Chapitre 11 – Secrets

7 mins

Décembre est vite arrivé avec sa neige, son froid pur et son ambiance festive. Les arbres avaient été décorés de lampe clignotantes et les rues étaient remplis d’affiches de publicités, comme de bonne années. Je devais m’habiller plus chaudement mais c’était aussi la période où les chevaux étaient le plus agités. C’était décidément mon mois préféré de toute l’année.

Dans le métro en direction du lycée, je ne cessais de me tourner en boucle la même phrase. “C’était une erreur, j’ai eu un moment de faiblesse”. Voilà ce que j’allais dire à Vincent. J’y ai pensé toute la nuit. Je ne savais pas si je devais y aller cash ou doucement et ma relation avec Alyssa m’est revenue en tête. Non, à cette période, quand nous nous sommes séparées, je voulais être secouée pour aller de l’avant. Pas être bercée bien gentiment.

Donc si je voulais mettre les choses aux claires avec Vincent et abréger ses souffrances, je ne devais pas tourner autour du pot.

Vite, je suis sortie du wagon. Vite, j’ai quitté la gare. Vite, je suis allée au lycée. La place devant l’entrée était vide mais le grillage encore ouvert, surveillé par un pion. Dans les couloirs, au lieu de me diriger vers ma classe, je vais plutôt rejoindre Vincent, dans sa classe. La pièce était à moitié remplie, le professeur n’était pas arrivé et heureusement encore, Maximilien n’était pas arrivé. Je prends le bras de mon meilleur ami et lance “il faut qu’on parle”. Je ne lui laisse pas l’occasion de répondre et le tire à l’extérieur sous les regards amusés, ou intrigués de ses camarades. Je me dirige vers la cage des escaliers, les escaliers E, là où personne ne passait jamais.

– La prochaine fois, demande mon avis au lieu de me tirer quand même, non ?

– Ce qu’il s’est passé samedi était une erreur. J’ai eu un moment de faiblesse, je me suis laissée faire mais je ne ressens absolument rien pour toi.

Il reste muet et se contente de me fixer un bon moment. Le silence devenait sérieusement pesant et j’étais à deux doigts de rejoindre ma classe et le laisser en plan.

– Je… c’était prévisible, il répond. Je savais que tu allais me dire ça.

– T’es pas énervé ?

– Énervé ? Pourquoi je serai énervé ?

– T’es sûr que ça va ?

– Non pas trop. On s’est roulé une pelle samedi soir, j’ai pensé que… tu ressentais des choses mais tu viens me demander de redescendre. J’ai mal a l’égo mais ça va passer.

Il s’apprête à s’en aller, sans rien ajouter mais je le rattrape par le bras.

– Je suis désolée…

– Alyssa t’as rappelé ?

– Mais où est le rapport, putain ? Je te parle de tout les deux et tu me sors Alyssa. Laisse-la, là ou elle est.

– Non, c’est important. Pour moi, en tout cas. Parce que rien ne me dit qu’elle va pas essayer de te reprendre.

– Quoi ? Mais qu’est ce que tu raconte ! On avait même pas 15 ans quand on s’est mises ensemble, tu crois sérieusement que ça a de l’importance pour elle et pour moi, maintenant ? Les humains grandissent avec l’âge. Tu le savais déjà où je t’apprends un truc ?

– Carrément, tu connais Alyssa. Dès qu’elle t’as, elle te lâche plus !

– Franchement, on voit que tu ne la connais pas. Elle veut simplement soigner ses relations.

– Parce qu’elle a soigné ses relations quand elle t’a quittée ?

– C’est moi qui l’ai quittée.

– Alors pourquoi tu veux encore de quelque chose avec elle ?

– Je ne veux que de l’amitié avec elle.

– Et elle alors ?

– Vincent… ne me dit pas que t’es en train de me faire une crise de jalousie ?.. De la jalousie mal placée en plus !

Heureusement qu’il ne connaît pas Ibrahim d’ailleurs…

Il se met à me fusiller du regard et lâche sur un ton hautain :

– Je t’aurai prévenu, cette fille, c’est une putain de malade mentale.

