« Cher Théo,
“Ailleurs est un mot plus beau que demain”, disait Morand. Alors je sais, ce n’était pas l’homme de l’exemple. Théo, je nous souhaite de nous revoir. Je ne veux plus que tu me dises “à demain”. De toute façon, il y a longtemps que je ne t’ai plus entendu. Je veux que l’on soient ensemble, quelque part sur Terre. Ailleurs. Le futur ne m’intéresse plus. Je veux du chemin, de la distance. Je veux avancer. Le temps arrive à nous. Ce sont mes pieds qui me porteront à toi. Je crois que c’est ce que tu cherchais à me dire depuis toujours. D’arrêter les “un jour” pour “allons”. Voilà ce que cette campagne m’apporte. Tes mots. Ceux que tu me répétais et qui me manquent parfois tellement. La sagesse de tes pensées apparaissent avec l’air du matin. Les goutes de la rosée comme tes larmes de gaité. Tu me manques. Toi, ta personne. Ta façon de regarder. D’aimer. Ton silence me fait peur. Où es-tu ? Que fais-tu ? Tu avais dit, tu avais promis. Et je me suis tue. Parle, parle. Raconte. Comment va Lyon ? J’aime cette ville. Encore. Je n’y suis attachée que par ton regard. Mais je l’aime.
Tu verrais, ici, tout est beau. Jusqu’à la pierre cassée, on croirait lire une histoire. Comme un tableau dans lequel l’auteur y cacherait sa couleur. Qui est le peintre de la vie ?
J’ai gardé ton collier, celui que tu m’avais offert pour mon départ. Je l’ai toujours près de moi. Je lui fais visiter ce que tu ne peux pas admirer. La campagne est comme nos escapades sur les quais. Une suspension du temps. Je suis descendue pour t’écrire. En espérant que tu reçoives.
À bientôt, sur la ligne du combiné, dans une enveloppe en papier, ou entre deux mails échappés. Tous ces ponts desquels nous pourrions nous jeter.”
Clémentine »