5) Différents dans le caractère, ils n’en demeurèrent pas moins inséparables….

     Différents dans le caractère, ils n’en demeurèrent pas moins inséparables. Andréa prit rapidement son aise dans la petite maison. On lui construit une pièce à part et elle quitta la chambre du grand frère sans aucun regret. Louis s’amusa de ce déménagement et tous deux prirent l’habitude de ne jamais fermer les portes. La nuit, il n’était pas rare de les entendre. Quand l’un observait une ombre à travers la fenêtre, l’autre criait au loup et courait se réfugier dans le lit du premier. Au lever du soleil, Louis prenait soin de ne pas déranger sa sœur et filait dans la cuisine. Il y retrouvait son père, près à partir. Frédéric n’avait jamais rien caché à ses enfants, et un matin, alors que son fils le regardait lasser ses chaussures, il se décida.
–    Tu veux venir ?
–    Oh oui, répondit calmement Louis.
Et c’est ainsi qu’ils sortirent en silence dans le froid de février. Dans son gilet trop grand pour lui, Louis apprécia l’herbe humide contre son pyjama. Ils ne chassèrent pas ce matin-là. Frédéric présenta à son fils le loisir de l’attente. Ils donnèrent des prénoms aux pins et aux fougères, et lorsque le père chercha dans le regard de son fils une trace de peur, il fut surpris de n’y trouver que de l’amour. Louis le regardait avec calmement. Il ne criait pas de joie devant le lever du soleil qui déchirait les nuages dans le ciel. Frédéric s’en mordait les lèvres de bonheur. Louis souriait. Ils rentrèrent main dans la main pour le déjeuner. Marie les attendait. Mère prudente mais avant tout épouse respectueuse, elle ne posa aucune question et embrassa son fils. Le samedi suivant, Frédéric ne posa pas la question : Louis avait déjà enfilé son imperméable.