Pour l’éternité (VII)

6 mins

Le mariage eut lieu le lendemain, ayant perdu tous ses avantages, la cérémonie se déroula en très petit comité dans nos vêtements de tous les jours. Je fus donc mariée à un homme a qui je n’avais jamais parlé, j’étais une ultime provocation dans un rapport père-fils compliqué. Hassan ne me regardait pas et une fois que nos vœux furent échangés il me prit par le bras et cria à qui voulait l’entendre qu’il allait consommer son union immédiatement. Il me jeta sur le lit, m’arracha ma robe, écartant mes jambes, il prit mes poignets dans ses mains et les maintenaient de chaque côté de mon visage, j’avais très peur, je le suppliait de ne pas me faire de mal quand soudain une brûlure à l’arrière de ma nuque me fît changer de comportement. Comme si une autre femme avait pris ma place, une chaleur me traversa le corps, mes cuisses enserrèrent la taille du prince, surprit ce dernier lâcha mes poignets, je pris donc le contrôle en retournant la situation, j’étais au-dessus de lui. Son regard si froid au début semblait amusé à présent. Ce fut une nuit magique, nos deux corps bougeaient à l’unisson, le sommeil nous rattrapa sur le matin. A mon réveil j’étais redevenue moi-même, j’observais Hassan qui dormait paisiblement, je reconnus son odeur, c’était l’homme qui m’avait percutée dans le couloir, se souvenait-il de moi ? Profitant de sa torpeur je sortais du lit et m’habillais à la hâte, je devais aller rejoindre les épouses pour remplir ma tâche.

La journée passa très vite et au fond de moi mes sentiments étaient partagés, d’un côté j’avais peur de retrouver mon inconnu de mari et de l’autre le souvenir de nos ébats de la nuit dernière me donnais l’envie de le rejoindre au plus vite. Sans m’en rendre compte j’étais déjà devant la porte de notre chambre, en entrant je sentis du sentiment de soulagement, j’étais seule. La journée avait été épuisante, je me mis au lit sans attendre le retour de Hassan. Au milieu de la nuit un grand bruit me réveilla, mon époux était ivre et avait trébuché sur une chaise, il s’écroula sur le lit à côté de moi, je ne bougeais pas espérant qu’il s’endorme rapidement. Ses mains passèrent sous la couverture, remontèrent le long de mes cuisses et alors qu’il allait entrer en moi il s’arrêta. Je sentis des secousses légères au début puis de plus en plus fortes, il était en train de pleurer, me retournant je le pris dans mes bras et sans rien dire il s’endormit. Au matin le lit était vide, sur son oreiller était déposé un dessin, une rose avec un mot, « Merci ». Ghalia et Jenna avaient raison ce n’était pas un mauvais garçon, la colère qu’il avait dans son cœur était trop forte pour lui et ne savait pas comment se libérer. 

Les jours passèrent, puis les mois, notre rendez-vous du soir était devenu très important pour nous, à force de gestes tendres et de discussions je connaissais toute son histoire, ses bonheurs, ses ses passions et ses blessures. J’avais toujours gardé une part de secret sur mon passé, honteux. Mais Dieu ou Allah peut importer nous avait envoyé un beau cadeau, un enfant, le fruit de notre amour. Une nuit de pleine lune, je mis au monde Leyla, ma petite princesse. Hassan était fou de joie et malgré la punition du Sultan, un banquet fût organisé pour fêter l’événement. Mais à la fête ce soir-là je me sentis mal, la fièvre montait de plus en plus et un médecin fut appelé à mon chevet. Le pronostic n’était pas très bon et on dit à Hassan de venir me faire ses adieux, je ne devais pas passer la nuit. Ivre de chagrin et de colère mon époux ne tenait pas en place, me sachant condamnée je lui demandais de venir à mes côtés pour lui révéler mon dernier secret. Avec mes dernières forces je racontais mon agression lors de la fête du village, le viol et surtout le fait de ne jamais avoir trouvé le coupable. Sa main serra fort la mienne et la rage apparut sur son visage, il me jura de faire payer cet homme qui avait pris mon innocence. Ghalia entra et prenant son fils dans ses bras, lui demanda de nous laisser seules quelques minutes. Sortant de sa poche une fiole, elle la porta à mes lèvres, je m’endormis aussitôt. Les rayons du soleil me firent ouvrir les yeux, j’étais vivante, mais comment était-ce possible ? Beya dormait au pied de mon lit et Hassan me tenait ma main dans la sienne. Je lui caressait les cheveux, son doux visage se leva et son beau sourire s’afficha, il me sauta au cou en criant « Tu es sauvée, tu es sauvée, appelez ma mère !! ». 

Une partie du placenta était resté accroché en moi, Ghalia qui avait eu la même chose lors de son accouchement avait tout de suite reconnu les signes et avait fait venir Beya la sage-femme pour aller me retirer ce qui causait la terrible infection. Comme ma belle-mère, j’étais sauvée d’une mort certaine mais je ne pourrais plus avoir d’enfant. Ma convalescence allait être longue mais en attendant j’allais pouvoir profiter de ma fille, Leyla. 