Il s’en va et je n’ai même pas la force de le retenir. Ni l’envie d’ailleurs. En une fraction de seconde, je fus saisit par la colère et je voulu sérieusement lui refaire le portrait. Il avait insulté Alyssa, ce bâtard… Je retourne dans ma classe au moment où la sonnerie retentit. Je croise ma professeur d’anglais qui me dit, en riant, son accent toujours aussi prononcé :

– A la bourre, miss Peeters !

Je rentre dans la classe et m’assois à côté de Hermine, à ma place habituelle, qui ne fit aucun commentaire sur mon retard.

La prof entre à son tour et le cours pu débuter.

Le reste de la semaine se déroula sous tension. Depuis ma discussion avec Vincent, il faut croire que nos différents ont même atteint le reste du groupe. Hermine, d’habitude bavarde, n’osait plus dire un mot et Charlotte se fit de plus en plus indisponible pour traîner avec nous. Elle restait dans la classe durant les pauses et voulait déjeuner seule alors que nous restions en groupe dans la salle commune du lycée à manger, dans le plus grand des silences. Bref, elle nous évitait et Vincent ne m’adressait plus la parole. Seul Maximilien restait fidèle à lui même, mais je sentais qu’il s’obligeait à rester dans son rôle de mec détendu. J’étais certaine que la situation lui pesait autant que nous mais malheureusement, l’équilibre précaire du groupe ces jours ci reposait complètement sur son tempérament jovial. Pourtant, jeudi vint, et alors que nous mangions tout les 5, Charlotte s’étant décidée à se joindre à nous, j’annonce a mes amis sur un ton blasé :

– Au fait, j’ai oublié de vous dire que Alyssa va venir demain soir et passer le week-end au village.

Ma phrase eut l’effet d’une bombe parce que tous s’arrêtèrent de manger et se mirent à me fixer.

– Et ce que maintenant que tu le dis ? lâche Maximilien.

– Désolée, j’ai passé toute la semaine à faire le ménage et j’étais fatiguée. Mon père rentre de plus en plus tard parce qu’il doit voir la nouvelle jument qui va arriver après le nouvel an, et je n’arrive pas a dormir si je suis toute seule à la maison…

– C’est génial ! commenta Hermine, agréablement surprise.

– Je vais enfin savoir qui c’est ! opine Charlotte.

Tous étaient contents et je constate fièrement que l’annonce avait brisé la glace. Seul Vincent restait silencieux. J’ignorais si il était déçu ou en colère, ou alors carrément ravi, mais qu’il cherchait à le cacher mais n’y porte pas plus d’importance.

Le reste de la journée s’était bien passée et nous sommes rentrés chez nous, dans une bonne ambiance. Le comportement de Vincent me blessa mais j’étais tellement dépassée par l’arrivée prochain d’Alyssa que je pris la décision de m’occuper de ce problème après avoir gérer le cas d’Alyssa.

En quittant la gare, nous prenons un chemin différents mais Hermine me rattrape alors que nous prenions normalement un chemin opposé.

– Elza, attends ! Je viens avec toi.

Nous partons donc.

– Tu ne passes pas par le chemin des supérettes ?

– Oui, mais j’avais envie de marcher.

– Il fait froid mais d’accord.

En fait, ce n’est pas la température qui m’inquiétait mais surtout le fait que je sois seule avec mon amie. Je la connaissais et si elle avait décidé de faire le chemin avec moi, prenant un énorme détour, je savais que c’était pour se retrouver avec moi. Et je détestais ça…

– J’ai remarqué une ambiance pesante dans le groupe mais quand tu as dit qu’Alyssa revenait, tout s’est arrangé. C’est fou comme une personne peut changer les choses rien que par sa présence.

J’opine du chef, n’ayant certainement pas envie de creuser à son sujet.

– Elle va dormir chez toi ?

– Oui, elle vient demain soir, je devrai la chercher a la gare.

– Celle du village ?

– Non, du centre-ville.

