Ecrire 4 – Interview

4 mins

23 mai. 23h04.

23h04. Jour 4. Avant l’heure ce n’est pas l’heure ! Cela fait pourtant un petit moment que mon ordinateur est allumé dans le but d’écrire. Il y a quelques minutes encore, ce n’était pas le moment. Impossible de dire pourquoi.

Dans la journée, m’est venu une idée pour mon texte de ce soir. Faire un dialogue, comme une sorte d’interview de moi-même. Voyons donc ce que ça pourrait donner.

— Bonsoir Hélène, comment se porte donc notre écrivaine en herbe ?

— Plutôt bien. J’ai lu ce soir le deuxième chapitre d’un livre très motivant et cela me porte à continuer à écrire.

— Vraiment ? Peux-tu nous expliquer cela ?

—  J’ai maintenant compris et éprouvé que m’être fixé ce rendez-vous nocturne avec moi-même m’apporte de la joie et conclut de façon souriante ma journée. C’est en train de devenir addictif et j’en suis heureuse.

— Cela n’a-t-il pas aussi des inconvénients ?

— Oui, il y en a. Le plus grand inconvénient pour moi pour le moment est de ne pas être en mesure de passer plus de temps à écrire.

— Mais n’est-ce pas une question de volonté ? Si tu le veux vraiment, tu le peux. Ne crois-tu pas ?

— Peut-être. En ce moment cependant, je ne suis pas comme un ermite au fond de sa caverne, je ne suis pas seule. Je choisis de ne pas laisser de côté les personnes qui vivent avec moi.

— Et tu oublies de prendre soin de toi…

— En journée, il est vrai que le quotidien familial est très prenant. Cependant, la pensée qu’au soir je prendrai du temps pour moi, pour écrire, m’emplit d’un petit soleil intérieur, même si dehors la météo était à la pluie aujourd’hui.

— On dirait que tu as trouvé ta recette du bonheur. Est-ce le cas ?

— C’est l’impression que j’ai. Ce n’est pas un grand bonheur, au sens où certains pourraient l’entendre, il est bien modeste, mais il me suffit pour le moment.

— Se réjouir des petits moments de joie que tu trouves dans ton quotidien, est-ce cela qui donne un sens à ta vie ?

— Je crois que je suis quelqu’un de profondément optimiste au départ. Depuis longtemps la devise « carpe diem » m’accompagne. Plus les jours passent, plus j’apprends, plus je m’efforce de progresser vers ce que j’appellerai ressentir de l’intérieur cette joie du moment présent.

— Carpe diem. Le cercle des poètes disparus ?

— Oui, il vient de là. Ce film est l’un de ceux qui ont bouleversé ma façon d’appréhender la vie. L’audace, le courage de faire autrement, de sortir de la conformité. Tout un programme !

— Et ce programme te tente ?

— Oh oui. Je le contemplais de très loin jusqu’alors, il restait flou. Et puis, un petit pas après un autre, je commence à mieux distinguer les contours de ce que je voudrais faire de ma seconde vie.

— Peut-on en savoir davantage ?

— J’aimerais, je voudrais, je rêve de… non, toutes ses idées je les garde pour moi pour le moment. Je veux les mettre à l’épreuve, les examiner sous tous les angles, peser le pour et le contre.

— Tu réfléchis beaucoup avant de commencer quelque chose.

— Oui, trop peut-être. On ne se refait pas. Je sais que c’est mon fonctionnement, je suis prudente, peut-être trop. Peut-être que je manque des occasions, à force ne pas oser. Mais je me soigne ! Je m’efforce d’écouter davantage cette petite voix intérieure qui me pousse à me tourner vers d’autres horizons, même s’ils sont encore brumeux.

— Un souci de confiance ?

— Clairement. Confiance en moi, confiance en les autres. Faute avouée, à moitié pardonnée ? Je suis encore très conditionnée par le regard des autres, ce qu’ils pourraient penser. Alors le plus souvent, ma stratégie c’est la fuite, l’effacement, surtout ne pas me faire remarquer.

— Mais alors, tu te conformes à ce que tu penses que les autres attendent de toi ?

— Je ne dirais pas cela. je me sens à part depuis toujours, je n’attends rien des autres. Je ne cherche pas à plaire. Je fais mon chemin, il plaît tant mieux, il ne plaît pas, ce n’est pas grave.

— J’ai du mal à te suivre.

— La discrétion et l’observation sont mes meilleures alliées pour survivre dans ce monde si social.

— Voudrais-tu dire par là, que tu préfères la solitude ?

— Oui, sans aucun doute. C’est quand je suis seule que je me sens dans mon élément. Toutes les relations que je suis contrainte d’avoir dans ma vie professionnelle ne sont que superficielles. Le télétravail forcé en est pour moi l’évidente confirmation.

— Tu ne trouves pas que cela a empiété énormément sur ta vie personnelle ?

— Biens sûr que si. Fin février, début mars, je me demandais si je pourrais éventuellement exercer une activité professionnelle depuis chez moi. Le confinement m’a donné l’occasion d’expérimenter que c’est bien le cas. Avec comme facteur pimentant les choses, la présence de jeunes enfants qui dans une situation ordinaire de travail depuis la maison seraient en classe.

— Donc tu retires du positif de cette expérience d’isolement forcé ?

— Oui. Et je voudrais conclure sur une citation que j’apprécie beaucoup et que je m’efforce de vivre au quotidien :

Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends.
Nelson Mandela 

23h51

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