Hassan était aux petits soins pour moi, il me laissa le temps de me remettre. Un soir alors que nous étions sortis dans le jardin du Palais tous les deux, il se tourna vers moi et me dit qu’il était bien décidé à tenir sa promesse, mon agresseur ne devait pas resté impuni. Un peu gênée j’essayais de le dissuader de mener à bien cette mission.

« Hassan, on ne sait même pas qui est l’auteur de cet acte horrible ! » 


– Je sais mais je ne peux pas laisser ce crime impuni et puis il y a autre chose, tu dois aller parler à ton père pour rétablir la vérité. Tu es une femme respectable et il a le droit de connaître sa petite fille. 

A ses mots, mon cœur se gonfla d’amour, mon père me manquait surtout depuis que j’étais devenu mère, il était ma seule famille et je ne souhaitais pas qu’il meurt sans savoir qu’il était grand-père. Hassan était tellement enthousiaste que je n’arrivais pas à le faire changer d’idée. Intérieurement je me rassurais en me disais qu’il lui serait impossible de mettre sur pied une expédition sans l’accord du Sultan. Qu’elle ne fût pas ma surprise quand un mois plus tard, il m’annonçait que tout était arrangé, nous partirions le lendemain. 

« Mais comment as-tu fais pour convaincre ton père ? » 


– Très simple, je lui ai dit que c’était mon voyage initiatique, le Portugal est une belle destination et nous pourrions en profitez pour faire des affaires et établir un échange de marchandises. Haroun est emballé, il pense que je rentre dans le rang. Nous profiterons de notre séjour pour régler son compte à ton agresseur et pourquoi pas donner une belle correction à ton demi-frère Tonio. 

La plan était tentant mais je trouvais cela un peu risqué, perdue dans mes pensées je n’avais pas remarqué qu’on nous écoutaient. Cette nuit-là je ne pus me résoudre à dormir. Au lever du soleil les gardes du Sultan nous tirèrent du lit et nous fumes amenés dans la salle du trône, là mon beau-père nous attendait furieux. Quelqu’un nous avait trahis et avait raconter la vraie raison de notre voyage. Une silhouette bougea derrière un voilage, qui cela pouvait-il être ? Haroun El Abadil tourna la tête vers la rideau et invita le traître à venir près de lui. 

« Aïcha, approche n’est pas peur, tu n’as fait que ton devoir envers ton Sultan, tu seras récompensée pour ta loyauté. Quand à vous, votre voyage est annulé, interdiction de quitter le pays, Hassan je te faisais confiance, tu avais su me montrer que tu étais une personne honnête et travailleuse, je ne peux accepter ton comportement. Des gardes seront postés devant vos appartements jusqu’à ce que je sois sûr que l’idée te sois passée. Je ne veux prendre aucun risque et éviter une guerre juste parce que tu as décidé d’aller venger mon esclave. » 

A ses mots mon cœur se serra, je pensais être considérée autrement aux vues des derniers évènements il me semblait que j’avais fait mes preuves et gagné ma place au sein de la famille royale. Hassan céda en apparence, une fois dans notre chambre il tourna comme un lion en cage. A l’heure du dîner, la porte s’ouvrit et Ghalia se présenta, elle venait par je ne sais quelle magie d’endormir les gardes. Elle portait ses vêtements de voyage, je ne mis pas longtemps à comprendre qu’elle se joignait à nous pour la traversée. Sans réfléchir prenant Leyla dans mes bras nous nous dirigeâmes vers le bateau. Ma belle-mère avait tout prévu, un coffre rempli d’or fût donné au capitaine qui ordonna à ses hommes de larguer les amarres. J’allais monter sur le navire quand une forme sur le quai attira mon attention. C’était Aïcha, s’approchant de moi, son visage était triste, elle souhaitait me présenter ses excuses, touchée par ses mots je ne remarquais pas l’homme qui arriva derrière moi, sa main gauche m’empêcha de crier et sa main droite me menaça d’un couteau sous les côtes. La traitresse s’empara de ma fille, je hurlais de toutes mes forces mais Aïcha courait vite et quand Hassan arriva pour me délivrer, elles étaient déjà loin. Le Sultan suivit de près par ses fils et sa garde fonçaient droit sur nous. Sans réfléchir je me mis à courir vers le danger, mon instinct de mère étant plus fort que tout je ne réfléchissais pas aux conséquences. Hassan me rattrapa et me soulevant de terre me fît embarquer sur le bateau de force. Haroun El Abadil s’arrêta au bord du quai. 

« Je vous maudit, toi mon fils ingrat et sa catin, mes terres ne seront plus jamais les vôtres, si un jour vous reposez le pied sur ce sol vous ne trouverez jamais le repos, je jure devant Allah que je n’aurais de repos que quand vous serez morts. Et si je ne devais pas survivre jusqu’à ce jour béni, mes fils se chargeront de vous réglez votre compte. Votre fille est à moi et elle grandira sans vous connaître, heureuse enfant. Allez au Diable. » 

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