Ignorant les appels qui me sont adressés, je prends mes jambes à mon cou et cours le plus vite possible afin de ne pas être rattrapé. Ce n’est pas très courageux, je l’avoue, mais j’ai encore du temps pour le devenir un petit plus. Enfin, c’est vrai que ce n’est pas avec ce genre d’excuses que je vais le devenir, mais bon peu importe !
Je descendis les escaliers quatre par quatre et après encore un virage et de nouveau des escaliers je me retrouve devant la porte de mon réconfort. Arriana Artellian.
Ne prenant pas la peine de frapper, je rentrai comme une sauvagesse pour sauter dans les bras de ma tante qui avait eu tout juste le temps de se relever de son sofa. Évidemment, avec mon poids et mon élan, je l’ai fait basculer dessus en moins de deux.
“Oh là là ! Je me fais attaqué par une bête sauvage qui se trouve être nommée “jeune fille indisciplinée” !” ria ma tante en serrant ses bras autour de moi avant que je ne relève la tête vers elle et qu’elle prit un air désolé “Oh, mais il semblerait aussi que cette pauvre bête sauvage fut attaquée elle aussi.”
Ce qui est magique avec elle, c’est qu’elle sait exactement ce dont j’ai besoin. Ses caresses sur mes cheveux alors qu’on se fait un câlin est comme un calmant pour moi.
Rien ne saurait me calmer plus que cela. Rien de plus efficace que cela pour calmer les gros sanglots. Pas un mot, juste de la douceur. Des sanglots non voulus, mais bon…
“Alors que s’est-il passé cette fois-ci mon enfant ?” souffla calmement Arriana sans me presser.
“JevoulaissimplementrendreserviceàmonpaysetàLucan !” siffle-je en express en regardant ma tante de mes grands yeux céruléens.
Ma tante acquiesça d’un mouvement de tête m’encourageant à continuer mon histoire. C’était tout ce dont j’avais besoin, une personne à l’écoute et attentive, mais qui me laisserait maudire le monde entier sans intervenir.
Les nouvelles que je rapportai à ma tante semblèrent lui faire un coup de massue. Qui ne le serait pas quand on vous annonce une guerre imminente ?
On resta entrelacées ainsi pendant plusieurs heures sans que plus qu’aucune parole ne vienne interrompre le silence. Ces quelques heures nous permettent à l’une comme à l’autre d’appréhender les nouvelles.
Bien que je ne puisse pas faire comme je le souhaite, ai-je envie de voir ma famille entière partir vers la guerre avec des risques de morts assez élevées ? Non, personne ne le souhaiterait, mais on ne peut rien y faire malheureusement.
Tout du moins pour l’instant !
Grâce au pendule qui trône dans la pièce, je vois que nous avons loupé le frath. Je sens d’avance que je vais être réprimandée pour cela, mais d’abord, je vais devoir survivre jusqu’au matin sans rien manger.
Normalement, je serais allé faire un tour dans les cuisines, mais au vu de la situation de préparatifs actuelle, il n’est pas sage d’aller dérober quelques aliments en cachette. Tant pis, j’irais dormir directement.
« Ma tante, je vais y aller. » dis-je en me relevant prenant quand même bien le soin de la serrer une dernière fois dans mes bras.
« Très bien, mais fait attention en retournant dans ta chambre. La garde du palais doit être vigilante à tout ce qui est louche. » me répondit-elle en me raccompagnant à sa porte.
Malgré quelques regrets à la quitter, j’ai dû me résoudre à la laisser tranquille afin d’aller dormir en toute tranquillité. Je me sens relaxé et sereine, mais peut-être pas au point de pardonner à mon père sa dureté envers moi et la moquerie de Luven, mais tout de même être de bonne humeur.
Les dires de ma tante se sont avérés exacts le nombre de soldats attribué aux patrouilles a largement augmenté en quelques heures. Je me demande si Père doit craindre aussi que je tente de fuguer pendant qu’on ne fait pas attention à moi ?
J’utilisai toutes sortes de raccourcis et passages secrets afin de rentrer dans ma chambre dans la plus grande discrétion. Je n’ai vraiment pas envie de me faire attraper pour aller ensuite me faire passer un sermon par mes parents. Puis je n’ai pas non plus envie de devoir suivre les ordres des soldats. Ils sont assez rustres dans leur manière d’agir.
Lorsque je passe enfin les portes de mes appartements soupirant de soulagement de ne pas avoir été attrapé, je sens tout de suite que quelque chose cloche. L’atmosphère semble différente alors soit mon esprit me joue des tours, soit il y a bien quelqu’un dans ma chambre en train de m’observer.
Il est pourtant difficile de rester cacher à la fois du soleil et des ombres qu’il crée et à la fois du regard.
Il vaut mieux être prudente que complètement irréfléchie. Je me dirige vers ma bibliothèque afin d’y prendre un livre et surtout la fameuse dague que j’ai volée dans la caserne.
