Partie 2 : L’écho
Chapitre 11
Je me demande bien ce qu’Elizabeth a pensé de ma lettre. Celle que je lui avais écrite lors de notre première rupture. On n’en a jamais parlé. À l’époque, je lui avais recopié intégralement la chanson Think d’Aretha Franklin. Avec un beau stylo-plume, en belles lettres calligraphiées. Elles valaient la peine que je m’applique.
Liz m’avait enfermé dans quelque chose qui ne me ressemblait pas et la musique a toujours été pour moi beaucoup plus efficace que n’importe quelle psychothérapie. Et puis, Aretha, c’est quelque chose non ? J’ai toujours aimé sa voix, cette soul. Inimitable. Quand je l’écoute, j’ai l’impression de respirer à nouveau. C’est comme un sentiment de liberté qui viendrait du plus profond.
J’avais toujours été présent pour Elizabeth, dans les meilleurs comme dans les pires moments. Car après cette fête de la musique, on avait joué tous les deux. Pas longtemps. Elle était déterminée et j’aimais bien qu’elle croie que je me laissais faire. On a fini le lycée puis on s’est inscrit en première année de droit.
On a emménagé ensemble après le décès de sa mère en 2004 mais on n’était pas prêts du tout. La blessure était encore trop à vif. Elle s’énervait pour tout, pour rien. Je gardais à l’esprit ce qui nous avait unis au départ, mais l’avenir me préoccupait. Le mien, le sien. Je devenais un peu comme elle finalement. Dans la recherche de l’efficacité plutôt que dans le sentiment. Le problème, c’est que j’avais aussi déteint sur elle et qu’elle devenait fragile. Bien sûr, elle ne le reconnaîtra jamais. Mais j’ai une certaine manière de la renvoyer à ses contradictions, sans prendre de gants. J’ai été à bonne école. Pourtant, il faut l’avouer, je n’étais pas bon élève. Pour arriver à mon niveau actuel, voyez le nombre d’années que ça m’a pris ! Enfin… Maintenant, je crois être à la hauteur.
Dès le début, ce qui m’a marqué chez elle, c’est son arrogance délicate et sensuelle. Lors de nos disputes, tandis que j’incarnais à la perfection le roquet à la recherche d’un os à ronger, elle devenait un merle moqueur à la répartie cinglante. Je souhaitais simplement qu’elle me prenne au sérieux, j’aurais voulu lui hurler ma rage. Mais la plupart du temps, elle me prenait par la taille, me lançait ce drôle de regard en souriant puis m’embrassait sans permission. J’en oubliais la raison de mon emportement.
Jusqu’au jour où mes nerfs ont eu raison de ma patience. Ce n’était plus possible que je me laisse bouffer comme ça. Alors j’étais parti. Une première fois, fin 2005, après quatre ans de relation.
Je n’avais pas l’intention de la quitter. Depuis la mort de sa mère, elle s’effondrait et tentait de m’emmener dans sa chute, elle y mettait toute son impertinence. Je voulais lui laisser une chance de changer, redevenir celle qui m’avait plu. En lui laissant cette lettre, j’espérais une prise de conscience de sa part. Cette chanson signifiait cela pour moi.
L’amour pose des questions et je voulais prendre de la distance pour chercher mes réponses. J’avais donc récupéré mes affaires pour retourner m’installer chez ma mère. Nous étions jeunes, nous avions le temps.
Est-ce que je pensais réellement qu’elle allait me supplier de revenir ? Quel idiot… J’ai attendu. Des jours, des nuits, des semaines. Au bout d’un mois, j’ai reçu un SMS. « OK, message reçu. On reste amis ? » et qu’est-ce que tu crois que j’ai répondu moi, comme un con ? Juste « oui ». Qu’est-ce que je pouvais être naïf à l’époque !
Pour ma deuxième lettre, j’ai été beaucoup plus pragmatique. L’expérience, sans doute. J’ai conclu cette longue missive simplement : « Cette fois, j’ai bien réfléchi. »
Inspiration : Think, Aretha Franklin
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