– Ca en fait de la trotte !

J’espérais quelle se propose pour venir avec moi, n’osant même pas demander et me contente d’acquiesser.

– Vous irez directement à la fête des Duval ?

– Exact.

– C’est vraiment le meilleur moment pour des retrouvailles.

– Oui.

Malgré mes réponses que je voulais évasives pour qu’elle comprenne que je ne voulais pas parler de nos amis, Hermine continue, sans broncher.

-Vincent et Charlotte sont bizarres, en ce moment.

Charlotte ? Je n’avais pas fait attention a elle récemment mais rien dans son comportement ne m’avait inquiété… avais-je loupé un épisode ?

– Bizarres comment ?

– Ils sont en retraits.

Je voulais bien admettre pour Vincent, mais Charlotte…

– C’est sûrement le bac, dis-je, tu sais à quel point Charlotte est à fleur de peau…

– Surtout qu’à la rentrée de janvier, on va avoir un bac blanc… mais ça n’est pas là où je voulais en venir.

– Eclaire ma lanterne.

– Elza, tu sais bien que Charlotte est amoureuse de Vincent.

Je m’arrête tout de suite. C’est quoi encore cette connerie ? J’ai loupé une saison entière, à ce train là.

– Non j’ignorais.

– Tu plaisante !

– Je te jure que je ne savais pas. Elle te la dit ?

– Non, elle la dit à Stéphanie qui l’a elle même dit à Mireille qui me l’a dit.

– Mais Stéphanie est une pipelette. Elle sait très bien qu’il ne faut rien lui dire.

– Stéphanie, Mirelle et Charlotte étaient très amies avant tu sais, c’est normal qu’elle lui confie ça.

– Et elle sait que tu sais ?

– Oui.

– Mais elle ne m’a jamais rien dit !

– Bah… réfléchis t’es la meilleure amie de Vincent. Tu allais forcément les pousser à tenter un truc. Et elle en avait sûrement pas envie.

– Et depuis quand ?

– Quand elle lui a dit, on était en seconde.

– Mais je n’ai jamais rien vu… je suis aveugle, c’est pas possible…

Hermine se met à rire et je ne remarque même pas qu’on est devant chez moi.

Alors là, c’est la meilleure… Charlotte amoureuse de Vincent. C’est vrai qu’on aime bien les taquiner parce qu’un jour, en seconde, justement, une fille s’est permise de leur dire qu’ils iraient physiquement bien ensemble mais sans plus. J’essaye de me remémorer le comportement de mon amie avec lui et jamais je n’ai eu l’impression qu’elle avait des vues sur lui. Mon dieu, que suis-je bête !

– Bon, je te laisse alors, dit Hermine.

– Attends mais faut pousser ton raisonnement jusqu’au bout. C’est quoi le rapport avec les tensions qu’il y a eu ?

– Je pense qu’il s’est passé quelque chose entre eux mais qu’ils ont du mal a le cacher maintenant.

– Comment ça ?

– Bah… un baiser, un rencard, ou si ça se trouve, ils ont fait l’amour.

J’essaye de m’oter ces images de la tête et préfère même oublier cette discussion.

– Si tu le dis…

Vincent me l’aurait dit. Et si il m’aime, qu’est ce qu’il gagnerait à fricoter avec Lotte ? Rien. Et mon meilleur ami pense par théorème. D’aussi longtemps que je le connais, il n’a jamais agit que pour ses propres intérêts “parce que personne ne le fera a sa place”, comme il dit. Non, non, impossible. Oublie ça. Et puis j’aurai vu. Maximilien aussi. Et vu comment il a la langue bien pendu, il nous en aurait parlé.

Je rentre chez moi après avoir salué Hermine et me plonge dans mes révisions. Le ménage était fait, les courses aussi, bref, la maison était prête pour l’arrivée d’Alyssa.

Avec tout ça, j’avais oublié la fameuse boîte que Rafaella m’a envoyé mais j’étais si fatiguée que je reporte la lecture à plus tard, je m’endors et Vendredi arriva…

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