Parler. Mais pas trop fort…

2 mins

     Parler. Mais pas trop fort, ni trop vite. On aurait peur de tout casser. Elle est là, assise sur son banc, et elle paraît si fragile, tout d’un coup. Le vent l’emporte. Le temps l’emmène. Loin, trop loin. Hortense voudrait arrêter le monde, mettre sur pause, et gommer les traces, qu’on ne sache jamais qu’il est trop tard. Trop tard pour recommencer. La prochaine fois n’existe pas. N’existe plus. On dit “à bientôt”, mais au fond qu’est-ce qu’on en sait ? Hortense a compris. Et elle en veut au temps. Parce que c’est lui qui l’emporte, doucement, trop lentement, trop vite aussi. Il est la mer qui creuse un rocher. Parler pour combler. Combler le silence qui envahit chacun, combler le manque aussi, parce que purée qu’est-ce que tout lui manque ! Elle est une enfant qui réclame sa grand-mère, en la secouant, encore et encore. Par des jeux, des blagues, elle épuise les dernière étoiles. Les dernières piles. Elle la tue. Oui, Hortense pense à cela, parfois, dans son lit, elle se dit “je suis responsable, c’est moi qui est la cause, pas la maladie”, et elle sourit, parce que tout serait tellement plus beau. Mais elle voit bien que non, Hortense ne tue personne. Elle a à peine la force de se lever le matin, alors prendre une arme….

– Je vais partir, grand-mère, chuchote-t-elle.

– À demain.

– Non, je vais vraiment partir. Loin. Peut-être trop pour te revoir.

L’air lui manque. Cette cave dont on rêve qu’elle s’ouvre sous nos pieds, Hortense en imagine le froid qui se répend sur son corps. Mireille la regarde. Et elle semble soudain encore plus absente que d’habitude. Ce n’est pas un système solaire qui les sépare. C’est toute une galaxie. 

– Tu t’es enfin décidée, murmure la vieille dame dans un semblant de sourire.

– Tu savais ? S’étonne Hortense

– Je n’ai plus de tête mais encore un coeur. Il bat bien plus fort que tu ne le crois. 

Le vent s’est levé sur Paris. En rentrant chez elle, Hortense s’affale sur le canapé. Elle ne dit plus son canapé. D’ailleurs, il n’a jamais été le sien, originellement celui de son père. Des morceaux de cuir s’en détachent, le chat est passé, les années aussi. 

– Deux jours, chuchotte le calendrier de la cuisine.

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