J’ai trente ans, je ne suis pas un jeune novice dans la vie ! Et pourtant… Il faut croire que je n’ai rien appris. J’ai répondu à Jennifer :
− Salut Jennifer. J’étais au travail toute la journée, c’est pourquoi je n’ai pas pu répondre à tes mails. Tu es toujours aussi stressée… C’est perturbant. Tu me plais vraiment, mais je ne voudrais pas souffrir… J’ai du mal à croire que je t’intéresse réellement. Je ne crois pas aux contes de fées… Mon prénom c’est Lucas. J’ai trente ans. Je t’envoie une photo. Je travaille dans le milieu de l’informatique.
J’ai laissé l’ordinateur allumé, en veille. J’ai aussitôt regretté d’avoir envoyé ce mail. Et puis je me suis dit que je voulais savoir. Une fille sérieuse, une pute, pire un brouteur en Afrique qui se fout de moi ? Je me raconte des histoires. En fait, j’ai pensé à elle toute la journée !
J’ai attendu en tournant en rond, comme un fauve. Et enfin, j’ai une petite sonnerie qui m’indique l’arrivée d’un mail. Jennifer est, probablement, devant son ordi ou son phone à attendre une réponse :
− Enfin, tu me réponds ! Pardon d’avoir été agressive dans mon dernier mail. Je suis un peu dingue hein ? Tu me feras pas souffrir toi hein ? Ta photo est cool. Je te trouve beau, tu me plais. J’ai envie de te voir, Viens me retrouver à …, c’est un café sympa. On pourra faire connaissance. Je suis assez libre question sexe. Toi aussi ? J’espère. Dis-moi oui.
Un rencard déjà ? Ce n’est pas très loin de chez moi. Un lieu public, qu’est-ce que je risque ? Je suis nerveux. Il y a un moment que je n’ai pas été avec une fille. Elle a l’air très « chaude ». Je me dis que je ne serais pas à la hauteur. Que c’est une folie. En fait, je me dégonfle. J’ai refermé l’ordi.
Mon cerveau est en ébullition. Dans une heure, je pourrais être avec Jennifer, lui parler et même peut-être la toucher, l’embrasser. Je sais que je ne vais pas arrêter d’y penser et regretter si je ne le fais pas.
Finalement, j’ai répondu :
− OK, au … ce soir vers 22h00.
Presque instantanément, j’ai une réponse :
− Attends-moi, je serais peut-être un peu en retard. Tu es trop chou. Tu seras pas déçu, tu verras. Tu m’attends surtout !
Ça y est ! Plus moyen de reculer. Cette fille va venir. Je ne vais pas la laisser en plan. Je file me rafraîchir. Je suis fébrile. Je transpire. Je me trouve laid, nul, rien ne va.
Je me rassure en me disant que c’est un premier rendez-vous, qu’il ne se passera probablement rien. On va boire un verre et parler. J’espère que j’aurais des trucs à lui dire. Que je ne vais pas la décevoir.
J’ai vérifié l’adresse sur Google Maps : il me faut quinze minutes pour y être. Est-ce que je pourrais me garer ? Je suis trop impatient. Je file. Je serais en avance. Pas grave. Cela me permettra de me calmer.
Je sais que j’ai toutes les chances d’être déçu et pourtant, je fonce pour voir Jennifer.