J’ai pensé de manière désinvolte et un peu dédaigneuse que des soldats n’iraient pas chercher derrière des livres.
Je la glisse le plus discrètement et naturellement possible dans mes habits et pris le livre que je “voulais” pour aller m’installer tranquillement à plat ventre sur mon lit.
En mobilisant les apprentissages de mon frère Luther, je me souviens très bien de la mise en garde qu’il m’a faite la fin d’année dernière.
« Souviens t’en Narina certaine personne ont des techniques de marches discrètes afin de ne pas se faire repérer. Notamment les assassins alors si tu as le moindre doute frappe la première. »
Merci Luther de m’avoir prévenu de cela. Sans prévenir, je me retourne et frappe vers la silhouette que je vois juste derrière moi. Cette dernière semble prise d’un sursaut de surprise et avant même que ma lame puisse venir lui toucher la gorge, je me retrouve allonger sur mon lit bloqué par l’intrus et ma propre dague sous ma gorge.
J’aurais au moins essayé !
Comment être inefficace en 10 secondes alors qu’on se croyait trop forte juste avant. L’inutilité dont je fais preuve me désespère moi-même.
Je sens que je vais devoir ravaler ma fierté quelque temps et que je m’achète une paire de lunettes aussi parce que ce que je vois n’est pas possible.
Autant le fait que l’intrus m’est maîtrisé si facilement est déjà assez marquant pour moi, mais le fait qu’il soit masqué…
Encore plus ! Même les voleurs ne se couvrent pas le visage au sud. Là, impossible de voir ne serait-ce qu’un petit bout de peau, que ce soit son visage ou son corps !
Même ses yeux sont camouflés derrière d’épaisses couches de tissu. Rien que de le voir me donne des sueurs.
Même un Teine n’est pas assez fou pour cela et pourtant nous les Teines, peuple de Deas, ont est génétiquement préparé à la chaleur du fait qu’on n’est pas besoin de boire de l’eau très souvent. 1 litre d’eau nous suffit pour faire au moins plusieurs semaines.
En-tout-cas pour le moment la seule chose que je peux dire de cette étrange personne, c’est qu’elle a de la force.
Beaucoup de force.
Trop pour moi qui est en train de peiner à essayer de défaire son emprise sur moi. J’ai beau forcer de toutes mes forces pour retirer mon poignet de la prise de sa main, c’est impossible.
Bon, j’abandonne ! Rien ne sert de se débattre.
En plus derrière son masque, je suis sûre qu’il doit être en train de sourire devant mon acharnement à m’échapper alors que j’ai une lame sous la gorge. Plus qu’à attendre que l’autre se décide à parler et me donne des réponses sur sa présence-là. Peut-être que c’est un assassin ?
J’observe attentivement l’inconnu pour déterminer si cela peut être vrai, à priori oui.
“Ne me regarde pas ainsi petit être frêle. Si tu n’es pas assez forte et rapide pour te défendre, ce n’est pas mon problème. » énonça le mystérieux inconnu « Si tu veux, je peux te proposer un marché pour te défaire de cette faiblesse… »
Il paraît certain que ce « marché » dont il parle pourrait m’intéresser.
Il est vraiment super étrange celui-là ! Mais bon, je ne suis pas vraiment en position d’argumenter que je ne suis pas intéressé alors je hoche la tête attendant de voir comment il va poursuivre.
Si j’arrive à gagner du temps, peut-être que je trouverai une solution pour appeler les gardes. Au vu de leur nombre dans les couloirs du palais, il doit en avoir forcément devant ma porte ou au moins passant dans le couloir.
D’ailleurs, c’est plutôt bizarre que le nombre de gardes ait drastiquement augmenté alors qu’un intrus vient de s’introduire dans ma chambre.
J’avais mis cela sur le compte des préparations de guerres et d’une potentielle attaque terroriste, mais en fait, si c’est pour lui ?
Pas si discret que cela finalement le loustic ! Un petit tour à Land-Ros dans les unités d’espionnage de l’armée lui ferait le plus grand bien. Après je ne suis toujours pas sûr que c’est pour lui cette augmentation donc je te devrais éviter de faire la maligne.
Je peux toujours me targuer d’avoir capté sa présence.
“Ta famille ne te fait pas confiance et n’apporte aucune considération à ce que tu veux, non ? Si tu ne peux pas avoir cet avenir, provoque-le ! Du moins, si tu en as le courage.” me nargue t-il juste à côté de mon oreille.
“J’acquerrais ce dont j’ai envie de manière totalement transparente et pas en utilisant des stratagèmes. Alors merci, mais non merci ! D’ailleurs comment es-tu au courant de cela ?!”
