Partie 1 : Suis-moi
Chapitre 1
Il pleut. Je n’ai pas le temps. Je ne te regarde même pas. J’ai une conférence rue Wiertz.
Aujourd’hui, je n’ai pas envie de penser à toi. Pas envie de te voir. Je suis concentrée sur mon boulot. J’ai relu mille fois cette présentation pendant le trajet qui m’a traînée depuis Paris. Je ne suis pas sûre de moi. Je dois l’être pourtant. Je dois convaincre l’assemblée qui va se tenir devant moi. Provoquer ce sursaut qui leur donnera envie d’avancer dans la bonne direction.
J’avance péniblement. Cette ruelle me tient dans son étau. J’étouffe. Sous les nuages sombres, mes yeux s’efforcent de ne pas pleurer.
Je ne peux pas oublier ce qui s’est passé. Ce grondement sourd de l’orage qui s’apprête à éclater. Ces cris comme un déchirement. Cette porte qui claque pour de bon, comme la pluie bat maintenant le pavé.
Avant d’entrer, j’aperçois mon reflet à l’entrée du bâtiment. La génétique a mis de l’or dans mes cheveux longs. Pour certains, c’est un signe de candeur. D’autres trouvent que cela contribue à ma sensualité. J’ai envie de leur répondre que je n’ai rien demandé.
Je fixe brièvement ma silhouette frêle parmi les autres qui se pressent. Elle me renvoie à ce que je suis. Le flou de ma vie. Ce souvenir d’un père qui flotte dans mon inconscient, ce sentiment de solitude qui m’enveloppe. Malgré tout, malgré nous.
Et toutes ces questions. Est-ce que j’aurais dû me taire ? Est-ce que j’ai trop attendu ? Est-ce que j’aurais pu le faire moins souffrir ?
Je me sens si maladroite. Je voudrais revenir en arrière et changer le cours du temps. Impossible. Il y a cette succession d’événements, ce malaise qui s’ensuit, ces mots qui n’étaient peut-être pas ceux qu’ils auraient dû. Peut-être de trop. En tout cas, à ce moment-là. J’aurais dû y aller avec douceur et je lui ai balancé ça à la gueule, comme on jette une bouteille à la mer. Vigoureusement, avec l’envie que les mots s’envolent le plus loin possible.
J’ai cette boule au ventre, mais je ne sais plus si ça vient de la rage de l’avoir perdu ou du stress de devoir m’exprimer en public.
J’arrive dans la salle. Elle a une capacité de trois cent personnes, mais elle est occupée seulement aux deux tiers. Les regards me terrorisent. Le jugement à venir me fige dans une sorte d’état second. Je dois me servir de ce trac comme d’une force qui va me galvaniser. Je suis là pour une bonne raison et je dois le prouver. Je ne dois pas tout foutre en l’air à cause de mes états d’âme. Je travaille trop dur pour ça.
Je sors quelques instants de ma torpeur au moment où la foule applaudit. Certains se lèvent. Mon discours a fait mouche. J’en suis étonnée moi-même.
Je reviens m’asseoir à ma place et j’écoute à mon tour les autres orateurs. Je suis là et je suis ailleurs. Comme déconnectée de la réalité. Mes gestes s’exécutent d’une façon mécanique qui ne me ressemble pas. Je réponds aux questions de manière laconique. Sans y réfléchir, les mots s’enchaînent. Ils viennent seuls, du plus profond de moi. Mon corps tient le coup tandis que ma tête commence à flancher. Mes oreilles bourdonnent, une douleur terrible me prend aux tempes.
Il est 17h et le train me ramène à mon point de départ. Un rayon de soleil me nargue. Le paysage défile, la nuit étend tranquillement son manteau sur la plaine. Je ne t’ai pas vu passer, je regrette. Et c’est seulement en rentrant chez moi quelques heures plus tard que je m’effondre. J’ai juste envie de tout reprendre à zéro, de retourner là-bas. Avec lui. A Bruxelles…
Bruxelles, attends-moi, j’arrive. Bientôt, je prends la dérive…
Inspiration : Bruxelles, Dick Annegarn
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Désolée, j’ai eu un souci et n’avait pas accès à mon PC pendant quelques jours. C’est pour cela que je vous publie la suite seulement maintenant. Maintenant que tout semble rentrer (plus ou moins) dans l’ordre, je devrais publier plus. J’espère que ça vous plaira 🙂
Content de vous retrouver Isabelle !