai alors qu’il me fallait quelques grammes d’alcool dans le sang pour me servir de mes pouvoirs comme un chef.

 J’éclatais de rire, attirant de nombreux regards par la même occasion.

― Regarde-moi ces têtes de petits cons de riches là, se mit à marmonner Oswin.

 Ça me fit rire, encore.

― Je déteste les riches, continua-t-elle, surtout les gosses de riche, ce sont les pires. Ils ont tout et ils n’en branlent pas une ! Ils demandent toujours plus, plus, plus…

― Comme ce connard de Cédric, je lui réponds.

― Ouais ! Elle hurla presque. Ce connard de Cédric ! Je l’ai revue d’ailleurs, avant qu’il ne rentre chez lui dans sa grande maison vide de sens.

― Ah merde.

― Ouais, il voulait encore me forcer à sortir avec lui, ce malade.

 Une seconde passa, le temps que je digère cette information, l’alcool n’aidant pas. Je clignais des yeux pour essayer de devenir plus lucide.

― Attend, quoi ? C’est pour ça qu’il te harcèle depuis la rentrée ?

 Un semblant de lucidité illumina ses yeux mais elle se mit à ricaner ensuite.

― Ouais, enfin, c’est compliqué. Je l’ai connu à New York, je travaillais dans le bar de mon père et il est venu un jour avec le sien. C’est un putain d’homme d’affaires qui a des parts un peu partout dans la ville, et il participe au financement du bar. Au début, on couchait juste ensemble, il n’y avait rien de plus. Je l’esquive par ce qu’il ne m’intéresse plus maintenant, sauf qu’il me suit à la trace !

 J’ouvrais grand les yeux, Oswin m’avait caché cela pendant tout ce temps, elle vivait cet enfer seule, sans l’aide de personne.

― C’est du harcèlement sexuel et c’est grave ça, il doit être puni ! On peut le balancer, Madalena…

― Aiden l’a menacé, sans que je ne lui dise rien, Oswin me coupe la parole. Cédric me suivait tellement qu’Aiden a fini par le repérer. Après ça, je ne l’ai plus vu. J’ai reçu une lettre de mon père tout à l’heure, en m’expliquant que je ne pourrais pas rentrer pour les prochaines vacances non plus car il avait perdu un financement important pour le bar. Je te laisse deviner qui c’est.

 Le père de Cédric, oui. Je la pris par le bras pour l’asseoir un peu plus loin de la scène, le bruit parut plus étouffé. Nous fûmes sur la marche d’escalier en un instant, en face de la Salle Principale.

― Je suis désolée Oswin, mais ce n’est pas ta faute, tu en es consciente ? Il n’a pas à t’obliger quoi que ce soit, et si ton père a des problèmes, ce n’est pas ta faute, c’est celle de Cédric. Il est violent et misérable, tu vaux beaucoup plus que lui.

 Oswin se mit à sourire tout en buvant son verre. Elle ne croyait pas à ce que je disais, mais mes paroles lui firent plaisir. Pourtant, j’avais raison, c’était un agresseur sexuel, ces agissements méritaient la prison. Mon esprit, embrumé par l’alcool, essayait déjà d’imaginer tout ce que j’allais lui faire subir.

 La soirée n’avait plus la même saveur. Oswin ne pouvait plus cacher son désespoir derrière son masque immuable. Il ne restait plus que quelques minutes avant minuit, mais je décidai de monter dans notre chambre, tout en veillant à faire flotter une bouteille de champagne jusqu’à moi.

 La nuit fut longue et douloureuse, mais j’étais auprès d’elle.

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2 Commentaires
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bbbbbbb ccccccccccccc
bbbbbbb ccccccccccccc
2 années il y a

J’aime beaucoup l’esprit de Noël décrit, mais c’était trop beau.
J’ai l’impression que Tori va prendre la main!

Galindo Gaëlle
2 années il y a

Le club des lutins ! Fallait y penser.

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