“Ah là là ! Tes espérances et rêves de petite fille ne se réaliseront jamais parce que ta morale et ton honneur, enfin le peu que tu as, t’en empêche. Jamais tu pourras devenir le soldat que tu souhaites être si tu n’incites pas toi-même les choses. Tes parents ne te le permettront jamais !”
“Premièrement, tu n’as pas répondu à ma question et deuxièmement, c’est faux ! J’ai juste à leur montrer que j’en suis capable ! Et puis pourquoi tu t’intéresses à cela toi ?! Je ne te connais pas et que m’as tout l’air d’un criminel alors pourquoi est-ce que je t’écouterais ?!”
C’est vrai quoi ! Qui est-il pour faire ce genre de commentaire ?! Je sais que d’un côté, il n’a pas tort.
Père n’accepterait jamais de me laisser me battre même si c’est pour remplacer Lucan et mère ne se mêle jamais de ce genre d’affaires.
Quant à Luven, il est tout vu que cela n’arrivera jamais et Lucan ne me demandera jamais d’y aller à sa place parce que même s’il a peur, il ira quand même quoiqu’il se passe.
Luther est quant à lui bien trop loin pour rentrer dans l’équation.
“ Je vois ton cerveau ramer très fort dans tout ce que tu penses. J’ai raison et tu le sauras bien assez tôt. Je reviendrai quand tu t’en rendras compte pour le moment, j’ai passé mon message le plus important.” finit l’inconnu masqué avant de me relâcher soudainement et de courir vers mon balcon et de se stopper pile au moment de sauter “Appel trois fois d’affilé Hartor et je serais là dans l’heure.” rajoute t-il avant de finalement se laisser tomber dans le vide d’un saut maîtrisé.
Je reste là sur mon lit, abasourdi de ce qu’il vient de se passer, me demandant même si c’est vraiment arriver. Hartor… Quel drôle de nom.
Je n’appelle pas les gardes pour qu’il poursuive l’inconnu nommer “Hartor”. Je préfère garder ce moment pour moi, tout du moins pour l’instant. Ce qu’il a dit n’est pas faux du tout et c’est cela qui me perturbe.
Je me redresse sur mon lit afin de reprendre mes esprits et porte ma main à mon cou où il y a à peine plus de 5 minutes une lame y était appuyé.
Une lame ?
MA LAME !!!!
Bordel, ce taré la prise avec lui. Je le hais !
Je me suis donné quand même du mal pour l’obtenir et maintenant avec mes préparatifs de guerre, ils viennent de faire un inventaire pour vérifier le nombre des armes. Impossible d’en revoler une ! Il a intérêt à l’avoir laissé sur le balcon ou je jure que je le fais venir pour l’étriper vif.
Je me précipite vers mon balcon avant d’en fouiller tous les coins, mais malheureusement pour moi il n’y a aucune trace de ma dague. Je voulais essayer de reproduire le combo d’épée de tout à l’heure en plus. Maintenant, je ne peux plus. J’ai vraiment la poisse, ce n’est pas possible.
Alors que je suis plongé à me lamenter sur le vol de ma précieuse dague, des coups à ma porte m’interpellent.
Tiens ça peut être qui à cette heure-ci ?
“Oui, vous pouvez entrer !” m’empressai-je de dire
L’instant suivant, je vois entrer ma mère dans ma chambre. Une véritable surprise ! Contrairement à moi qui reste figé devant elle par la surprise, ma mère part s’asseoir sur un coin de mon lit. Par rapport à elle, je n’ai pas très fière allure à rester les bras ballants sans savoir quoi dire.
“Ma chérie, vient donc t’asseoir à mes côtés.”
Cette phrase me fait réagir et j’obéis à l’ordre camouflé comme une proposition. Qu’est-ce qu’elle me veut ? J’appréhende clairement ce qu’elle va me dire.
Maintenant assise juste à côté d’elle et sans possibilité de voir son visage pour le décrypter, c’est encore plus angoissant.
“Que faisais-tu sur le balcon ?”
“Euh… je prenais l’air tout simplement.”
Je me crispe un peu face à sa question, c’est étonnant qu’elle essaye de faire la conversation, mais cela ne me dit pas ce qu’elle veut me dire. Veut-elle juste prendre de mes nouvelles ?
“Bien. Je ne vais pas te retarder plus que nécessaire pour l’heure du coucher.”
À peine a-t-elle fini sa phrase que ma mère a déjà disparu de ma chambre. Ça, c’est vraiment étrange. Elle n’a pas le droit de venir pour juste poser une question et partir comme si de rien n’était après. Je ne vais pas laisser ça se passer comme cela. Je veux savoir ce qu’elle voulait me dire.
C’est tout de même étrange qu’elle apparaisse pile au moment où ce fameux « Hartor » s’en va. Je me demande s’il y a un lien ?
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Bonsoir à vous, voici donc le chapitre 2 comme promis un mois après. J’espère qu’il vous plaira et que vous avez pris plaisir à le lire.
Signé Hakas