Décembre 1989
J’étais assise sous le porche, à attendre dans le froid que ma meilleure amie ne daigne venir.
La campagne était particulièrement glaciale en hiver, j’avais l’impression d’être en Sibérie.
Quelle idée mon père et ma belle mère ont eut aussi de venir s’installer ici, dans ce village glauque et paumé, il y un an…
Mais bon, toujours est-il que cela devait faire une éternité que je poirautais sous le porche, à attendre Mireille.
A l’heure qu’il est, elle devait être au moins partie de chez elle, sinon, ça serait clairement l’hôpital qui se fout de la charité.
Je tentais de réchauffer les mains en les frottant avidemment l’une contre l’autre mais c’était peine perdue. Mes mains étaient figés par le froid, je ne pouvais faire aucun mouvement.
Tant pis, elle n’avait qu’à être ponctuelle. Je jette un coup d’œil à ma montre. Elle a 10 minutes de retard.
Je décide d’y aller, peinant déjà à effectuer ne serait ce qu’un pas. Ca commence drôlement bien…
Finalement, après presque une très éprouvante demie heure, j’arrive au lycée.
C’était un énorme bloc blanc couvert de vitre, ce qui lui donnait je dois l’avouer beaucoup de modernité, devant lequel se situe une très grande place où tout le monde se réunissait durant les pauses ou au debut et à la fin des cours. Alors que je m’avance vers la grille, une main s’abat littéralement sur mon épaule.
– Putain Mireille ! Espèce de cinglée j’ai failli faire une crise cardiaque !
Comme réponse, elle se contente de me prendre dans ses bras et me sert fort contre elle.
– Oh fais pas ta chochotte ! J’ai pas arrêté de t’appeler, tu marchais devant moi, mais tu m’ignorais.
– Je t’ai pas entendu, mais tu peux toi aussi être plus à l’heure, non ?
Elle ignore tout bonnement ma remarque et préfère plutôt passer son bras autour de mes épaule.
– Aller ! On va en classe ? Je meurs de froid.
– A qui le dis-tu…
Après nos retrouvaillent plutôt atypique , on commence à échanger de tout et de rien, de ce qu’on a fait ce week-end, de nos familles, nos dernières lectures. Mais ce que Mireille semble préférer, c’est médire…
On entrait dans la cour d’entrée quand on est passé devant une bande du lycée que ma meilleure amie méprise au plus au point.
Dans cette clique, il y avait 4 élèves de secondes, tout comme nous. Maximilien Pedersen, un mec, qui ne semblait pas avoir une foutre idée de ce qu’il fait à l’école, puisqu’il a tout le temps l’air paumé, Hermine Williams, une fille plutôt douée et perspicace qui a obtenu les meilleurs résultats du brevet, de tout le canton, l’année dernière, Vincent Rodriguez, un assez beau garçon et Elizabeth – qui insistait pour qu’on l’appelle plutôt Elza – Peeters, qui ressemblait plutôt à une jeune actrice hollywoodienne, tellement elle ressemblait à une poupée. Une poupée vachement craquante, il faut l’admettre.
Encore une fois, elle rabâche la même chose. Maximilien a l’air trop con. Hermine est trop hautaine. Vincent est moche. Elza est une drama queen.
Et bien que je ne supportais pas non plus ces types, j’en avais de plus en plus marre de l’entendre geindre parce qu’elle ne les aime pas.
– Et sinon, il n’y a pas des soucis plus intéressants à aborder, pour nous occuper plutôt que de critiquer des pauvres types ?
– Tu veux faire autre chose ? elle me demande, comme si la question n’avait pas lieu d’être.
– Bah je sais pas, le féminisme ? La place problématique que l’homme occupe depuis beaucoup trop longtemps ? C’est quoi la meilleure façon d’élever un enfant pour en faire une personne juste ?
– C’est tellement triste ! Tu sais pas t’amuser putain ! Regardes les, regardes comme ils ont l’air cons, ricane Mireille.
Ils étaient en train de jouer à la balle et ils avaient l’air de plutôt bien s’amuser. C’en était vraiment attendrissant…
– Bah au moins, ils s’amusent.
La balle arrive devant mes pieds. J’hésite à la leur renvoyer mais l’un d’eux s’avance vers nous, Vincent. Il arrive sous mes yeux pour la récupérer. Quand il se redresse, il m’adresse un petit sourire, suivit d’un signe de tête, et à cet instant, ce que j’ai ressenti, quand nos regard se sont croisés, c’était inconnu mais agréable.
Aéré, frais et léger, j’adore le style. Bravo Maya.